kamomille
VIB
naissance du premier bébé-éprouvette remonte au Maroc à 1990. Aujourdhui 15 centres, tous privés, offrent leurs services. La fécondation in vitro est encore un sujet tabou. Les couples traités par cette technique sefforcent de le cacher à leur entourage. De plus en plus de Marocains recourent à cette technique. Le taux de réussite tourne autour de 40%.
Le bébé-éprouvette nest plus une nouvelle découverte dans le monde médical. La technique de la fécondation in vitro (FIV), mise au point il y a plus dune trentaine dannées (le premier bébé né par cette technique le fut en Angleterre en 1978), est venue au secours de femmes et dhommes auxquels la nature a refusé des enfants naturellement et spontanément conçus. Des centaines de milliers de couples dans le monde, y compris au Maroc (2% des bébés des pays riches sont issus de la FIV), recourent à cette méthode, pour goûter au bonheur de la paternité. Dans leurs estimations, des spécialistes parlent de 15% de Marocains confrontés à des problèmes dinfertilité, ou carrément de stérilité (entre 15 et 17% dans le monde). La nuance est importante : la stérilité pour la femme comme pour lhomme, cest être dans lincapacité de procréer, alors que linfertilité signifie quil y a encore de lespoir. Et cet espoir, ces 15% de couples ne veulent à aucun prix le perdre. A linstar de Zakia et Mohamed qui, au bout de dix ans de mariage, ont sauté le pas. Il faut dire que déjà, après cinq ans de vie conjugale, le couple a commencé à sinquiéter. Certes, ils nont pas désespéré, mais il fallait tout de même agir. Le couple consulte. Ou, plutôt, cest la femme qui sest adressée à un gynéco. Ce dernier refuse dentamer tout diagnostic en labsence du mari à la consultation. Cest connu : si la grosesse tarde, cest la femme qui salarme la première, se sent culpabilisée, dévalorisée, et se dépêche de trouver une solution avant que lâge ne complique les choses. Le gynécologue, après échographies et autres analyses, juge que tout est normal : il ny a ni trouble de lovulation, ni obstruction des trompes , deux des causes les plus fréquentes qui empêchent la femme de tomber enceinte. On demandera au mari de faire une analyse du sperme (on appelle ça, dans le jargon médical, un spermogramme).
La femme inféconde est souvent socialement dévalorisée et dépréciée
On craint souvent, expliquent les spécialistes, que la densité de spermatozoïdes dans le liquide séminale soit basse ou que ces derniers soient de qualité médiocre. Dans ce cas, ils ne sont pas capables de jouer leur rôle. En tout cas, les hommes, daprès les statistiques, sont impliqués dans pratiquement 50% dans des problèmes de procréation. Légalité des sexes est de mise à ce niveau. Cest dire que la virilité et la stérilité ne doivent se confondre dans lesprit des gens. Un homme peut être viril, mais ses spermatozoïdes pas suffisamment sains pour provoquer une grossesse. Ce fut en tout cas le verdict du gynéco en question dans le cas de ce couple. A son prononcé, la femme, jusqualors inquiète, est soulagée. Combien de femmes, en effet, ont été répudiées par leurs maris à cause de leur supposée infertilité. Heureusement que la médecine est là pour rétablir la vérité et leur rendre justice. «Jai été en même temps heureuse et malheureuse en apprenant cette vérité. Heureuse que je ne sois pas la responsable de cette infertilité, mais malheureuse de ne pouvoir enfanter à cause de mon mari. Mais je nai jamais perdu espoir, et mon mari non plus», confie Zakia. Malgré tout, le médecin lui prescrit un traitement hormonal et conseille une organisation plus rigoureuse des rapports sexuels. Mais en vain. En dernier recours, après trois inséminations artificielles -consistant à faire pénétrer les spermatozoïdes directement dans lovaire sans effet, le gynéco prescrit une fécondation médicalement assistée, en loccurrence la FIV. Les embryons conçus extérieurement dans léprouvette, insérés minutieusement dans lutérus de la femme, se développent, et cette dernière accouche, au terme de sa grossesse, de deux jumeaux en parfaite santé. Lopération est un succès. Cest la joie. Bien entendu, la FIV reste un dernier recours. Noureddine Louanjli, biologiste et spécialiste en procréation humaine, explique, en effet, que «la majorité des couples qui souffrent dinfertilité est dabord prise en charge par des traitements médicaux ou chirurgicaux, des inductions pour stimuler lovaire, ou même parfois simplement en conseillant lorganisation des rapports du couple. Si ça ne réussit pas, on fait des inséminations (prélever le sperme et le placer directement dans lutérus.) Ce sont des opérations basiques mais qui apportent beaucoup et dispensent de recourir à la fécondation in vitro quon ne pratique quen dernier recours, lorsque tous les traitements échouent». Cest le cas, par exemple, pour des indications particulières : spermes très faibles, trompes obstruées, endométriose à un stade avancé. Cette dernière est définie, médicalement, comme un trouble caractérisé par des douleurs chroniques dans le bas-ventre. «Là, on sait que les traitements seront une perte de temps, et quil faudra passer directement à la fécondation in vitro». Comment pratique-t-on une FIV ? Le biologiste la vulgarise ainsi, sans sencombrer de termes trop savants : on administre dabord à la femme un traitement hormonal dune durée de 15 à 25 jours pour mettre en fonction ses ovaires. On recourt, ensuite à une anesthésie pour préléver des ovules de lovaire. Lesquels ovules seront fécondés par le sperme du mari par le biais dinjections. Une fois, le processus de formation (division cellulaire) lancé, lembryon en formation est réintroduit dans lutérus. Le prix de la FIV ? Entre les traitements médicaux et lopération, le couple a dû payer 35 000 DH. En général, il faut compter à partir de 25 000 DH. «Tout dépend de la femme et comment son corps va réagir aux hormones», explique M. Louanjli. Une chose est sûre, la FIV est encore un sujet tabou. Les couples traités par cette technique sefforcent de le cacher à leur entourage. Ils préfèrent parler du médecin qui a réussi à vaincre la stérilité, et se gardent de parler de la technique. Toutefois, le passage à lacte est, de plus en plus, appréhendé positivement. De nos jours, «les gens nhésitent plus comme auparavant à recourir à ce procédé pour résoudre leurs problèmes dinfertilité», se félicite M. Louanjli.
800 naissances suite à une FIV, selon les estimations des gynécos marocains
La technique sest donc banalisée, et vient rendre le sourire aux couples infertiles. Attention, le taux de réussite nest pas très élevé, reconnaît le Pr Youssef Boutaleb, le premier médecin à avoir introduit la FIV au Maroc, laquelle a donné lieu à la première naissance en 1990. Sur les 2 500 FIV par an pratiquées au Maroc (dans les 15 centres de fécondation que compte le Maroc, et qui plus sont tous privés), le taux de réussite avoisine les 40%, «alors quil était seulement de 18%, preuve que nos médecins et nos biologistes sont dune grande expérience», explique le Pr Boutaleb. Les chiffres réels, eux, parlent de quelque 800 naissances par an, suite à une FIV. Le taux de réussite dépend, enchaîne le Pr Boutaleb, « de léquipe et de la qualité de son travail». Notons que le Pr Boutaleb a été lun des premiers médecins à exiger une consultation en couple, cétait en 1969, alors quil ne recevait, dit-il, que les femmes, stériles, qui venaient seules. Les maris naccompagnaient jamais ces dernières, «cétaient elles qui étaient toujours incriminées. La femme ressent son infertilité comme une infirmité. La société ne pardonne pas cela.» Pour mieux vulgariser les problèmes, il a écrit un livre intitulé «La stérilité dans le mariage arabo-musulman» quil a fait traduire en arabe, pour, dit-il, « que le sujet soit à la portée du grand public. Beaucoup denseignants dans nos écoles ne connaissent que larabe. Or léducation sexuelle doit commencer à lécole, et on doit inculquer à nos enfants des notions sur la sexualité, la stérilité et les MST... ». Dans nombre de cas, les relations sexuelles non protégées peuvent être à lorigine de la stérilité.
Le bébé-éprouvette nest plus une nouvelle découverte dans le monde médical. La technique de la fécondation in vitro (FIV), mise au point il y a plus dune trentaine dannées (le premier bébé né par cette technique le fut en Angleterre en 1978), est venue au secours de femmes et dhommes auxquels la nature a refusé des enfants naturellement et spontanément conçus. Des centaines de milliers de couples dans le monde, y compris au Maroc (2% des bébés des pays riches sont issus de la FIV), recourent à cette méthode, pour goûter au bonheur de la paternité. Dans leurs estimations, des spécialistes parlent de 15% de Marocains confrontés à des problèmes dinfertilité, ou carrément de stérilité (entre 15 et 17% dans le monde). La nuance est importante : la stérilité pour la femme comme pour lhomme, cest être dans lincapacité de procréer, alors que linfertilité signifie quil y a encore de lespoir. Et cet espoir, ces 15% de couples ne veulent à aucun prix le perdre. A linstar de Zakia et Mohamed qui, au bout de dix ans de mariage, ont sauté le pas. Il faut dire que déjà, après cinq ans de vie conjugale, le couple a commencé à sinquiéter. Certes, ils nont pas désespéré, mais il fallait tout de même agir. Le couple consulte. Ou, plutôt, cest la femme qui sest adressée à un gynéco. Ce dernier refuse dentamer tout diagnostic en labsence du mari à la consultation. Cest connu : si la grosesse tarde, cest la femme qui salarme la première, se sent culpabilisée, dévalorisée, et se dépêche de trouver une solution avant que lâge ne complique les choses. Le gynécologue, après échographies et autres analyses, juge que tout est normal : il ny a ni trouble de lovulation, ni obstruction des trompes , deux des causes les plus fréquentes qui empêchent la femme de tomber enceinte. On demandera au mari de faire une analyse du sperme (on appelle ça, dans le jargon médical, un spermogramme).
La femme inféconde est souvent socialement dévalorisée et dépréciée
On craint souvent, expliquent les spécialistes, que la densité de spermatozoïdes dans le liquide séminale soit basse ou que ces derniers soient de qualité médiocre. Dans ce cas, ils ne sont pas capables de jouer leur rôle. En tout cas, les hommes, daprès les statistiques, sont impliqués dans pratiquement 50% dans des problèmes de procréation. Légalité des sexes est de mise à ce niveau. Cest dire que la virilité et la stérilité ne doivent se confondre dans lesprit des gens. Un homme peut être viril, mais ses spermatozoïdes pas suffisamment sains pour provoquer une grossesse. Ce fut en tout cas le verdict du gynéco en question dans le cas de ce couple. A son prononcé, la femme, jusqualors inquiète, est soulagée. Combien de femmes, en effet, ont été répudiées par leurs maris à cause de leur supposée infertilité. Heureusement que la médecine est là pour rétablir la vérité et leur rendre justice. «Jai été en même temps heureuse et malheureuse en apprenant cette vérité. Heureuse que je ne sois pas la responsable de cette infertilité, mais malheureuse de ne pouvoir enfanter à cause de mon mari. Mais je nai jamais perdu espoir, et mon mari non plus», confie Zakia. Malgré tout, le médecin lui prescrit un traitement hormonal et conseille une organisation plus rigoureuse des rapports sexuels. Mais en vain. En dernier recours, après trois inséminations artificielles -consistant à faire pénétrer les spermatozoïdes directement dans lovaire sans effet, le gynéco prescrit une fécondation médicalement assistée, en loccurrence la FIV. Les embryons conçus extérieurement dans léprouvette, insérés minutieusement dans lutérus de la femme, se développent, et cette dernière accouche, au terme de sa grossesse, de deux jumeaux en parfaite santé. Lopération est un succès. Cest la joie. Bien entendu, la FIV reste un dernier recours. Noureddine Louanjli, biologiste et spécialiste en procréation humaine, explique, en effet, que «la majorité des couples qui souffrent dinfertilité est dabord prise en charge par des traitements médicaux ou chirurgicaux, des inductions pour stimuler lovaire, ou même parfois simplement en conseillant lorganisation des rapports du couple. Si ça ne réussit pas, on fait des inséminations (prélever le sperme et le placer directement dans lutérus.) Ce sont des opérations basiques mais qui apportent beaucoup et dispensent de recourir à la fécondation in vitro quon ne pratique quen dernier recours, lorsque tous les traitements échouent». Cest le cas, par exemple, pour des indications particulières : spermes très faibles, trompes obstruées, endométriose à un stade avancé. Cette dernière est définie, médicalement, comme un trouble caractérisé par des douleurs chroniques dans le bas-ventre. «Là, on sait que les traitements seront une perte de temps, et quil faudra passer directement à la fécondation in vitro». Comment pratique-t-on une FIV ? Le biologiste la vulgarise ainsi, sans sencombrer de termes trop savants : on administre dabord à la femme un traitement hormonal dune durée de 15 à 25 jours pour mettre en fonction ses ovaires. On recourt, ensuite à une anesthésie pour préléver des ovules de lovaire. Lesquels ovules seront fécondés par le sperme du mari par le biais dinjections. Une fois, le processus de formation (division cellulaire) lancé, lembryon en formation est réintroduit dans lutérus. Le prix de la FIV ? Entre les traitements médicaux et lopération, le couple a dû payer 35 000 DH. En général, il faut compter à partir de 25 000 DH. «Tout dépend de la femme et comment son corps va réagir aux hormones», explique M. Louanjli. Une chose est sûre, la FIV est encore un sujet tabou. Les couples traités par cette technique sefforcent de le cacher à leur entourage. Ils préfèrent parler du médecin qui a réussi à vaincre la stérilité, et se gardent de parler de la technique. Toutefois, le passage à lacte est, de plus en plus, appréhendé positivement. De nos jours, «les gens nhésitent plus comme auparavant à recourir à ce procédé pour résoudre leurs problèmes dinfertilité», se félicite M. Louanjli.
800 naissances suite à une FIV, selon les estimations des gynécos marocains
La technique sest donc banalisée, et vient rendre le sourire aux couples infertiles. Attention, le taux de réussite nest pas très élevé, reconnaît le Pr Youssef Boutaleb, le premier médecin à avoir introduit la FIV au Maroc, laquelle a donné lieu à la première naissance en 1990. Sur les 2 500 FIV par an pratiquées au Maroc (dans les 15 centres de fécondation que compte le Maroc, et qui plus sont tous privés), le taux de réussite avoisine les 40%, «alors quil était seulement de 18%, preuve que nos médecins et nos biologistes sont dune grande expérience», explique le Pr Boutaleb. Les chiffres réels, eux, parlent de quelque 800 naissances par an, suite à une FIV. Le taux de réussite dépend, enchaîne le Pr Boutaleb, « de léquipe et de la qualité de son travail». Notons que le Pr Boutaleb a été lun des premiers médecins à exiger une consultation en couple, cétait en 1969, alors quil ne recevait, dit-il, que les femmes, stériles, qui venaient seules. Les maris naccompagnaient jamais ces dernières, «cétaient elles qui étaient toujours incriminées. La femme ressent son infertilité comme une infirmité. La société ne pardonne pas cela.» Pour mieux vulgariser les problèmes, il a écrit un livre intitulé «La stérilité dans le mariage arabo-musulman» quil a fait traduire en arabe, pour, dit-il, « que le sujet soit à la portée du grand public. Beaucoup denseignants dans nos écoles ne connaissent que larabe. Or léducation sexuelle doit commencer à lécole, et on doit inculquer à nos enfants des notions sur la sexualité, la stérilité et les MST... ». Dans nombre de cas, les relations sexuelles non protégées peuvent être à lorigine de la stérilité.