On en parle : écoles d'ingénieurs = droits d'inscription

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la rose et le réséda
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Passer les frais de scolarité des écoles d'ingénieurs à 2.570 euros, généraliser la ponction sur les fonds de roulement, fusionner... Dans la version encore provisoire et confidentielle de la revue des dépenses des écoles publiques d'ingénieurs qui circule en ce moment, Bercy émet 12 propositions "choc" pour améliorer l'efficience de ces établissements. Avis de tempête à venir.

La revue de dépenses des écoles publiques d'ingénieurs, réalisée en dix semaines au mois de mars 2015 par le Cgefi (Contrôle général économique et financier) pour le compte de Bercy, avait fait bondir de rage les établissements. Pas sûr que le rapport qui circule, dans une version encore provisoire et confidentielle, et les 12 propositions émises les ravissent davantage...

À travers un texte de 140 pages, les experts de Bercy livrent une étude comparative de 59 écoles publiques, sous tutelle de 5 ministères. 80 auditions de personnalités qualifiées (quasi exclusivement des parisiennes) ont permis à l'organisme de dresser le portrait d'un écosystème pris entre deux feux : l'existence sur la scène internationale et la place à occuper sur le territoire régional.

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Droits de scolarité : de 610 à 2.570 €

Proposition la plus brûlante : augmenter significativement les frais de scolarité. En ayant gelé le montant des droits d'inscription pour la rentrée 2015, Najat Vallaud-Belkacem et Thierry Mandon avaient cru se donner une année de répit. Mais des écoles commencent à s'engouffrer dans la brèche. Après l'augmentation significative des droits des écoles de l'Économie et de la Défense pour la rentrée 2014, le montant des droits de CentraleSupelec a soulevé un vent de contestation : en fixant à 2.570 € les droits, les ministères ont créé un précédent en permettant à une école sous tutelle de l'Enseignement supérieur de franchir la barre des 600 €.

Le Cgefi préconise de généraliser cette augmentation à toutes les écoles du ministère de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, ministère qui affiche désormais les droits de scolarité les plus bas, loin derrière les écoles de l'agriculture, à 1.500 € et l'Ensta Bretagne à 1.800 €. "Du point de vue des étudiants concernés, la hausse des tarifs sur trois ans correspond à un peu plus de deux mois de salaire de première embauche, justifie le rapport. Cette proposition pourrait être étagée sur trois ans à l'image de ce qui a été décidé pour CentraleSupelec, les écoles ayant déjà des tarifs supérieurs à 610 € pouvant rejoindre ce seuil la troisième année."

Les rapporteurs proposent que les recettes ainsi générées soit divisées entre les établissements, qui conserveraient 2/3 de l'enveloppe et l'État, qui prendrait le dernier tiers. Côté ministère, on préfère botter en touche.

Si la réaction avait été immédiate pour démentir une potentielle hausse des droits d’inscription dans les universités, Thierry Mandon ne souhaite cette fois-ci pas prendre position pour l’instant, a-t-il indiqué le 20 juillet 2015.



Les frais de scolarité dans les écoles d'ingénieurs aujourd'hui, selon le Cgefi (capture d'écran - rapport p.93)

Fonds de roulement : ponction pour tous !
Après la saison 2015 des fonds de roulement, en route pour la saison 2016 ? 23 écoles d'ingénieurs publiques, sous tutelle du ministère de l'Éducation nationale, ont vu cette année leur dotation baisser pour les inciter à puiser dans leur fonds de roulement. Le rapport propose de réaliser une étude de toutes les écoles hors tutelle de l'Enseignement supérieur dont le fonds de roulement est supérieur à 150 jours de réserve, "afin de déterminer la part éventuellement 'disponible' de ces fonds de roulement".

Selon la revue de dépenses, les écoles du MENESR sont celles qui ont le moins de réserve : 88 jours en 2014 (après ponction), contre 133 pour les écoles du ministère de l'Économie, et 140 pour les écoles de la Défense.

Dotations de l'État : tous logés à la même enseigne
Quelles subventions pour les écoles ? Le rapport analyse les subventions pour charges de service public, délivrées aux établissements entre 2012 et 2014.
Seules les écoles sous tutelle de l'Enseignement supérieur ont vu leur dotation progresser sur les deux années, à hauteur de 3,3%, quand les deux écoles du développement durable (École des ponts et ENTPE) ont vu les subsides de l'État diminuer de 5,5% et celles de l'agriculture de 3,3%. "Reflet de la priorité donnée par l'État à l'enseignement supérieur, cette différenciation n'a cependant pas de fondement rationnel pour des écoles dont la vocation en matière d'enseignement supérieur et de recherche est tout à fait similaire", constate le rapport.

Et de proposer de "rechercher une plus grande harmonisation des tendances du soutien public entre les écoles du programme 150 et les écoles des autres programmes, que ce soit en matière de dotations initiales ou de politique de gel et de levée du gel". Reste à savoir si l'harmonisation se fera vers le haut ou vers le bas...



La fusion CentraleSupelec constitue l'une des réponses les plus convaincantes aux nécessités d'adaptation du modèle français d'écoles d'ingénieurs.
(Cgefi)

Un personnel non enseignant pour sept élèves, c'est trop selon le Cgefi. En matière de ressources humaines, la revue de dépenses préconise d'examiner "les pistes d'une mutualisation accrue de certaines fonctions, notamment logistiques, soit par le biais des Comue, soit par des accords spécifiques entre écoles situées dans une même aire géographique, ainsi que le potentiel d'externalisation de certaines activités".

Fusion : les petits écoles ont-elles toujours leur place ?
Regroupement sur un seul site, recherche d'une taille critique, intégration à un regroupement d'établissements... "La fusion CentraleSupelec constitue manifestement l'une des réponses les plus convaincantes aux défis de la mondialisation et aux nécessités d'adaptation du modèle français d'écoles d'ingénieurs", note le rapport. Se penchant sur les projets de fusion et rapprochements en cours (Chimie Clermont et Ifma, par exemple), le rapport préconise aux écoles de petite taille qui ne seraient pas déjà impliquées dans un tel projet de s'y diriger, pour atteindre une taille critique acceptable.

Sur le 59 écoles étudiées, neuf disposent d'un budget annuel de moins de 15 millions d'euros. Pour certaines, le nombre d'élèves ne dépasse pas 400, à l'image de l'Engees à Strasbourg, quand l'Insa Lyon atteint à elle seule 6.100 étudiants. Pour ces écoles, "un problème de moyens existe à ce niveau, que ce soit en termes de qualité de l'environnement de la vie étudiante, d'excellence pédagogique de la formation ou de soutenabilité de la recherche".

Une inégalité sociale sanctionnée
Loin de ne s'intéresser qu'aux données strictement budgétaires, le Cgefi dresse également un état des lieux grinçant de l'ouverture sociale des écoles d'ingénieurs. Selon la revue de dépenses, "le taux moyen de boursiers (toutes bourses confondues) pour l'ensemble des écoles est, en 2014, de 22,8%". Des données "à interpréter avec précaution", glissent cependant les contrôleurs.

Pour eux, "le diagnostic d'une tension structurelle entre l'excellence académique la plus haute et l'ouverture sociale la plus large ne peut être évité". De même que la "portée limitée des dispositifs palliatifs de type 'cordée de la réussite'" : "aussi louables soient-ils, ces dispositifs ne sont pas à l'échelle des mécanismes de sélection négative à l'œuvre", estime le Cgefi.

La solution proposée ? L'augmentation significative des admissions sur titre et l'élargissement des classes préparatoires intégrées.
Céline Authemayou |

http://www.letudiant.fr/educpros/actualite/ecoles-d-ingenieurs-le-rapport-explosif-de-bercy.html

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