Un bon article sur le nucléaire marocain ...
En plein cœur de la forêt de la Maâmora, entre Rabat et Kénitra, se situe un lieu ultra sécurisé d’une surface de 25 ha entouré de grilles surmontées de barbelés. Une seule route permet de s’y rendre. Avant d’accéder au Centre National de l’Énergie des Sciences et Techniques Nucléaires, il faut d’abord passer les cavaliers de la gendarmerie royale qui gardent la base militaire juste à côté. Une fois arrivés sur place, les visiteurs doivent laisser une pièce d’identité à l’accueil et passer sous un portique. On leur remet alors un badge électronique. Bienvenue au CNESTEN, un laboratoire « recherche et développement » du nucléaire au Maroc. Si les mesures de sécurité sont draconiennes, c’est parce que le centre abrite le seul réacteur nucléaire du Royaume, d’une puissance de 2MW. En février 2009, le CNESTEN a obtenu l’autorisation du gouvernement pour l’exploiter. Son usage principal ? La production de radio-isotopes à usage médical comme l’Iode 131, utilisée essentiellement dans le dépistage du cancer de la thyroïde.
Pourquoi développer le nucléaire au Maroc ? Les experts chargés de la question avancent comme principal argument que l’énergie atomique pourrait réduire significativement la dépendance énergétique du Royaume face à l’étranger. Pourtant, à l’heure actuelle, « l’uranium utilisé par l’unique réacteur du Maroc est importé de Romans-sur-Isère en France », confie Nacir Bouzekri, chef de l’unité conduite du réacteur du CNESTEN. De plus, d’après un rapport de l’OCDE pour l’énergie nucléaire, malgré les prospections de 1946 à 1987, aucune réserve d’uranium exploitable économiquement n’a été trouvée. Cependant, le Maroc jouit d’une quantité considérable de phosphate à partir duquel l’uranium peut être produit. Des réserves marocaines, jusqu’à 6,9 millions de tonnes d’uranium pourraient être produites, estime l’AIEA.
Grâce aux phosphates, le Maroc se place en tête au niveau des ressources en uranium. L’électronucléaire devient donc indispensable pour le Royaume. Le gouvernement compte mettre en service sa première centrale nucléaire entre 2022 et 2024. Avant cela, les pouvoirs publics prévoient de lancer des appels d’offres et négocier des contrats entre 2011 et 2014. La phase de construction devrait ensuite s’étaler sur six ans. Le Royaume sera probablement obligé de se tourner vers des partenaires extérieurs pour financer cet investissement colossal, sachant que le coût d’une centrale de capacité moyenne varie entre 1,5 et 2 milliards d’euros. Pour préparer l’avènement du nucléaire, le Maroc doit d’abord former le personnel qui travaillera dans sa future centrale. Cette formation nécessite au moins 5 ans : elles sont dispensées au CNESTEN. Chaque année, le centre reçoit environ 150 étudiants et une trentaine de stagiaires. Le dernier en date vient de Madagascar. C’est l’Agence Internationale de l’Energie Atomique qui prend en charge les coûts de la formation. « Dans le secteur du développement nucléaire, le Maroc forme les spécialistes des pays africains francophones, tandis que l’Afrique du Sud, seul pays du continent à disposer d’une centrale nucléaire, se charge des Etats anglophones. La Syrie s’occupe traditionnellement des pays arabophones, mais en 2008, certains sont venus se former chez nous », explique Taïb Marfak, un ingénieur maintenant chargé de la communication au CNESTEN. Un autre volet inquiète les Marocains et la communauté internationale : celui de la sécurité. Afin de rassurer sur ses intentions, le Maroc a adhéré à l’AIEA en 1957, l’année de sa création, et en 1968, le Royaume s’est engagé en signant le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. Formés à l’étranger dans des pays où le nucléaire occupe déjà une place importante (France, Etats-Unis, Malaisie, Afrique du Sud), les doctorants, ingénieurs et techniciens du CNESTEN mettent à profit leur savoir et leur expérience au centre de recherche tout en travaillant en étroite collaboration avec l’AIEA.
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