Ile-de-france : les transports en mal de financement

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LE MONDE | 09.05.2014 à 11h01 • Mis à jour le 09.05.2014 à 11h56 | Par Béatrice Jérôme
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RER B à Gare du Nord, Paris. | AFP/THOMAS SAMSON

Tramways inaugurés, lignes de métro prolongées, RER modernisés, équipements renouvelés… Face à l'urgence de travaux d'investissement massifs dans les transports en commun en Ile-de-France, Jean-Marc Ayrault s'était engagé, en juillet 2013, à consacrer 6 milliards d'euros de crédits publics d'ici à 2017. L'objectif : améliorer les conditions de circulation des 8,5 millions de voyageurs qui empruntent chaque jour les transports en commun en région parisienne – de plus en plus souvent dans des conditions difficiles.

Mais les mesures prises, depuis, pour réduire le déficit du budget de l'Etat compromettent la réalisation de ce vaste plan. « Puisque l'Etat n'honore pas ses financements et prévoit de baisser de manière drastique ses dotations à la région, on va devoir décaler ou annuler certains chantiers », confie au Monde Pierre Serne, vice-président (EELV) chargé des transports à la région.

LA COLLECTIVITÉ « EN ATTENTE » DE NOUVELLES RECETTES

Signé à l'été 2013, entre M. Ayrault et Jean-Paul Huchon, le président (PS) de la région, le « protocole » stipule que 1,2 milliard d'euros par an doivent être consacrés aux transports entre 2013 et 2017. Soit des moyens financiers trois fois plus importants que pour la période précédente. Mais pour l'instant, ni les collectivités locales ni l'Etat ne sont en mesure de tenir cet engagement.

La région Ile-de-France est censée participer à hauteur de 500 millions d'euros par an. Or la collectivité se dit « en attente » de nouvelles recettes fiscales pour abonder effectivement cette enveloppe. Pour la première fois dans son histoire, la région a voté en 2014 un projet rédigé en partie au conditionnel. Pour plusieurs programmes (lignes de métro, tram-train, RER), elle indique le montant des crédits qu'elle ne pourra consentir faute d'« obtention de ressources nouvelles de la part de l'Etat ». Au total, il lui manque 150 millions d'euros par an. Les projets de nouvelles taxes régionales relayés par des parlementaires socialistes lors des dernières lois de finances se sont heurtées jusqu'ici au veto du ministère de l'économie.

L'équation financière qui doit permettre à la région de financer les transports a été rendue plus difficile par l'augmentation de la TVA à 10 % au 1er janvier 2014. Cette hausse, partiellement compensée par une augmentation des tarifs, se traduit par une ponction de 100 millions d'euros par an sur le budget régional. En novembre 2013, le gouvernement Ayrault s'était toutefois dit prêt revenir au taux initial de 7 % et à terme à 5,5 % de TVA sur les transports urbains. A condition que la Commission européenne reconnaisse qu'il s'agit de « biens de première nécessité ».

Dans ce cas, si la France diminue la TVA pour ce seul secteur, elle ne pourrait être accusée par Bruxelles de distorsion de concurrence par des opérateurs privés. M. Huchon est allé à Bruxelles, jeudi 8 mai, plaider cette cause auprès d'Algirdas Semeta, le commissaire européen chargé de la fiscalité. Mais il a peu de chance d'obtenir un feu vert de la Commission.

« LES CAISSES SONT VIDES »

Depuis avril, l'horizon financier de la région est encore assombri par l'annonce de la baisse drastique des dotations de l'Etat aux collectivités dans le cadre du « programme de stabilité ». « La diminution des dotations de l'Etat de 11 milliards d'euros aux collectivités d'ici trois ans se traduira par une baisse au minimum de 500 millions d'euros pour l'Ile-de-France », calcule M. Serne, vice-président chargé des transports dans l'exécutif de M. Huchon.

Du côté de l'Etat, le compte n'y est pas non plus. Le « protocole » signé par M. Ayrault prévoit une contribution à hauteur de 200 millions par an, une promesse rendue impossible par la suspension de l'écotaxe, décidée en octobre 2013 à la suite du mouvement de contestation. Or cette nouvelle fiscalité devait contribuer à financer les futurs contrats de plan Etat-région sur la période 2014-2020, à travers les crédits de l'Agence de financement des infrastructures de transports de France (AFITF). « Les caisses de l'AFITF sont vides », reconnaît-on à Matignon. « Les projets de transports prendront du retard si le contrat de plan ne traduit pas les promesses du plan Ayrault », prévient l'entourage de M. Huchon.

Le gouvernement va prendre, en juin, une ordonnance qui permettra de prélever 2 milliards d'euros, d'ici à 2017, sur le budget de la Société du Grand Paris, chargée de réaliser le futur métro circulaire autour de la capitale. Cette somme, prévue depuis le début dans le programme de 6 milliards d'euros d'investissement, servira à financer le prolongement du RER E à l'ouest, des lignes de métro 11 et 14 ou bien encore l'amélioration des RER C ou D. Cette fois-ci, c'est le financement des investissements pour le métro du Grand Paris qui pourrait, à long terme, se trouve menacé.Lire aussi : Grand Paris : le financement du futur métro menacé

Béatrice Jérôme
Journaliste au Monde

http://www.lemonde.fr/politique/art...rts-en-mal-de-financement_4414064_823448.html
 
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