Denis de grossesse.

Le déni de grossesse se définit comme le fait pour une femme enceinte de ne pas avoir conscience de l’être. C’est ce que rappelle le Dr N.GRANGAUD, pédopsychiatre, dans une thèse qui fait référence, "Déni de grossesse, essai de compréhension psychopathologique [1].

Une des idées fausses circulant sur le déni est qu’il ne peut concerner que de très jeunes femmes ou des femmes "attardées". Rien n’est plus faux, comme le prouve une étude française récente menée pendant de sept ans auprès de 2 550 femmes ayant été hospitalisées dans les maternités de Denain et Valenciennes [2]. Les auteurs ont observé et décrit 56 cas de déni qui se partagent pratiquement à égalité entre ceux qui prennent fin avant le terme de la grossesse ("déni partiel") et les dénis qui se poursuivent jusqu’à l’accouchement ("déni total" : 29 cas).

Cette étude fait surtout ressortir que près de la moitié des femmes victimes d’un déni est déjà mère d’un ou de deux enfants (26 femmes sur les 56 étudiées). Le fait d’être déjà mère ne protège donc pas contre le déni, et ne permet pas de facto à la femme de "reconnaître", d’avoir conscience de son état de grossesse. Autre information de poids : tous les milieux sociaux sont concernés. Le déni n’a donc pas une explication "sociale" mais, comme les principales affections psychiatriques, il est répartie au hasard dans la population. Caractéristique essentielle du déni : le corps ne présente pas de signe de grossesse. Il n’y a pas de "ventre". Il n’y a pratiquement pas de prise de poids, ni de masque de grossesse. Les femmes ne sentent pas bouger le bébé. L’aménorrhée caractéristique de la grossesse est elle même souvent transitoire ou même totalement absente (autrement dit, il y a des règles ou des saignements génitaux pendant la grossesse)....
 
Un exemple significatif de déni total rapportés, parmi d’autres, dans la littérature médicale, est celui d’une femme, militaire de carrière, arrivée à terme, qui déclare que non seulement elle n’a éprouvé aucun des signes qu’elle avait ressentis lors de ces deux grossesses précédentes mais surtout, qu’elle ne peut être enceinte puisqu’elle n’a pas pris de poids et "est rentrée" dans son treillis habituel jusqu’à l’accouchement.

En ce qui concerne l’entourage le plus proche, ce qui est caractéristique, c’est. que lui non plus ne voit rien, ne perçoit rien, alors que des personnes plus éloignées, qui ne voient qu’épisodiquement la femme qui souffre de déni peuvent parfois percevoir qu’elle est enceinte ! Pas toujours : de nombreux médecins, même expérimentés, ont "laissé passer", en la prenant pour autre chose, des grossesses parfois près du terme chez des femmes en déni.

Quand le déni est total, l’accouchement s’accompagne d’un état de sidération. Une patiente dit par exemple : "J’ai pris un bain car j’avais mal au ventre, je pensais que c’était mes règles. Et puis tout a claqué, il y avait du sang, du sang, et je suis restée dans le bain". Cela semble être encore plus le cas quand l’accouchement a lieu dans la solitude [3]. Il n’est pas rare que dans ces cas là qu’il se solde par la mort du bébé, soit accidentellement, soit par manque de soins (6 cas dans l’étude déjà citée sur les 29 cas de déni total). Ce dernier cas constite pour la femme un drame d’une gravité peu commune. Non seulement dans les heures qui suivent la naissance, elle réalise brutalement qu’elle était enceinte sans le savoir (d’où l’angoisse que l’on peut imaginer sur le fonctionnement de son propre corps) mais de plus que son bébé est mort ! Comme si ce double drame n’était pas suffisant, cette femme est jetée en prison. C’est cette attitude moyenâgeuse que dénonce l’Association Française pour la Reconnaissance du Déni de Grossesse.

En effet, la réalité du "déni de grossesse" est établie sur le plan médical. Avec 600 à 1 800 femmes concernées chaque année en France, il constitue d’ailleurs un réel problème de santé publique. L’Association Française pour la Reconnaissance du Déni de Grossesse se bat pour que le déni de grossesse soit maintenant juridiquement reconnu.
 
Haut