Makelloos
VIB
La religion chrétienne n'est pas seulement, par essence, la religion d'amour que l'on croit parfois. Rien n’est plus faux par exemple que de brosser le portrait de Jésus-Christ, fondateur du christianisme, comme celui d’un prophète non-violent.
Il ne faut pas confondre toutes les formes d’intégrisme religieux. Il y a sans doute peu en commun entre le militant juif ultraorthodoxe qui puise dans le messianisme biblique sa revendication en faveur du «Grand Israël», le musulman salafiste qui rêve d’un retour aux premiers temps idéalisés de l’islam et le protestant évangélique radical ou le traditionaliste catholique qui rêve d’une «reconquête» chrétienne du monde.
Le point commun est qu’ils sont en rupture avec la «modernité», identifiée à la sécularisation, la laïcisation, le prétendu déclin des valeurs familiales et morales, la moindre visibilité de la religion. Comme le judaïsme, le christianisme connaît –et on verra plus tard le cas de l'islam– des chocs en retour, des réaffirmations «communautaires», des discours et parfois des actes violents contre une modernité moralement permissive et étrangère à Dieu.
A partir d’une lecture fondamentaliste du texte biblique, des militants chrétiens radicaux condamnent l’homosexualité, l’avortement, la sexualité hors mariage, la recherche sur les cellules souches d’embryons ou l’euthanasie. Leur vision biblique du monde est binaire: d’un côté, les «purs» ou les forces du Bien; de l’autre, les «corrompus» ou les forces du Mal, auxquelles est parfois assimilé l’islam. L’idéologie de «croisade», réactivée dans les années Bush après le 11-Septembre, n’a pas complètement disparu. Nouveau «peuple élu» par Dieu, les puissants courants évangéliques américains se disent encore dotés d’une mission universelle de conversion et de réforme du monde.
Par ses textes de référence et par son histoire, le christianisme, qu’il soit protestant, catholique ou orthodoxe, a donc eu, lui aussi, maille à partir avec la violence. On en veut que pour preuve les déclarations de «repentir» des dirigeants des Eglises.
1.Jésus n'était pas si pacifique:
Rien n’est plus faux que de brosser le portrait de Jésus-Christ comme celui d’un prophète
non-violent
Rien n’est plus faux que de brosser le portrait de Jésus-Christ, fondateur du christianisme, comme celui d’un prophète non-violent, une sorte d’ancêtre de Gandhi ou de Martin Luther King. Rien n’est plus faux également d’affirmer que le Nouveau Testament (Evangile et premiers écrits chrétiens) est celui de la conversion au «Dieu d’amour», rompant ainsi avec l’Ancien Testament, les récits bibliques de guerre et d’extermination.
La Bible hébraïque ne se réduit pas, en effet, à un héritage de violences et c’est dans les Ecritures juives que Jésus –venu sur terre, disent les Evangiles, non pas pour «abolir» la Loi de Moïse, mais pour l'«accomplir»– a puisé ses commandements majeurs de l’amour de Dieu et du prochain. L’une des premières hérésies chrétiennes, rejetée par l’Eglise naissante, a d’ailleurs été le «marcionisme» –du nom du philosophe Marcion (85-160)– qui voulait couper le christianisme de ses racines juives en opposant le «méchant Dieu» de l’Ancien Testament au «gentil» du Nouveau.
Certes, le prophète juif du nom de Jésus condamne, sans appel, la violence. Il appelle à la miséricorde des siens pour tous les exclus et marginaux de son temps, pour les «simples d’esprit», les lépreux, les collecteurs d’impôts, les étrangers (les fameux Samaritains), les prostituées, la femme adultère, les pécheurs, bref tous ceux que les juifs pieux ne voulaient jamais accueillir à leur table de peur d’être souillés. C’est la principale provocation de son message:
«Je ne suis pas venu pour les justes, mais pour les pécheurs».
Soit un retournement de valeurs qui résonne jusqu’à aujourd’hui:
«Vous avez entendu qu’il a été dit: Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Et bien moi, je vous dis: Aimez vos ennemis» (évangéliste Matthieu 5, 43-44). L’apôtre Paul qui, avant sa conversion, persécutait les premiers chrétiens, surenchérissait: «Ne rendez à personne le mal pour le mal. S’il est possible, vivez en paix avec tous les hommes» (épitre aux Romains 12, 17-18).
Par son arrestation, son procès et sa mort sur une croix –le supplice le plus cruel à l’époque–, Jésus a été victime d’une extrême violence. Mais il n’est pas un pacifiste bêlant, contrairement à ce que dit l’image d’Epinal. Il frappe, au contraire, par la virulence de son langage:
Jésus traite ses contemporains de «race de vipères», manie l’imprécation, chasse les marchands du temple de Jérusalem
«Je suis venu jeter le feu sur la terre» (Luc 12,49); «Je suis venu non pas pour apporter la paix, mais l’épée» (Matthieu 10,34). Jésus traite ses contemporains de «race de vipères» (Matthieu 12, 34), manie l’imprécation («Malheur à toi…»), chasse les marchands du temple de Jérusalem et les invective: «Ma maison sera une maison de prière, mais vous, vous en avez fait une caverne de bandits» (Luc 19,46). Il rudoie son premier disciple, Pierre, qui fait de lui le «Messie» annoncé par les prophètes juifs, mais un Messie «triomphant», en prononçant le fameux «Vade retro Satanas (Derrière moi, Satan)» (Marc 8,33).
Jésus demande enfin à ses disciples de se munir d’une épée quand ils auront à témoigner de lui dans le monde.
http://www.slate.fr/story/106313/christianisme-jesus-pacifiste-et-religion-persecutrice
Il ne faut pas confondre toutes les formes d’intégrisme religieux. Il y a sans doute peu en commun entre le militant juif ultraorthodoxe qui puise dans le messianisme biblique sa revendication en faveur du «Grand Israël», le musulman salafiste qui rêve d’un retour aux premiers temps idéalisés de l’islam et le protestant évangélique radical ou le traditionaliste catholique qui rêve d’une «reconquête» chrétienne du monde.
Le point commun est qu’ils sont en rupture avec la «modernité», identifiée à la sécularisation, la laïcisation, le prétendu déclin des valeurs familiales et morales, la moindre visibilité de la religion. Comme le judaïsme, le christianisme connaît –et on verra plus tard le cas de l'islam– des chocs en retour, des réaffirmations «communautaires», des discours et parfois des actes violents contre une modernité moralement permissive et étrangère à Dieu.
A partir d’une lecture fondamentaliste du texte biblique, des militants chrétiens radicaux condamnent l’homosexualité, l’avortement, la sexualité hors mariage, la recherche sur les cellules souches d’embryons ou l’euthanasie. Leur vision biblique du monde est binaire: d’un côté, les «purs» ou les forces du Bien; de l’autre, les «corrompus» ou les forces du Mal, auxquelles est parfois assimilé l’islam. L’idéologie de «croisade», réactivée dans les années Bush après le 11-Septembre, n’a pas complètement disparu. Nouveau «peuple élu» par Dieu, les puissants courants évangéliques américains se disent encore dotés d’une mission universelle de conversion et de réforme du monde.
Par ses textes de référence et par son histoire, le christianisme, qu’il soit protestant, catholique ou orthodoxe, a donc eu, lui aussi, maille à partir avec la violence. On en veut que pour preuve les déclarations de «repentir» des dirigeants des Eglises.
1.Jésus n'était pas si pacifique:
Rien n’est plus faux que de brosser le portrait de Jésus-Christ comme celui d’un prophète
non-violent
Rien n’est plus faux que de brosser le portrait de Jésus-Christ, fondateur du christianisme, comme celui d’un prophète non-violent, une sorte d’ancêtre de Gandhi ou de Martin Luther King. Rien n’est plus faux également d’affirmer que le Nouveau Testament (Evangile et premiers écrits chrétiens) est celui de la conversion au «Dieu d’amour», rompant ainsi avec l’Ancien Testament, les récits bibliques de guerre et d’extermination.
La Bible hébraïque ne se réduit pas, en effet, à un héritage de violences et c’est dans les Ecritures juives que Jésus –venu sur terre, disent les Evangiles, non pas pour «abolir» la Loi de Moïse, mais pour l'«accomplir»– a puisé ses commandements majeurs de l’amour de Dieu et du prochain. L’une des premières hérésies chrétiennes, rejetée par l’Eglise naissante, a d’ailleurs été le «marcionisme» –du nom du philosophe Marcion (85-160)– qui voulait couper le christianisme de ses racines juives en opposant le «méchant Dieu» de l’Ancien Testament au «gentil» du Nouveau.
Certes, le prophète juif du nom de Jésus condamne, sans appel, la violence. Il appelle à la miséricorde des siens pour tous les exclus et marginaux de son temps, pour les «simples d’esprit», les lépreux, les collecteurs d’impôts, les étrangers (les fameux Samaritains), les prostituées, la femme adultère, les pécheurs, bref tous ceux que les juifs pieux ne voulaient jamais accueillir à leur table de peur d’être souillés. C’est la principale provocation de son message:
«Je ne suis pas venu pour les justes, mais pour les pécheurs».
Soit un retournement de valeurs qui résonne jusqu’à aujourd’hui:
«Vous avez entendu qu’il a été dit: Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Et bien moi, je vous dis: Aimez vos ennemis» (évangéliste Matthieu 5, 43-44). L’apôtre Paul qui, avant sa conversion, persécutait les premiers chrétiens, surenchérissait: «Ne rendez à personne le mal pour le mal. S’il est possible, vivez en paix avec tous les hommes» (épitre aux Romains 12, 17-18).
Par son arrestation, son procès et sa mort sur une croix –le supplice le plus cruel à l’époque–, Jésus a été victime d’une extrême violence. Mais il n’est pas un pacifiste bêlant, contrairement à ce que dit l’image d’Epinal. Il frappe, au contraire, par la virulence de son langage:
Jésus traite ses contemporains de «race de vipères», manie l’imprécation, chasse les marchands du temple de Jérusalem
«Je suis venu jeter le feu sur la terre» (Luc 12,49); «Je suis venu non pas pour apporter la paix, mais l’épée» (Matthieu 10,34). Jésus traite ses contemporains de «race de vipères» (Matthieu 12, 34), manie l’imprécation («Malheur à toi…»), chasse les marchands du temple de Jérusalem et les invective: «Ma maison sera une maison de prière, mais vous, vous en avez fait une caverne de bandits» (Luc 19,46). Il rudoie son premier disciple, Pierre, qui fait de lui le «Messie» annoncé par les prophètes juifs, mais un Messie «triomphant», en prononçant le fameux «Vade retro Satanas (Derrière moi, Satan)» (Marc 8,33).
Jésus demande enfin à ses disciples de se munir d’une épée quand ils auront à témoigner de lui dans le monde.
http://www.slate.fr/story/106313/christianisme-jesus-pacifiste-et-religion-persecutrice
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