Poupées pour les garcons et camions pour les filles pour lutter contre le sexisme

Mims

Date limite de consommation : 26/01/2033
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Les stéréotypes font de la résistance sur les places de jeu

Malgré une lutte de longue haleine pour l'égalité des sexes, certains stéréotypes sont indécrottables en Suisse: les parents persistent à offrir des barbies à leurs filles et des camions à leurs fils.

L'antidote aux clichés se cache peut-être dans les crèches.

A la veille de la 100e Journée internationale de la femme, l'univers de jeu des fillettes reste résolument rose bonbon, celui des garçons bleu vif. «On va même vers un renforcement de ces stéréotypes», a indiqué à l'ATS Barbara Ruf, du bureau de l'égalité entre la femme et l'homme du canton de Berne.

«Les gens pensent que l'égalité est une chose totalement acquise, même chez les enfants», explique la chercheuse indépendante Anne Dafflon Novelle, spécialiste des questions liées au genre. Les parents ne réalisent pas l'influence des joujoux fortement connotés sur le développement de leur progéniture.

Laisser le libre choix

Face à la demande, les magasins spécialisés continuent à proposer des produits spécialement conçus pour les filles ou les garçons, valorisant des sphères différentes: privée et domestique pour les premières, active pour les seconds. Les jouets dernier cri n'échappent pas à cette tendance, souligne Mme Dafflon Novelle.

Les kits permettant d'imiter les rockstars, apparus en même temps que les émissions de téléréalité musicales, sont par exemple déclinés en deux variantes: le micro pour les filles, la guitare électrique pour les garçons. «Là encore, c'est l'action et la puissance qui sont mises en avant auprès des garçons», poursuit la chercheuse.

Des stéréotypes qui préparent le terrain au sexisme, précise Mme Ruf. Cette dernière se défend néanmoins de vouloir priver les fillettes de leurs poupées: «L'idée est de laisser les enfants choisir le jeu qui leur convient, en fonction de leur personnalité» et non de leur sexe.

Trop peu de sensibilisation

Il est nécessaire de mieux sensibiliser l'entourage, et surtout les parents, à l'importance d'une diversification des jeux. Or trop peu de campagnes d'information abordant la question de l'égalité à l'âge enfant sont organisées, déplore Mme Dafflon Novelle.

Depuis cinq ans, le Bureau de l'égalité bernois met à disposition une brochure distillant des conseils en matière d'achats de jouets. De son côté, l'association lab-elle encourage la littérature enfantine sans clichés sexistes, notamment par l'attribution de prix annuels.

Ces démarches isolées ne font pas le poids face à la dure loi du marché. La division nette entre filles et garçons assure de juteux bénéfices aux magasins de jouets, selon la chercheuse. «Avant, les cadettes héritaient des vélos et autres Legos de leurs aînés; aujourd'hui, les parents achètent une deuxième fois la panoplie complète, en rose à fleurs».

Les grandes enseignes spécialisées proposent d'ailleurs une division de l'espace nette entre les sexes. Chez «King Jouet», de grands panneaux guident les bambins vers le «secteur fille» ou le «secteur garçon», confirme Feuad Kasri, adjoint au gérant de la succursale de Carouge (GE).

Les garçonnets aux fourneaux

Pour éviter que les enfants - et leurs parents - ne cèdent à ces codes dictés par le marketing, Barbara Ruf préconise le test préalable des jouets. «Les ludothèques ont une carte importante à jouer», note-t-elle. Chez «Ali Baba», de nombreuses petites filles viennent emprunter des voitures télécommandées, confirme la responsable de la ludothèque lausannoise Lara Ruberto.

Autre lieu privilégié de gommage des clichés sexistes: les crèches. La plupart de leurs employés ont été sensibilisés à la question des stéréotypes durant leur formation, souligne Mme Dafflon Novelle. Ils tentent par conséquent de véhiculer auprès des enfants un message égalitaire.

«Chez nous, beaucoup de petits garçons jouent à la poupée», estime Géraldine Marcoz, éducatrice à la «Crèche des Minoteries», à Genève. Au «Kindergarten Hardturm», à Zurich, ce sont les cuisinières miniatures qui ont une cote croissante auprès des pensionnaires masculins, selon la propriétaire Maria Fernandez.


«Comme les enfants passent de plus en plus de temps dans les crèches, la situation en matière d'égalité pourrait légèrement s'améliorer dans le futur», se réjouit Mme Ruf.

Source : 20 minutes
 
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