France – Israël : l'accord secret

Drianke

اللهم إفتح لنا أبواب الخير وأرزقنا من حيت لا نحتسب
Contributeur
Alors que le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, est en visite officielle dans l'Hexagone jusqu'au mercredi 6 juin, GEO Histoire revient sur l'accord secret entre Paris et Israël. Ou comment, sous la IVe République, la France a aidé clandestinement l’Etat juif à se doter de l’arme nucléaire face à un ennemi commun : l’Egyptien Nasser. Un sujet qui demeure tabou encore aujourd’hui.

C’est encore l’un des secrets les mieux gardés du XXe siècle. Et gare à quiconque tenterait de lever le voile ! Car la sulfureuse histoire de la bombe atomique israélienne relève du tabou le plus absolu. L’ex-technicien nucléaire israélien Mordehai Vanunu en sait quelque chose. Pour avoir révélé, en 1986, dans la presse britannique, l’existence du programme atomique de son pays et rendu publiques les premières photos du complexe militaroindustriel de Dimona (construit par des entreprises françaises dans le nord du désert du Néguev), l’homme a payé le prix fort. Enlevé par le Mossad puis jeté dans une prison, il y croupit pendant dix-huit longues années. Libéré en 2004, le technicien vit toujours sous haute surveillance. Quant à l’historien israélien Avner Cohen qui a publié, en 1998, une enquête fouillée sur ce rocambolesque dossier, il préfère vivre aux Etats-Unis… Malgré presque six décennies émaillées de mensonges et de démentis, Israël fait bel et bien partie du club très fermé des nations détenant l’arme atomique. Et c’est à la France de la IVe République que l’Etat hébreu le doit.

Nous sommes au début des années 1950. La France, qui depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale rêve d’une place de choix parmi les grandes puissances, se lance dans un ambitieux programme atomique. En 1952, Paris décide ainsi d’édifier à Marcoule (Gard) une usine nucléaire, puis en 1953 d’acquérir (auprès d’Israël) des brevets de fabrication de l’eau lourde – un composé indispensable au refroidissement du réacteur – et enfin, en 1954, de lancer la construction d’un sousmarin nucléaire. Au même moment, l’Etat hébreu, tout juste rescapé de la guerre de 1948, est convaincu que seule l’arme atomique pérennisera son existence face à l’Egypte du président Gamal Abdel Nasser. «Pour éviter un nouvel Auschwitz, Israël doit avoir les moyens d’infliger un nouvel Hiroshima», résume Avner Cohen (dans le documentaire de Dirk Pohlmann Israël et le tabou de la bombe, 2012). Face au refus des Etats-Unis de lui fournir la technologie du plutonium, David Ben Gourion mise tout sur la France. Dès 1953, son protégé Shimon Peres, directeur général du ministère de la Défense, est chargé de mener une campagne de lobbying afin de convaincre les dirigeants français d’aider son pays. Sa manoeuvre souterraine dans les antichambres du pouvoir civil et militaire français va conduire à la naissance d’un nouvel axe entre Paris et Jérusalem.

Du 17 au 19 juin 1956, au château de Vémars (Val-d’Oise) – propriété de Gustave Leven, PDG de Perrier et figure de l’Alliance israélite universelle – se tient une réunion ultrasecrète. Il y a, côté français, Abel Thomas, le directeur de cabinet du ministre de la Défense Maurice Bourgès-Maunoury, le général Maurice Challe, chef d’étatmajor des forces armées et Pierre Boursicot, le patron du SDECE (le contre-espionnage). Côté israélien, Moshe Dayan, le chef d’étatmajor, Yehoshafat Harkabi, le chef du renseignement militaire, et, bien sûr, Shimon Peres, sont présents… A l’abri des regards, les uns et les autres discutent des modalités d’une future coopération nucléaire. Nouvelle pierre à l’édifice : le 22 octobre 1956, dans une villa discrète de Sèvres (Hauts-de- Seine), le président du Conseil Guy Mollet et Maurice Bourgès-Maunoury donnent leur accord aux Israéliens pour la construction d’un complexe nucléaire à Dimona. Le protocole est si secret qu’il ne donne lieu à aucun compte rendu écrit, ni à fortiori à aucune à communication parlementaire…

En coopérant avec Israël, la France espère obtenir des informations sur le FLN en Algérie................

 

Drianke

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Salam, ah oui tiens donc et pourquoi que l'Algérie et pas le Maroc, la Tunisie ?? :intello: ça en dit très très long quand même..
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Et pour cause : la situation est tendue. Quelques semaines avant la rencontre de Sèvres, le Front de libération nationale (FLN) algérien a perpétré sa première vague d’attentats à la bombe dans des cafés du centre-ville d’Alger. La guerre d’Algérie, qui a éclaté en novembre 1954, n’est évidemment pas étrangère à la décision des gouvernants français, exaspérés par le raïs Nasser qui entraîne les insurgés algériens et finance aussi une radio de propagande antifrançaise. Traumatisés par la cuisante défaite subie à Diên Biên Phu cette année là, les dirigeants français sont bien décidés à ne pas lâcher prise. Le général Corniglion-Molinier résume un sentiment largement partagé. «Tant qu’Israël tient en respect nos agresseurs éventuels, l’Afrique du Nord ne peut devenir une seconde Indochine» (cité par Pierre Péan dans Les Deux Bombes, éd. Fayard, 1982). Paris ne ménage donc pas son soutien à Tel-Aviv et vend, à partir de 1954, des chars AMX, des chasseurs Ouragan et Mystère IV ou encore des lance roquettes. En échange de quoi, Israël mobilise ses services secrets qui fournissent de précieux renseignements à l’armée française, au premier rang desquels le décryptage des messages codés échangés entre l’état major égyptien et les chefs du FLN installés à Rome. «Le véritable ciment du rapprochement entre la France et Israël, c’est la guerre d’Algérie», insiste ainsi Georgette Elgey dans son Histoire de la IVe République, 1954-1959 (éd. Fayard, 1997).
 
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