1ère PARTIE : L'ALLER. Il y a quelques années, je navais pas besoin de payer un passeur pour aller humer lair chérifien. Les temps ayant changé, je ne dois plus jouer au héros. Il paraît que les frontières algéro-marocaines sont mieux surveillées en raison de la présence du monarque sur la plage de Saïdia à la fin du mois de juillet dernier. Un passeur se propose de me les faire traverser clandestinement pour 2000 dinars.
Pour passer de l'autre côté de la frontière, je me suis déplacé à Boukanoun, le village algérien qui face à Ahfir, la bourgade marocaine. Mon ange gardien, qui dit sappeler Omar, attablé sur la terrasse du café Es-Sabah, exige 2000 DA comme droit de passage. Payable à l'avance. Rendez-vous est pris pour le lendemain à 6 h du matin Samedi, je suis au rendez-vous à lheure convenue. Notre convoi sébranle cahincaha. Nous amorçons la traversée à pas feutrés. Mes appréhensions sont telles que je sens mes pieds collés avec de la glu sur le sol. Nous sommes six à faire la traversée, sept avec le passeur. Dociles, mes cinq compagnons dont deux subsahariens doivent se courber parce que leur taille pose problème. Leur grande taille peut-être repérée par les vigiles de part et d'autre de la frontière. Le nez collé à leur dos, je suis à la queue de la file. Ma position ne répond à aucune stratégie, si ce nest de prendre la poudre descampette en cas de complication.
«Alors camarades, vous allez en Espagne?»
Notre passeur se permet une « chemma » ( tabac à chiquer) avant de nous accorder un moment de répit. En pareilles circonstances, on est habité par des sentiments ambivalents. Et moi, entre le bonheur de réussir le passage et la peur déchouer, je me fie fatalement au destin. «Alors camarades, vous allez en Espagne?» demandes-je aux deux Subsahariens. Interloqués, les deux blêmissent. Passablement énervé, Omar intervient: «Laisse-les tranquilles...Je tai pourtant prévenu de ne pas poser trop de questions!» Notre ange gardien nous explique alors que nous devons attendre la relève des soldats. Mauvais calcul ou mauvais sort? Toujours est-il quà ce moment précis, une voix enrouée surgit des broussailles : «Halte!» Mes tripes se sont mises à gargouiller à la vue du tabor, le bidasse marocain. J'ai réalisé alors que nous sommes sous le ciel et sur les terres du «Commandeur des croyants». Déjà au Maroc !
«Sidi, cest le premier convoi»
«Le tourisme va bien? Allez, vos papiers! Nous sommes le serviteur de Sa Majesté», ordonne le tabor en braquant sa vieille mitraillette sur nous. Un des passagers se met à trembloter. Nullement impressionné, en guise de documents de voyage, notre passeur refile au soldat des billets de banque pliés, en accompagnant son geste dun chuchotement à loreille de celui qui nous nous menace toujours avec son arme. «Sidi, cest le premier convoi», explique doctement Omar le passeur. « Yen a pas assez», entonne le gardien du temple en tenue kaki. Je ne sais pas quelle mouche ma piqué lorsqu'avec un sourire qui se veut rassurant, je réponds: «En effet, nous ne sommes que six, si jexclus le passeur.»
Pour passer de l'autre côté de la frontière, je me suis déplacé à Boukanoun, le village algérien qui face à Ahfir, la bourgade marocaine. Mon ange gardien, qui dit sappeler Omar, attablé sur la terrasse du café Es-Sabah, exige 2000 DA comme droit de passage. Payable à l'avance. Rendez-vous est pris pour le lendemain à 6 h du matin Samedi, je suis au rendez-vous à lheure convenue. Notre convoi sébranle cahincaha. Nous amorçons la traversée à pas feutrés. Mes appréhensions sont telles que je sens mes pieds collés avec de la glu sur le sol. Nous sommes six à faire la traversée, sept avec le passeur. Dociles, mes cinq compagnons dont deux subsahariens doivent se courber parce que leur taille pose problème. Leur grande taille peut-être repérée par les vigiles de part et d'autre de la frontière. Le nez collé à leur dos, je suis à la queue de la file. Ma position ne répond à aucune stratégie, si ce nest de prendre la poudre descampette en cas de complication.
«Alors camarades, vous allez en Espagne?»
Notre passeur se permet une « chemma » ( tabac à chiquer) avant de nous accorder un moment de répit. En pareilles circonstances, on est habité par des sentiments ambivalents. Et moi, entre le bonheur de réussir le passage et la peur déchouer, je me fie fatalement au destin. «Alors camarades, vous allez en Espagne?» demandes-je aux deux Subsahariens. Interloqués, les deux blêmissent. Passablement énervé, Omar intervient: «Laisse-les tranquilles...Je tai pourtant prévenu de ne pas poser trop de questions!» Notre ange gardien nous explique alors que nous devons attendre la relève des soldats. Mauvais calcul ou mauvais sort? Toujours est-il quà ce moment précis, une voix enrouée surgit des broussailles : «Halte!» Mes tripes se sont mises à gargouiller à la vue du tabor, le bidasse marocain. J'ai réalisé alors que nous sommes sous le ciel et sur les terres du «Commandeur des croyants». Déjà au Maroc !
«Sidi, cest le premier convoi»
«Le tourisme va bien? Allez, vos papiers! Nous sommes le serviteur de Sa Majesté», ordonne le tabor en braquant sa vieille mitraillette sur nous. Un des passagers se met à trembloter. Nullement impressionné, en guise de documents de voyage, notre passeur refile au soldat des billets de banque pliés, en accompagnant son geste dun chuchotement à loreille de celui qui nous nous menace toujours avec son arme. «Sidi, cest le premier convoi», explique doctement Omar le passeur. « Yen a pas assez», entonne le gardien du temple en tenue kaki. Je ne sais pas quelle mouche ma piqué lorsqu'avec un sourire qui se veut rassurant, je réponds: «En effet, nous ne sommes que six, si jexclus le passeur.»