Le Maroc complique les adoptions par les étrangers

nwidiya

Moulate Chagma Lmech9o9a 🤣
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Depuis plusieurs mois, des couples, espagnols en majorité, mais aussi français, américains ou belges, ainsi que des mères célibataires se relaient au Maroc pour tenter de faire aboutir leur kafala, cette procédure spécifique au droit musulman qui interdit l'adoption plénière mais autorise le placement d'un enfant sous la tutelle d'une famille. Tous sont convertis – c'est la loi : la kafala n'est possible que pour des musulmans. Tous se sont vu confier par jugement la garde d'un petit orphelin. Mais une récente circulaire du ministère de la justice, diffusée dès le 19 septembre 2012, qui exclut les non-résidents au Maroc, a brusquement interrompu plus de 80 dossiers en cours.
"Tout est bloqué, partout, se désole Fatima Zohra Alami, porte-parole du collectif Kafala qui s'est créé avec cinq associations d'aide à l'enfance. Si les juges le voulaient, cette circulaire, qui n'a pas force de loi, pourrait ne pas être appliquée, mais elle l'est, totalement. Sur 2 000 kafala par an au Maroc, la moitié concerne des étrangers non résidents, donc 50 % des "adoptions" sont arrêtées."

Le romancier français Eric Laurrent fait sans cesse l'aller-retour entre Paris et Rabat pour voir le petit Ziad, tandis que sa femme, Yassaman, psychologue à l'hôpital de Versailles, a démissionné pour rester sur place : "Ziad nous a été confié à l'orphelinat le 27 avril 2012 après que le juge des tutelles a estimé que nous remplissions toutes les conditions, ce qui a été confirmé par un deuxième jugement en octobre. Puis on a senti que ça se grippait et maintenant nous sommes devant un blocage absolu."
 

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INFLUER SUR LES QUESTIONS DE SOCIÉTÉ

Pour beaucoup, cette situation est liée à l'arrivée au pouvoir du gouvernement dirigé par le parti islamiste Justice et développement (PJD) et interprétée comme l'un des tout premiers signes d'influer une politique conservatrice sur les questions de société. Appliquée peu à peu par les procureurs, la circulaire du ministre de la justice, Mustapha Ramid, met en avant le contrôle de "l'aptitude morale, sociale, et la capacité des kafil [les adoptants] à élever un enfant abandonné selon les préceptes de l'islam" qui, selon le texte, "ne pose pas de problème (...) lorsqu'il s'agit de personnes résidant habituellement au Maroc".

"C'est l'argument principal et une position idéologique", relève Driss Al-Yazami, président du Conseil national des droits de l'homme. Ce dernier projette l'organisation d'une conférence pour prendre position contre cette disposition. "Soit on change la loi, soit on trouve une solution", poursuit-il.

Jusqu'ici, selon la loi relative à la kafala promulguée en 2002, le "contrôle" de l'éducation des enfants, peu appliqué dans les faits, était du ressort des consulats marocains. L'annulation d'une kafala, envisagée par la loi au cas où les parents adoptifs ne rempliraient pas leurs obligations, "pourra être facilement exécutée" si la famille réside au Maroc, précise la circulaire Ramid.

"C'EST UN ENFER"

"C'est à l'Etat d'assurer ce suivi, pas à l'enfant d'en supporter les conséquences", s'insurge Fatima Zohra Alami. Les défenseurs de la circulaire opposent pour leur part les abus et les cas de corruption parfois constatés dans les dossiers de kafala, mais, surtout, la conformité de l'éducation reçue avec les préceptes de l'islam. Une fois parties, arguent-ils, les familles changent les noms de l'enfant.

Les couples mixtes dans lequel le père est d'origine marocaine ont vu leur dossier aboutir, mais pas les autres, qui se désespèrent chaque jour un peu plus. Mariée à un Français converti, Meriem, une femme d'origine marocaine qui souhaite conserver l'anonymat, est aujourd'hui en dépression. Susan Ramos, mère célibataire espagnole, psychothérapeute à Madrid, se rend quasiment toutes les semaines voir le petit garçon qui lui a été confié en janvier 2012, aujourd'hui âgé de 16 mois. "C'est un enfer", dit-elle. "Plus le temps passe, plus les enfants souffrent de nos absences répétées, plus ils grandissent, moins ils comprennent que nous les choyions quelques jours puis que nous disparaissions", soupire Eric Laurrent.

En décembre 2012, 39 familles ont écrit une supplique au roi, sans réponse à ce jour. Selon les associations d'aide à l'enfance, 24 abandons d'enfants sont enregistrés chaque jour au Maroc

http://www.lemonde.fr/afrique/artic...adoptions-par-des-etrangers_1853801_3212.html
 
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