Makelloos
VIB
1. Bernard-Henri Lévy (BHL) n’a pas encore réagi à la nouvelle offensive israélienne contre Gaza.
Mais il a déjà livré, sur des événements (très) similaires, quelques pensées profondes – qui méritent d’être redécouvertes*.
2. À l’été 2006, les Forces de défense israéliennes (FDI) attaquent le Liban pour «riposter» à des tirs de roquettes.
Le 20 juillet, BHL explique, dans l’hebdomadaire Le Point (et dans une chronique qui sera aimablement diffusée par l’ambassade d’Israël en France), qu’il ne peut absolument pas juger de l’éventuelle «disproportion» de cette guerre - dont le bilan humain sera de 1.300 victimes civiles côté libanais (dont un tiers d’enfants), contre 48 côté israélien.
Car, explique-t-il: il n’est pas un «grand expert des affaires militaires».
Puis, tout de même: BHL enfile son treillis, et se rend, non au Liban, mais en Israël – «la seule démocratie de la région», selon lui.
De cette escapade, il rapporte un hallucinant publireportage, que Le Monde publie in extenso – pour mieux asseoir, peut-être, sa réputation de journal de référence.
Ce «témoignage» est présenté comme un «récit»: il commence le 17 juillet 2006, qui se trouve être le jour de l’«anniversaire du déclenchement de la guerre d’Espagne».
Forcément, cette merveilleuse coïncidence inspire le philosophe: «Cela fait 70 ans, jour pour jour qu’eut lieu le putsch des généraux qui donna le coup d’envoi à la guerre civile, idéologique et internationale voulue par le fascisme de l’époque», écrit-il d’abord.
Puis il ajoute: «Je ne peux pas ne pas y penser, je ne peux pas ne pas faire le rapprochement, tandis que j’atterris à Tel-Aviv.»
Le hasard – qui aurait pu le faire atterrir vingt-quatre heures plus tôt, ou plus tard – fait bien les choses.
Peu de temps après cette arrivée historique: BHL «monte vers Avivim. Puis, d’Avivim, jusqu’à Manara, que tiennent les Israéliens et où ils ont installé, dans un cirque de deux cents mètre de diamètre, un champ d’artillerie».
Là: «trois choses» le frappent.
D’abord, «l’extrême jeunesse des artilleurs : vingt ans ; peut-être dix-huit ; leur air stupéfié quand le coup part, comme si c’était chaque fois la première fois ; leurs moqueries de gamins quand le copain n’a pas eu le temps de se boucher les oreilles et que la détonation l’assourdit ; et puis le côté grave en même temps, pénétré, de qui se sait aux avant-postes d’un drame immense, et qui le dépasse» (1).
Puis: «L’allure décontractée (…) d’une petite troupe qui (…) rappelle irrésistiblement la joyeuse bousculade des bataillons de jeunesse républicains décrits (…) par Malraux : une armée plus sympathique que martiale, plus démocratique que sûre d’elle et dominatrice ; une armée qui (…) semble aux antipodes de ces bataillons de brutes, ou de Terminator sans principes ni pitié, qu’ont si souvent décrits les grands médias européens.»
Puis enfin: «Cette drôle de machine (…) qui, elle ne tire pas: (…) une salle des machines où l’on entre, comme dans un sous-marin, par une tourelle centrale et une échelle de coupée; il s’y tient six hommes, certains jours sept, qui s’affairent autour de radars, ordinateurs et autres appareils de transmission dont le rôle est de collecter du renseignement pour, ensuite, déterminer les paramètres de tir qu’on va transmettre aux obusiers; et la vérité est qu’il y a là, au principe du feu israélien, un véritable laboratoire de guerre où des savants-soldats déploient une intelligence optimale, pour, le nez collé sur leurs écrans, tenter d’intégrer jusqu’aux plus impondérables données de terrain qui leur arrivent, calculer la distance de la cible, sa vitesse de déplacement ainsi que, last but not least, le degré de proximité d’éventuels civils dont l’évitement est (…) un souci prioritaire – et pourtant…» (2).
Résumons: en ce lumineux mois de juillet 2006, les jeunes artilleurs israéliens de Manara ne sont pas seulement graves et concentrés.
Ils sont aussi, et dans cet ordre: décontractés, joyeux, républicains, sympathiques, démocratiques, savants, équipés de drôles de machines pleines d’écrans, et, last but not least, foncièrement soucieux d’éviter que leurs tirs n’atteignent des innocents.
Dieu, que la guerre est jolie.
Quand Bernard-Henri Lévy la narre.
suite .....
Mais il a déjà livré, sur des événements (très) similaires, quelques pensées profondes – qui méritent d’être redécouvertes*.
2. À l’été 2006, les Forces de défense israéliennes (FDI) attaquent le Liban pour «riposter» à des tirs de roquettes.
Le 20 juillet, BHL explique, dans l’hebdomadaire Le Point (et dans une chronique qui sera aimablement diffusée par l’ambassade d’Israël en France), qu’il ne peut absolument pas juger de l’éventuelle «disproportion» de cette guerre - dont le bilan humain sera de 1.300 victimes civiles côté libanais (dont un tiers d’enfants), contre 48 côté israélien.
Car, explique-t-il: il n’est pas un «grand expert des affaires militaires».
Puis, tout de même: BHL enfile son treillis, et se rend, non au Liban, mais en Israël – «la seule démocratie de la région», selon lui.
De cette escapade, il rapporte un hallucinant publireportage, que Le Monde publie in extenso – pour mieux asseoir, peut-être, sa réputation de journal de référence.
Ce «témoignage» est présenté comme un «récit»: il commence le 17 juillet 2006, qui se trouve être le jour de l’«anniversaire du déclenchement de la guerre d’Espagne».
Forcément, cette merveilleuse coïncidence inspire le philosophe: «Cela fait 70 ans, jour pour jour qu’eut lieu le putsch des généraux qui donna le coup d’envoi à la guerre civile, idéologique et internationale voulue par le fascisme de l’époque», écrit-il d’abord.
Puis il ajoute: «Je ne peux pas ne pas y penser, je ne peux pas ne pas faire le rapprochement, tandis que j’atterris à Tel-Aviv.»
Le hasard – qui aurait pu le faire atterrir vingt-quatre heures plus tôt, ou plus tard – fait bien les choses.
Peu de temps après cette arrivée historique: BHL «monte vers Avivim. Puis, d’Avivim, jusqu’à Manara, que tiennent les Israéliens et où ils ont installé, dans un cirque de deux cents mètre de diamètre, un champ d’artillerie».
Là: «trois choses» le frappent.
D’abord, «l’extrême jeunesse des artilleurs : vingt ans ; peut-être dix-huit ; leur air stupéfié quand le coup part, comme si c’était chaque fois la première fois ; leurs moqueries de gamins quand le copain n’a pas eu le temps de se boucher les oreilles et que la détonation l’assourdit ; et puis le côté grave en même temps, pénétré, de qui se sait aux avant-postes d’un drame immense, et qui le dépasse» (1).
Puis: «L’allure décontractée (…) d’une petite troupe qui (…) rappelle irrésistiblement la joyeuse bousculade des bataillons de jeunesse républicains décrits (…) par Malraux : une armée plus sympathique que martiale, plus démocratique que sûre d’elle et dominatrice ; une armée qui (…) semble aux antipodes de ces bataillons de brutes, ou de Terminator sans principes ni pitié, qu’ont si souvent décrits les grands médias européens.»
Puis enfin: «Cette drôle de machine (…) qui, elle ne tire pas: (…) une salle des machines où l’on entre, comme dans un sous-marin, par une tourelle centrale et une échelle de coupée; il s’y tient six hommes, certains jours sept, qui s’affairent autour de radars, ordinateurs et autres appareils de transmission dont le rôle est de collecter du renseignement pour, ensuite, déterminer les paramètres de tir qu’on va transmettre aux obusiers; et la vérité est qu’il y a là, au principe du feu israélien, un véritable laboratoire de guerre où des savants-soldats déploient une intelligence optimale, pour, le nez collé sur leurs écrans, tenter d’intégrer jusqu’aux plus impondérables données de terrain qui leur arrivent, calculer la distance de la cible, sa vitesse de déplacement ainsi que, last but not least, le degré de proximité d’éventuels civils dont l’évitement est (…) un souci prioritaire – et pourtant…» (2).
Résumons: en ce lumineux mois de juillet 2006, les jeunes artilleurs israéliens de Manara ne sont pas seulement graves et concentrés.
Ils sont aussi, et dans cet ordre: décontractés, joyeux, républicains, sympathiques, démocratiques, savants, équipés de drôles de machines pleines d’écrans, et, last but not least, foncièrement soucieux d’éviter que leurs tirs n’atteignent des innocents.
Dieu, que la guerre est jolie.
Quand Bernard-Henri Lévy la narre.
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