Eurovision : le coup de gueule de nicolas ungemuth

Le concept est tellement insensé qu'il en devient brillant: réunir les chanteurs les plus nuls venant de toute l'Europe, et les faire concourir. Cette atrocité perdure depuis 1956, et sera visible, en direct de Copenhague, samedi soir sur cette bonne vieille France 3. Pourquoi, en effet, priver le service public d'une émission de qualité à laquelle les citoyens contribuent directement via leur redevance adorée?

Les Français pourront donc, une fois de plus, rire grassement de ce spectacle très «coloré», et apprécier les «artistes» qui représentent l'Hexagone. En l'occurrence le démentiel groupe Twin Twin (Ouin Ouin n'aurait pas été mal non plus, encore qu'à la réflexion, Neu Neu eut été parfait), et sa tonitruante chanson «Moustache». Ces poètes -dont l'un semble s'être penché sur l'héritage capillaire de feu Desireless- chanteront donc pour des centaines de milliers de téléspectateurs leurs paroles sensationnelles: «Je veux ci, je veux ça, c'est comme-ci, c'est comme ça, je veux ci je veux ça, c'est comme-ci, c'est comme ça, y'a toujours un truc que j'ai pas… J'donnerais tout ce que j'ai contre une moustache, maintenant je sais, ce que je veux c'est une moustache.» Seraient-ils des admirateurs inconditionnels de Jean-Pierre Marielle? De Village People? Nul ne le sait. Mais une chose est sûre, leur «chanson» est l'un des trucs les plus consternants jamais sélectionnés pour cette manifestation pourtant familière des nullités.

Pour mieux comprendre la sélection, voici l'une des règles de l'Eurovision: «Les chansons concurrentes sont choisies lors de sélections nationales organisées par les diffuseurs participants. L'organisation et la forme de ces sélections sont laissées à l'entière détermination des diffuseurs participants. Les chansons retenues ne doivent pas avoir été commercialisées avant le premier septembre de l'année précédente et leur durée maximale doit être de trois minutes. Les paroles des chansons, ainsi que leur présentation, ne peuvent porter atteinte, ni au concours, ni à l'Union Européenne de Radio-télévision. Il est interdit d'inclure tout mot ou tout geste de nature politique ou assimilable. Il est interdit d'inclure toute insulte ou tout langage inacceptable.». On voit, tout de suite, le souci de la qualité… Mais nous aimons aussi beaucoup celle-ci: «Chaque présentation ne peut compter que six personnes au maximum sur scène. Aucun animal vivant ne peut être amené sur scène» (ce qui suppose que les animaux morts sont tolérés. Nous suggérons donc pour les prochains participants d'apporter un poulpe décongelé, on en trouve dans toutes les bonnes poissonneries). C'est une bonne nouvelle: certes, les Twin Twin sont affligeants, mais nous avons désormais la preuve qu'ils ne sont pas des animaux puisqu'ils ne sont pas morts.

Mais tout de même: pourquoi tant d'horreur? Quelques perfides spécialistes ont suggéré la thèse suivante: le pays qui remporte l'Eurovision devant accueillir l'édition suivante, il est préférable de perdre, cette manifestation culturelle étant hors de prix. Ce qui expliquerait le choix, toujours terrifiant, des chanteurs sélectionnés. Et donne parfois des situations cocasses. Ainsi, en 2012, la cérémonie se déroula-t-elle dans une charmante dictature qui avait mis les journalistes et techniciens dans un état d'angoisse certain: l'Azerbaïdjan. A Bakou, ça grinçait plus que ça ne guinchait. D'où l'idée de Jean-Christophe Buisson, spécialiste des dictatures au Figaro Magazine, qui souhaite de toute force qu'en 2014, le candidat Belarusse l'emporte. Ce qui supposerait, en 2015, une grande fiesta «colorée» et joviale à Minsk, riante cité peinant à développer son tourisme. Avec un peu de chance, c'est faisable.

Reste une suggestion pour les statisticiens: il serait intéressant de savoir si le taux de suicide des Français n'augmente pas sensiblement à chaque diffusion de l'Eurovision. Si c'est le cas, nous saurons y remédier. Si ce ne l'est pas, ce sera la preuve du moral indestructible des citoyens.

Eurovision, Twin Twin : le coup de gueule de Nicolas Ungemuth
 

Mims

Date limite de consommation : 26/01/2033
Contributeur
Cette année , c'était pas les twin twin. C'est un coup de gueule d'1 an en arrière. Bravo à la Belgique pour sa belle performance.
 
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