« Mes parents sont des manipulateurs ! » pensez-vous ? Comment peut-on s’en rendre compte ? Les premières difficultés arrivent souvent à l’adolescence, lorsque l’enfant essaye de trouver son autonomie de pensée, sa trajectoire propre, son style à lui. Il s’oppose, ce qui est somme toute assez normal à cet âge, mais le conflit prend des allures particulières, dont l’enfant ne se rend probablement pas compte : le parent vit cette opposition comme une mise en cause personnelle, qui l’ébranle dans ses fondements fragiles, ce qui lui est insupportable. Au lieu de comprendre ce que l’adolescent vit, de lui servir d’éventuel « punching ball », de cadre solide et sécurisant, ou d’interlocuteur intéressé par cette évolution en essayant de la comprendre, il menace ou s’emporte, use du chantage ou fait le sourd, refuse la discussion, punit outrageusement, n’explique pas sa position sincèrement, frappe, pleure, bref adopte une attitude qui témoigne combien il est intimement ébranlé et combien cette mise en question lui est insupportable, voire impossible.
Intuitivement, l’enfant sent que la menace est lourde et que le risque de perdre l’amour du parent est latent. Il rentre temporairement dans les rangs, jusqu’à la prochaine tentative d’autonomie. Cette scène va se reproduire maintes fois, sous des dehors assez variés, parfois dans la violence, parfois avec une apparente gentillesse et l’enfant va tenter de se construire dans ce déséquilibre, faits de menaces sournoises, d’autoritarisme tordu, de silences culpabilisants, d’explications absentes, de réponses à contre-pied, de sanctions inattendues, d’accusations projectives sous-entendant que c’est à cause de l’enfant que le parent est dans cet état de douleur, alors que c’est justement l’inverse.