Géopolitique du Sahara, crise généralisée du capitalisme mondialisé, crises identitai

Drianke

اللهم إفتح لنا أبواب الخير وأرزقنا من حيت لا نحتسب
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L’offensive foudroyante du Mlna au Nord du Mali saluée par le tonitruant Ministre français des affaires étrangères de Sarkozy et la proclamation de l’indépendance de l’Azawad sur le sol français ouvrirent brutalement les yeux à beaucoup de Maliennes et de Maliens sur les complicités françaises récurrentes à la crise que traversent les régions sahariennes en Afrique. Juppé n’en était pas à son premier essai.


Les tentatives de dépeçage des pays des Grands lacs et le génocide rwandais ne sont qu’une des nombreuses illustrations des coups tordus de la France durant plus d’un siècle de domination qu’elle continue à exercer en Afrique. La crise actuelle au Mali ne s’inscrit-elle pas dans la même logique ?

L’historiographie coloniale française a toujours présenté les espaces conquis comme des territoires où des populations ‘barbares’ se livraient à des guerres tribales incessantes. Ils auraient été pacifiés par la colonisation française présentée jusqu’à une date récente comme une œuvre de civilisation. On passe volontiers sous silence la déstructuration brutale de ces sociétés, la perte de leur équilibre interne, le ferment de la division semé par les nouveaux maîtres consacrant ainsi le fameux principe du diviser pour régner.

Dans l’imaginaire collectif ainsi créé, les touaregs ont souvent été présenté comme un peuple de guerriers détestant le travail manuel et vivant de razzias, ce qui leur permettait de vivre des bien produits par les populations avoisinantes. Ainsi sont sommairement expliquées les rebellions successives auxquelles ils se sont livrés.

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Drianke

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On se rappelle aussi toutes les constructions idylliques sur les ‘hommes bleus du désert’ et les dénonciations vigoureuses et répétées du prétendu génocide dont ils étaient l’objet de la part des Etats africains de la région.

Bien sûr, de nombreux actes condamnables ont été posés dans la gestion de ces régions par les Etats africains nouvellement indépendants. Mais les touaregs n’en furent pas les seules victimes. Les populations du Sud, de l’Est comme de l’Ouest et les autres populations du Nord, toutes ethnies confondues, furent aussi des sacrifiées de la mal gouvernance étatique des décennies durant. Certaines régions de l’Ouest du Mali sont aujourd’hui plus mal loties à tous points de vue que celles du Nord sans compter les sommes colossales destinées au Nord détournées par une grande part, par les mêmes ressortissants du Nord, touaregs pour la plupart et plus précisément par certaines personnes qui ont eu à porter auparavant des armes contre leur pays. Les conflits armés successifs dans la région ont fait la fortune de bien de petits seigneurs de guerre, le fusil étant devenu le gagne pain le plus sûr dans ces contrées traversées par les différentes crises mondiales et les convoitises géopolitiques et économiques orchestrées depuis les pays du Nord. Le projet français de création de l’Organisation Commune des Régions Sahariennes (OCRS) bien avant les indépendances en est un témoignage éloquent.

Par contre l’histoire du Mali a vu dans les mêmes espaces et au delà se croiser, se chevaucher et s’interpénétrer des royaumes et empires qui ont brassé entre elles des entités multi ethniques. Peut-on parler de nos jours d’identité songhaï, d’identité peuhle, d’identité bamanan, d’identité Sarakollé, d’identité sénoufo, bozo, dogon, etc ? Existe-t-il aujourd’hui un seul endroit déterminé où ne vivrait qu’une seule ethnie ? Dans le moindre village ont toujours existé plusieurs ethnies tout au long de l’histoire. Les grands empires qui ont couvert l’espace géographique malien et au-delà, ont permis bien avant la colonisation, le brassage multi ethnique des populations.

L’espace sahélo-saharien en serait-il l’exception?

Si dans certains pays voisins comme la Côte d’Ivoire et de manière générale dans certains pays de l’Afrique centrale, les conflits ethniques sont restés récurrents, les crises identitaires qui ont conduit à des guerres civiles parfois violentes, les brassages opérés par l’histoire ont épargné pareilles mésaventures au Mali.

Mais à y regarder de près, on se rend compte que ces crises identitaires ont été dans les faits, largement suscitées par les puissances coloniales et entretenues par les politiciens locaux qui ont pris les commandes des Etats lors des indépendances. On ne saurait donc dire qu’à l’origine, les crises identitaires sont intra ethniques comme si elles étaient innées, consubstantielles même à certaines ethnies, les touaregs à l’occasion. En réalité elles sont pour la plupart introduites à dessein, cultivées et entretenues à l’occasion pour servir de visées politiques. Tel semble être le constat fondamental.

Par ailleurs, peut-on parler aujourd’hui d’identité ethnique propre dans un monde de plus en plus mondialisé et soumis partout à la dictature du capital et du marché ? Que reste-t-il des cultures autochtones, des identités locales et nationales ?

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Drianke

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Que signifie aujourd’hui être bamanan, peulh, sonraï, dogon ou touareg ? Cela leur confère-t-il une identité singulière ?
L’identité propre dans chaque cas n’est-elle construite de couches multiples et enchevêtrées faites d’emprunts, de mélanges, de synthèses entre différentes cultures endogènes et parfois exogènes, de rencontres avec d’autres valeurs venues parfois hors d’Afrique, introduites parfois de force par la colonisation et les religions venues d’ailleurs comme l’islam et le christianisme ? Que reste-t-il alors de la notion même d’identité ? Se pose-t-elle aujourd’hui en termes d’ethnie ou de nation ? Quel serait alors le contenu de cette identité nationale ? Quel rôle peut-elle jouer aujourd’hui dans la reconstruction de l’Etat au Mali ? S’agit-il d’une crise d’identité nationale ou simplement d’une crise de l’Etat au Mali?

Auparavant, revenons un moment à la question touarègue.

Il y a en réalité une sorte de théâtralisation mythique de la question touarègue. Elle fut essentiellement opérée par certains ethnologues européens qui ont souvent présenté le Sahara comme un espace réservé exclusivement à des populations nomades alors que l’essentiel de la vie dans ces grands espaces désertiques s’est toujours développé autour d’oasis où vécurent des siècles durant des populations le plus souvent sédentaires. Elles ont été toujours plus nombreuses que les populations nomades parcourant les espaces de transhumance et les routes commerciales. Et parmi les populations nomades, la composante touarègue a elle-même toujours été minoritaire. Le rapport du Grip (Groupe de Recherche et d’Information sur la Paix) du 22 mai 2012 estime que sur les 1,5 millions de touarègues, seulement 550.000 vivraient au Mali et 850.000 au Niger. Ils constituent à peine 10% de la population totale partageant le même espace et n’ont jamais exercé un pouvoir politique quelconque au nom d’un Etat spécifique tout au long de l’histoire. Ils ont su d’ailleurs au fil du temps et pour la plupart d’entre eux, vivre en bonne intelligence avec les autres populations dans les différents pays de l’espace sahélo-saharien malgré les quelques rebellions successives qui furent souvent suscitées par des mains extérieures profitant des erreurs administratives des nouveaux Etats indépendants.

L’étude de André Bourgeot, anthropologue et chercheur au CNRS français publiée en 2000, «Sahara : espace géostratégique et enjeux politiques (Niger)», donne un aperçu assez complet de la question.

La suite dans le lien pour les courageux... http://www.maliweb.net/news/contributions/2012/06/25/article,75273.html
 
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