La Bourse de Bagdad, îlot de sécurité sur une planète dans la tourmente

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Casablanca d'antan
VIB
Alors que les Bourses de Paris, Londres ou New York s'effondraient, la minuscule Bourse de Bagdad s'est avérée être un îlot de sécurité porté par un indice toujours en hausse, malgré les violences qui continuent de frapper la capitale irakienne.
L'indice de référence, l'ISX, a fait un bond de plus de 50% depuis janvier, passant de 34,6 points à 51,36 points lors de la dernière séance dimanche.

Et sur les dernières semaines, au plus fort de la crise financière mondiale, l'indice a fait preuve de fermeté à l'exception de ce dimanche où il a enregistré une chute de deux points.

"Nous ne sommes vraiment pas touchés par la crise financière internationale parce que nous n'avons pas de liens avec le reste du monde", résume Ninos Ismael, un jeune trader qui se targue d'avoir généré 40% de bénéfices sur ses investissements depuis le début de l'année.

Protégé par des immenses murs en béton et des hommes armés dans le quartier très commerçant de Karrada, dans le centre de Bagdad, cette Bourse a le parfum du Wall Street des origines, au XIXe siècle.

Elle fonctionne de manière manuelle selon le système archaïque de la criée.

Selon le président de la Bourse, Taha Ahmed Abdel Salam, la cotation électronique va être introduite en novembre.

"Cela permettra aux investisseurs de vendre et d'acheter des actions dans la même séance de cotation", se réjouit le directeur.

A l'heure actuelle, les boursicoteurs doivent acquérir un certificat d'achat d'action, ce qui peut prendre jusqu'à deux semaines, avant de pouvoir la revendre.

Le marché à terme et l'achat à découvert, courants sur les marchés internationaux, ne sont pas autorisés à Bagdad, où il y a pour l'instant peu d'investisseurs étrangers.

A l'intérieur, au rez-de-chaussée, les courtiers passent leurs ordres, tout en surveillant d'un oeil le tableau blanc où les commis inscrivent au marqueur les cotations boursières.

Ces dernières semaines, les actions des hôtels ont été la valeur sûre. Sur les deux derniers mois, le secteur a pris 40%, l'effet de rumeurs plutôt que de réelles informations sur des investissements dans le secteur.

"Les rumeurs ont un impact énorme sur ce marché et les fondamentaux économiques n'ont pas grand chose à voir avec la hausse", estime Ninos Ismael, 30 ans, l'un des plus jeunes traders de la "corbeille", la salle des marchés.

Ouvert deux heures par jour et trois jours par semaine, l'indice ISX n'est pas complètement à l'abri de soubresauts des places internationales.

"La crise pourrait affecter l'Irak", assure Adel al-Jawahiri, courtier depuis 15 ans. "Notre pays exporte essentiellement du pétrole et importe la majorité des biens. S'il y a des variations de prix, cela pourrait avoir un impact sur nos entreprises", déplore-t-il.

Les investissements étrangers, en majorité des traders des pays arabes, participent à seulement 5% de la capitalisation boursière.

En 2007, la capitalisation du marché était de 1,7 milliard de dollars, et en 2008, ce chiffre a déjà été dépassé, même s'il reste minime en regard des 10 milliards de dollars que générait la Bourse de Bagdad de l'époque de Saddam Husseïn.

A titre de comparaison, les 40 valeurs vedettes de la Bourse de Paris (CAC 40) pèsent ensemble 836 milliards d'euros (1.120 milliards de dollars).

Les plus anciens traders rappellent que l'"ancienne" Bourse irakienne était minée par la corruption et par les combines des proches de Saddam Husseïn mais ils estiment qu'il est plus difficile désormais de gagner de l'argent.

"C'était beaucoup mieux avant", regrette M. Jawahiri.

Ouvert en 2004, un an après l'invasion américaine et la chute de Saddam Hussein, la Bourse de Bagdad a failli sombrer complètement dans la tourmente des violences qui faisaient rage à ses portes, au coeur de Bagdad.

"J'appelais les courtiers pour les supplier de venir travailler", se souvient Salam, qui porte toujours une arme.



Par Benjamin MORGAN :D
 
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