Maroc: Entrez dans le film !Ouarzazate, la nouvelle Mecque du cinéma mondial

Etre le "Hollywood de l'Afrique", c'est le scénario que se propose de réaliser Ouarzazate, la ville du Grand Sud marocain. Zoom sur un cinéma en plein air qui a fait la réputation des plus grands.

14.09.2009 | Annabelle Gugnon | Ulysse



Connaissez-vous le pays qui a vu Lawrence d'Arabie côtoyer Alexandre le Grand, qui a accueilli une flopée de gladiateurs et quarante voleurs ? Le pays où Nastassja Kinski vécut dans un harem et où John Malkovich fut emporté dans un amour impossible ? C'est le pays d'Astérix et de Cléopâtre et celui de Jérusalem au temps des croisades. C'est un pays de cinéma dont le centre est la ville marocaine d'Ouarzazate.

Fondée en 1928 par les Français, la ville se situe sur le territoire "aux mille casbahs" où, pendant des millénaires, des caravanes composées de plusieurs centaines de dromadaires, faisaient étape entre les mines de sel de Taodeni au Mali et les oasis où vendre l'or, les plumes d'autruche, l'ivoire, tous ces biens amenés de loin et dédiés aux puissants souverains.

Située à 1 136 mètres d'altitude, Ouarzazate est le cœur de la province du même nom, point de départ de tous les scénarios possibles, depuis les contreforts sud du Haut Atlas jusqu'aux dunes ocre du Sahara. En 1989, Bernardo Bertolucci, tournant dans cette contrée, fit ce poignant aveu : "Ce lieu est tellement beau qu'il vous procure une sensation de joie infinie, proche de l'extase. Mais je sais bien que je ne rendrai pas la moitié de cette beauté dans le film et c'est ce qui me torture. Pourtant, je regarde encore et c'est d'une telle beauté que l'extase l'emporte sur la souffrance." Bel hommage de celui qui a donné à ce paysage l'un de ses plus beaux films, Un thé au Sahara, tiré du roman de Paul Bowles, écrivain américain, qui résida à Tanger et fut surpris par Ouarzazate : "Le plus frappant, ici, c'est qu'il y ait des dunes de sable en face de la ville." De fait, la cité est aux portes du désert et, au sud, les dunes déforment l'horizon jusqu'à le redessiner.
 
Au nord-ouest, les crêtes du Haut Atlas découpent le point de vue et offrent un contrechamp aux vallées où les palmiers dattiers donnent aux oasis des airs ébouriffés. Plus loin, vers le nord-est, les gorges du Dadès sont un théâtre plus dramatique et accidenté. Tous ces atouts du paysage et l'étendue de l'espace font de la région d'Ouarzazate un studio de cinéma à ciel ouvert. D'autant plus que la lumière, clé de voûte du septième art, y règne en maîtresse absolue trois cents jours par an. C'est ainsi que les tournages se multiplient et que, depuis les premiers péplums des années 1960, la ville n'a cessé d'afficher l'ambition de devenir le "Hollywood de l'Afrique" avec, pour premier objectif, le tournage de trente-trois films en 2016 quand l'année 2005 en a compté onze.

C'est dans cet environnement qu'a été retracée la destinée de Lawrence d'Arabie, qui aida les Arabes à se libérer de la domination ottomane. "Le plus grand homme de son temps", selon Winston Churchill... David Lean, en 1962, a filmé cette vie hors du commun dans les tours de dentelle de la casbah d'Aït Benhaddou, dans le désert, aussi, où les ombres des dromadaires s'étirent alors qu'ils évoluent en une marche flegmatique. Le film, avec Peter O'Toole dans le rôle-titre, a remporté un immense succès et a été primé à de multiples reprises. D'ailleurs le site d'Aït Benhaddou est inscrit au Patrimoine de l'Unesco car les images de cinéma font partie de la transmission de la culture que les humains reçoivent en partage.

A moins de cinq kilomètres du centre-ville, les studios de l'Atlas Corporation forment une drôle de caverne aux trésors, où le temple tibétain du Kundun de Martin Scorsese côtoie les décors de The Kingdom of Heaven, de Ridley Scott, reconstitution étonnante de Jérusalem au temps des croisades. Viennent s'ajouter à ces décors de carton-pâte toutes sortes d'ambiances d'avant Jésus-Christ, de conquêtes romaines et d'histoires bibliques. Un musée du cinéma déploie d'ailleurs, sur deux hectares, des costumes et des décors pour un étonnant bond dans le temps. Bien sûr, il y a ces magnificences inattendues et hétéroclites mais il n'en reste pas moins que l'histoire la plus vivante est celle que chaque voyageur écrit en se promenant ici, en se laissant éblouir par le paysage, en composant son propre scénario entre les oueds, les palmeraies, les jardins, les dunes et avec les hommes qui vivent là depuis la nuit des temps.

Les films réalisés au Maroc
Ali Baba et les quarante voleurs, de Jacques Becker, avec Fernandel (1954)
Lawrence d'Arabie, de David Lean, avec Peter O'Toole (1962)

Harem, d'Arthur Joffé, avec Nastassja Kinski (1985)

Un thé au Sahara, de Bernardo Bertolucci, avec John Malkovich et Debra Winger (1990)

Kundun, de Martin Scorsese, avec Tenzin Thuthob Tsarong (1997)


Gladiator, de Ridley Scott, avec Russell Crowe (2000)

Astérix et Obélix : mission Cléopâtre, d'Alain Chabat, avec Gérard Depardieu (2002)

Alexandre le Grand, d'Oliver Stone, avec Colin Farrell et Angelina Jolie (2005)

The Kingdom of Heaven, de Ridley Scott, avec Jeremy Irons (2005)

Babel, de Alejandro Gonzalez Iñarritu, avec Brad Pitt et Cate Blanchett (2006)
 
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