Dans l’opposition, les Frères musulmans s’estiment pourchassés

Slawa

De retour du Maroc.
Dans l’opposition, les Frères musulmans s’estiment pourchassés

La confrérie, qui avait remporté 20 % des voix aux dernières législatives, est sous la pression du pouvoir

Les Frères musulmans vont sans doute voir leur visibilité reculer au Parlement égyptien. Cette confrérie, interdite mais tolérée, avait remporté 88 sièges sur 444, avec 20 % des voix, lors des élections législatives de 2005. Un résultat qui avait étonné ses propres dirigeants et prouvé sa popularité.

Grâce à cette percée historique, le mouvement était devenu la principale force d’opposition en Égypte. Mais, de toute évidence, les 130 candidats chargés de défendre ses positions n’enregistreront pas un tel score, dimanche. L’État se méfie et a lancé une véritable chasse aux sorcières. « Depuis l’annonce de notre participation aux législatives, plus de 1 200 Frères ont été arrêtés ou interpellés, 500 sont encore détenus », déclarait récemment Mohamed Morsi, directeur de la campagne électorale.

Depuis deux mois, les forces de l’ordre ont procédé à des arrestations sous de multiples raisons : appartenance à un mouvement interdit, tentative de troubler l’ordre social, injures contre l’État. Le 18 novembre encore, 250 activistes ont été arrêtés à Alexandrie et dans diverses villes du delta du Nil.
 

Slawa

De retour du Maroc.
Tout parti politique se référant à la religion étant interdit en Égypte, les Frères mènent campagne sous l’étiquette de « candidats indépendants ». Quant à leur célèbre slogan : « L’islam, c’est la solution », le gouvernement vient d’en interdire l’utilisation. Mohamed Salmawy, journaliste et écrivain de renom, ironise : « De quel islam s’agit-il ? Est-ce l’islam des talibans qui interdit l’enseignement aux filles, qui proscrit la musique et détruit les monuments des anciennes civilisations ? Ou bien s’agit-il plutôt de l’islam des lumières ? » Selon des responsables du Parti national démocrate (PND) au pouvoir, « le programme de la confrérie a dévoilé un refus de la nature civile de l’État égyptien et une volonté d’instaurer un État purement religieux ».
«Arrestations abusives»


« Par des arrestations abusives, et par l’emploi de la force, le gouvernement cherche à nous décourager. Mais il perd son temps, nous maintenons nos 130 candidats », rétorque Seif El Islam Hassan El Banna, fils du fondateur de la confrérie. Ce septuagénaire, qui a souvent occupé des fonctions importantes à l’ordre des avocats, poursuit : « Rien ne nous découragera. Nous avons renoncé à la violence depuis les années 1970, nous respectons la démocratie et la liberté de culte, et nous tenons à jouer un rôle politique en Égypte. Nous avons notre mot à dire dans la gestion du pays. La répression n’a jamais été aussi violente contre les Frères musulmans, elle prouve que le gouvernement nous craint. »

Membre de la choura (conseil consultatif) des Frères musulmans, l’avocat affirme que la confrérie respecte la liberté de culte. Ce principe s’applique-t-il aux coptes, ces chrétiens d’Égypte dont le nombre s’élèverait à près de huit millions de fidèles ? « Sans aucun doute, les coptes sont nos frères, répond-il. J’avais choisi un instituteur copte pour mes fils, et quand le gouvernement m’a arrêté, l’un de mes avocats était copte. Je ne fais aucune discrimination, et je tiens à ajouter que la tragédie irakienne (NDLR : contre les chrétiens d’Irak) m’a révolté. »

Pour certains spécialistes, un revers électoral ne serait toutefois pas insurmontable pour les Frères, capables de se replier sur leur domaine de prédilection : l'action sociale et religieuse auprès de la population. « Cela ne va pas diminuer l'influence des Frères dans la rue, parce qu'ils ne comptent pas juste sur leur présence au Parlement, mais sur les services sociaux et les mosquées », assure le politologue égyptien Moustapha Kamal.



Dimanche, l’État a promis une transparence totale. Le haut comité électoral sera secondé par 2 000 juges et des centaines d’observateurs délégués par les ONG.
 
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