Les arts de l'Islam dans leur diversité cosmopolite

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Cinq cents pièces du VIIe au XXe siècle de la collection Khalili sont exposées à l'Institut du monde arabe (IMA), à Paris, jusqu'au 14 mars. Ces chefs-d'oeuvre appartiennent à la plus importante collection particulière des "Arts de l'Islam" (20 000 objets), couvrant toutes les époques et les aires géographiques de l'islam, réunie par Nasser D. Khalili, juif iranien installé en Angleterre depuis 1978. Ce collectionneur éclairé, qui a quitté l'Iran pour les Etats-Unis avec 750 dollars en poche et a fait fortune dans la grande distribution, milite pour "la paix et l'harmonie entre les communautés juive et musulmane" au sein de la Fondation Maïmonide, dont il est un des fondateurs.

Première de cette ampleur en Europe, l'exposition de l'Institut du monde arabe témoigne du formidable rayonnement de l'art islamique et de son vocabulaire, qu'ont partagé nombre de civilisations. Il est celui des Arabes de la péninsule Arabique, d'Afrique et d'Espagne, des Iraniens, des Indiens, des Syriens, des Turcs, des Egyptiens, des Afghans, des Chinois et des peuples d'Asie centrale.

Pas de chronologie redondante ou fastidieuse, mais un parcours muséographique d'où jaillit la vie : Aurélie Clémente-Ruiz et Eric Delpont, les commissaires, ont privilégié la confrontation par thèmes des objets profanes et religieux. Avec un objectif : "donner des clés de compréhension" du "plaisir de vivre" de ces peuples aux fortes traditions artistiques qui se sont emparés d'un répertoire décoratif commun - rinceau, arabesque, entrelacs géométriques - pour y ajouter la touche régionale.

Dans les vitrines, les merveilles en verre soufflé racontent le quotidien. La bouteille syrienne, sorte de melon d'eau vert émeraude (Ve siècle), montre la perfection de la technique utilisée dès le IIe millénaire avant J.-C. en Mésopotamie et en Egypte - laquelle perdure dans les souks du Caire et de Damas. La carafe en forme de cloche, bleu vif (Xe ou XIe siècle) est commune à une grande partie du monde médiéval, de la Tunisie jusqu'au Khurasan (Iran). Le plat égyptien (VIIIe siècle), au décor peint d'un soleil et d'une inscription coufique, dit que "tout appartient à Dieu".

La coupe en jade sombre à rinceaux d'or, munie d'un "dragon" pour anse, s'accrochait à la ceinture du cavalier mongol (XVe siècle), une tradition adoptée par la cour des Moghols, en Inde, fière d'avoir Tamerlan pour ancêtre. En Turquie ottomane ou dans les Balkans, au XVIe siècle, le "vase à boire" est en argent gravé. Déjà la Chine exporte : la coupe de porcelaine émaillée d'or, dont le verset coranique en glaçure bleue assure de la protection divine contre l'empoisonnement, était fabriquée pour le marché persan.

Au fil du parcours dialoguent l'orfèvrerie, la céramique, les bijoux : la "bague sceau" irakienne avec les boucles en filigranes d'or d'Espagne. Les "chaperons" de nacre capitonnés de satin rose (ou burqa) coiffant les faucons dans l'Inde moghole illustrent l'art chevaleresque en terre d'Islam. Un art hérité des traditions bédouines de l'Arabie, mariées à celles de Byzance et de la Perse sassanide. Sous les dynasties turco-mongoles, il est un attribut de la souveraineté. Les empereurs moghols ou les chahs iront jusqu'à se faire représenter un faucon au poing.

L'exposition ouvre sur le thème de la foi, de la sagesse et de la prophylaxie par une présentation des corans les plus précieux aux calligraphies à l'or, à l'encre et à la gouache sur parchemin ou sur papier. Se côtoient un livre rond comme une médaille aux 99 noms de Dieu, porté en amulette, un fascicule miniature abbasside (950-1000) avec un Coran géant iranien du XIXe siècle. Les riches copies provenant du Soudan, d'Afghanistan ou de Perse, cohabitent avec cette simple kurta de coton (longue chemise indienne), sorte d'armure spirituelle couverte du texte entier du Coran.

Aurélie Clémente-Ruiz et Eric Delpont racontent que, en ouvrant les caisses emplies de ces trésors, ils étaient comme deux gamins au pied de l'arbre de Noël. Deux ouvrages uniques par leur propos comme par la richesse des illustrations valent à eux seuls la visite. Le Shah Namah, Livre des rois, la grande épopée perse, aux 60 000 vers et 258 miniatures, réalisées entre 1520 et 1540 par les meilleurs artistes est remarquable par la précision du dessin, les nuances infinies des couleurs, la subtilité des ombres et des modelés, le rendu des détails. Document unique sur le combat des forces du bien et du mal.
 

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Pour la modernité de ses dessins à l'encre, l'or, l'argent, l'aquarelle et la gouache, pour la nervosité du trait qui fait danser les personnages et son propos cosmopolite, le manuscrit original de l'histoire universelle de Rashid-Al-Din (1247-1318) est l'autre merveille. Ce juif de Hamadan converti à l'islam pour être vizir, féru de théologie, d'histoire, d'agriculture, est l'auteur du Jami al-tawarikh, le "compilateur de l'Histoire", publié à Tabriz (Iran, 1314-1315), en langue persane, dont les pages exposées proviennent de l'édition originale. On y apprend les moeurs, les costumes, la géographie, les guerres, la mythologie et les croyances. Sont illustrés les scènes du Ramayana celles de la vie de Bouddha et la Bible, l'Arche de Noé, Jonas et la baleine ou encore la mort de Moïse au mont Nebo. Des oeuvres magistrales, à découvrir.


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"Arts de l'Islam". Institut du monde arabe, 1, rue des Fossés-Saint-Bernard, Paris-5e. Mo Jussieu. Tél. : 01-40-51-38-38. Jusqu'au 14 mars. De 10 heures à 18 heures, fermé lundi ; jeudi jusqu'à 22 heures, week-ends jusqu'à 20 heures. De 6,50 € à 10,50 €. Sur le Web : www.imarabe.org.
Catalogue, 400 p., 39 € et album, 48 p., 6 €, éd. Institut du monde arabe/Hazan.

Florence Evin
 

Mims

Date limite de consommation : 26/01/2033
Contributeur
Pour la modernité de ses dessins à l'encre, l'or, l'argent, l'aquarelle et la gouache, pour la nervosité du trait qui fait danser les personnages et son propos cosmopolite, le manuscrit original de l'histoire universelle de Rashid-Al-Din (1247-1318) est l'autre merveille. Ce juif de Hamadan converti à l'islam pour être vizir, féru de théologie, d'histoire, d'agriculture, est l'auteur du Jami al-tawarikh, le "compilateur de l'Histoire", publié à Tabriz (Iran, 1314-1315), en langue persane, dont les pages exposées proviennent de l'édition originale. On y apprend les moeurs, les costumes, la géographie, les guerres, la mythologie et les croyances. Sont illustrés les scènes du Ramayana celles de la vie de Bouddha et la Bible, l'Arche de Noé, Jonas et la baleine ou encore la mort de Moïse au mont Nebo. Des oeuvres magistrales, à découvrir.


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"Arts de l'Islam". Institut du monde arabe, 1, rue des Fossés-Saint-Bernard, Paris-5e. Mo Jussieu. Tél. : 01-40-51-38-38. Jusqu'au 14 mars. De 10 heures à 18 heures, fermé lundi ; jeudi jusqu'à 22 heures, week-ends jusqu'à 20 heures. De 6,50 € à 10,50 €. Sur le Web : www.imarabe.org.
Catalogue, 400 p., 39 € et album, 48 p., 6 €, éd. Institut du monde arabe/Hazan.

Florence Evin

L'article donne vraiment envie d'y etre ,avec la description faite des objets , on sent vraiment que ce sont des pieces rares , le Coran avec calligraphie en Or , ça doit etre un grand moment .
 
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