Menu
Accueil
Forums
Nouveaux messages
En ce moment
Nouveaux messages
Nouveaux messages de profil
Connexion
S'inscrire
Quoi de neuf
Nouveaux messages
Menu
Connexion
S'inscrire
Forums
Catégorie Principale
Général
René girard daesh et la violence mimétique
JavaScript est désactivé. Pour une meilleure expérience, veuillez activer JavaScript dans votre navigateur avant de continuer.
Vous utilisez un navigateur obsolète. Il se peut que ce site ou d'autres sites Web ne s'affichent pas correctement.
Vous devez le mettre à jour ou utiliser un
navigateur alternatif
.
Répondre à la discussion
Message
[QUOTE="droitreponse, post: 13932474, member: 377946"] Car le débat a été clos à peine entamé. Comme il ne fallait pas évoquer les « valeurs chrétiennes » de l’Europe, on préféra gommer, il y a quelques années, toute référence au religieux, de peur qu’il ne revienne. La Constitution européenne partait d’un mauvais pas. Ce déni de la pensée religieuse (beaucoup plus que du « fait religieux », qu’on est bien forcé de reconnaître), n’était-il pas un déni de l’Europe elle-même ? On ne voulait pas voir, entre autres, la force de la diagonale paulinienne, le rapport dialectique qu’elle instaure entre toutes les identités. Or c’est ce dialogue qui a donné son élan à la civilisation européenne : le mouvement paulinien vers « tous » les peuples, n’avait de sens que s’il ramenait tous les peuples vers Israël et Israël vers tous les peuples. Les termes de cette dialectique ont bougé avec l’irruption d’autres partenaires, mais la défense de la civilisation européenne en devient plus cruciale, à l’heure où l’Europe politique est en panne. A chaque tradition de défendre ses positions, à condition qu’elles soient risquées sur la « table servie du dialogue ». Je voudrais saluer ici la mémoire d’Abdelwahab Meddeb, poète et penseur de la rupture abrahamique, avec qui j’eus cette longue, passionnante et difficile discussion, au soir d’une rencontre dans la ville de Fès, en 2009. Nous convenions tous deux que les trois monothéismes devaient dialoguer. Je lui rappelai aussi, puisque c’était le sens de mon intervention, que les premières pages de La Violence et le sacré affirment que la tradition musulmane témoigne d’une vraie intelligence du sacrifice, puisque, comme l’écrit René Girard, « c’est le bélier déjà sacrifié par Abel que Dieu envoie à Abraham pour qu’il le sacrifie à la place de son fils Isaac ». Le Coran rompt donc lui aussi sur ce point avec le religieux archaïque. On pourrait même dire qu’il pousse plus loin l’interprétation biblique, lorsqu’il ne mentionne pas un ordre de Dieu donné à Abraham, mais un rêve d’Abraham où ce dernier se voit lui-même tuer son fils (Sourate 37, 102). Il en va également ainsi pour l’histoire de Joseph, où le Coran prend à nouveau le parti des victimes. Le djihadisme trahit donc, en abusant de la rhétorique victimaire, ce qui constitue l’un des points fondamentaux de sa propre tradition. Comment passer de la violence du religieux au partage des traditions, du sacré au saint ? Comment inspirer une politique juste ? L’anthropologie girardienne peut aider à résoudre ces questions qui sont liées. Car la sortie du religieux sacrificiel ne pourra pas se contenter d’être une condamnation vertueuse de la violence qui le constitue. Il faudrait pour cela comprendre qu’il y a beaucoup de lucidité dans la méconnaissance rituelle, et beaucoup de méconnaissance encore dans la lucidité juridique et politique. Nous allons devoir réinventer nos rituels, c'est-à-dire nos relations, totalement repenser le bien commun. La vraie laïcité est à ce prix. Et elle aura besoin d’interroger les religions. Les démocraties européennes retrouveront-elles alors assez de ressources spirituelles pour échapper au piège que leur tend le djihadisme ? Deux conditions semblent s’imposer : avoir une claire conscience de ses racines ; chercher une réponse politique, et non religieuse, à cette situation de crise. Mais l’intelligence du religieux, au sens objectif et subjectif de l’expression, c'est-à-dire sa sagesse propre et la connaissance dont il doit devenir l’objet, inspirerait cette politique. Les religions seraient remises à leur place ; leur dignité leur serait aussi rendue. La mystique doit dynamiquement finir en politique, le spirituel s’articuler sur le temporel, mais sans jamais se confondre avec lui. En cela, il y a bien en France une mystique républicaine, comme Péguy affirmait qu’il y avait une « mystique dreyfusiste » (« recoupement en culmination de trois mysticismes au moins : juif, chrétien, français »). Cette mystique républicaine est la « table servie du dialogue ». Mais ce dialogue a trop souvent souffert de la domination d’une religion. Ne faisons donc pas du laïcisme à son tour un dogme qui dominerait les autres. Il y aurait à nouveau confusion des ordres, républicanisme et non pas République, c'est-à-dire « chose commune ». La laïcité devrait permettre aux religions de mieux dialoguer, leur assurer et leur reconnaître une égale dignité. En cela elle servirait la politique. Les événements nous ont donné quelques raisons d’espérer. Ils intervenaient au moment même où le dernier roman de Michel Houellebecq, Soumission, laissait à grand bruit entendre que seul l’islam pouvait apporter du souffle à une République efflanquée et à un christianisme moribond, mais à condition de supprimer la liberté et l’égalité, et de ne garder que la fraternité de l’Oumma, celle des individus soumis mais solidaires. Or les réactions spontanées aux attentats ont tout de suite fait mentir cette fiction et pour un temps conforté l’idéal républicain. L’espoir soulevé par les manifestations des 10 et 11 janvier ne doit donc pas être caricaturé par un retour aux positions d’antan. Il nous faut rester fidèles à cet événement, si nous voulons qu’il ait été un événement. Alors la réponse politique aux attentats perpétrés sur notre sol ne fera pas balbutier l’histoire. J’ai vu, suspendus aux balcons du boulevard Voltaire, une croix, un croissant et une étoile se détacher sur les couleurs du drapeau français. Et tous semblaient d’accord : on ne négocie pas sur la liberté, liberté religieuse et liberté d’expression. Mais cet accord ne tiendra que si chacun respecte, et écoute, la foi de l’autre : égalité et fraternité. Telles sont nos trois vertus républicaines. Il faut espérer que les nombreux chefs d’Etat présents à Paris, le 11 janvier, ont entendu ce message. A ceux qui veulent détruire ces trois valeurs, il faudra répondre non pas en « justifiant la force » mais en « fortifiant la justice », comme dit encore Pascal. Car la guerre qui s’annonce est inédite, à la fois intérieure et extérieure : guerre contre des préjugés tenaces et contre des adversaires invisibles mais déterminés. Ne parlons donc plus d’ « union sacrée », mais d’unité responsable. Penser la violence à travers le religieux, en comprenant qu’il fut longtemps la seule réponse possible à la violence, c’est découvrir aussi que la violence n’est pas originaire, qu’elle est une trahison de la relation morale. Il nous faut ressaisir cette relation que la violence a profanée ; il nous faut la réinventer. Je vous souhaite à tous une bonne année. Benoît Chantre Président de l’Association Recherches Mimétiques [/QUOTE]
Insérer les messages sélectionnés…
Vérification
Répondre
Forums
Catégorie Principale
Général
René girard daesh et la violence mimétique
Haut