Histoire : pourquoi aucun sultan marocain n'a traversé la mer avant 1926?

Kayne

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Article Huffington Post du 29 Janv 2017 : http://www.huffpostmaghreb.com/2017/01/26/sultan-maroc-1926_n_14417544.html

HISTOIRE - De l'ère des Almohades à 1926, aucun sultan marocain n'a traversé la mer, ni ne s'est rendu à l'étranger. La raison tient en un mot: Baraka.

Le sultan, considéré comme une source de baraka pour le pays, ne devait ni voyager par la mer ni sortir du pays, comme le rapporte l'anthropologue Hassan Rachik dans "Légitimation et sacralité royale". Et de citer le cas du sultan Moulay Abdelaziz, qui voulait aller à Paris, mais ne pouvait pas.

La baraka du sultan

La baraka du sultan était entourée d'un ensemble de rituels --et de croyances. L'anthropologue Edward Westermarck (1862-1939) rapportait ainsi que la baraka du sultan "lui est conférée par quarante saints qui passent chaque matin au dessus de sa tête. Je me suis laissé dire que Moulay Abdelaziz avait perdu son trône parce que l’aide sainte lui avait été retirée.

C’est de la baraka du sultan que dépend le bonheur du pays tout entier. Quand elle est forte et sans souillure, les récoltes sont abondantes, les femmes mettent au monde des enfants bien conformés, le pays prospère à tous égards. Pendant l’été de l’année 1908, où la pêche des sardines fut exceptionnellement bonne, les indigènes de Tanger attribuèrent cette circonstance à l’avènement de Moulay Hafid; en revanche sous le règne de son prédécesseur, c’est à la détérioration ou la perte de la baraka du sultan que furent imputés les troubles et les soulèvements, la sécheresse et la famine. Le fait est que tous les fruits tombaient des arbres avant d’être parvenus à maturité. Bien mieux: même dans les parties du pays qui n’avaient jamais été soumises au régime politique du sultan, les habitants croyaient que leur bien-être, et spécialement leurs moissons, dépendaient de sa baraka."

Un tabou transgressé

Le premier sultan à transgresser ce tabou ancien est Moulay Youssef, qui s'est rendu à Paris en 1926. "Son fils Mohammed V, qui lui succéda en 1927, partira en France, vers la moitié de l’été, chaque année", écrit Hassan Rachik.

Durant sa visite en France, le sultan Moulay Youssef a inauguré la grande mosquée de Paris, en présence du président Gaston Doumergue. Un jour auparavant, un défilé militaire avait mis les troupes coloniales à l’honneur, en mémoire des soldats marocains morts pour la France pendant la première guerre mondiale.
 
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