Revendre son rendez-vous médical sur le site yamaplace : légal ou pas ?

mam80

la rose et le réséda
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Achetez, vendez vos opportunités de rendez-vous médicaux libérés suite à des désistements de dernière minute. » L’accroche de la plateforme YaMaPlace interpelle. Et pour cause, le site se propose – un peu comme sur leboncoin.fr - de mettre en relation un internaute qui compte annuler un rendez-vous chez le médecin avec un autre qui, au contraire, a un besoin urgent de consulter en échange de quelques euros. La proposition fait réagir; voire choque certains internautes. En particulier les professionnels de santé qui y voient une dérive mercantile de leur profession.
Quand l’attente génère l’impatience

Vieillissement de la population et développement des maladies chroniques, disparités territoriales, voire, pour certaines disciplines, diminution globale du nombre de médecins, sont autant de raisons qui expliquent l’augmentation du délai moyen d’attente pour obtenir un rendez-vous médical. Or, l’attente génère l’impatience. En particulier dans le domaine de la santé, où les patients peuvent être tentés de prendre contact avec plusieurs praticiens et d’aller chez le premier qui leur ouvrirait les portes de son cabinet. Sans pour autant prévenir les praticiens d’une éventuelle défection. Une situation qui a inspiré des petits malins. La nature ayant horreur du vide.

Un trentenaire, qui peinait à obtenir rapidement un rendez-vous, a eu alors l’idée de créer un site d’échanges… de rendez-vous. Ou plus exactement un site de reventes. Concrètement, Yamaplace.fr est une plateforme qui propose aux patients souhaitant annuler un rendez-vous médical, de les mettre en relation, moyennant finance, avec un internaute ayant un besoin urgent de consulter. En clair, le rendez-vous est maintenu mais avec une autre personne que celle initialement prévue.

Les délais atteignent des sommets

Selon l’étude publiée par le cabinet de conseil spécialisé en santé, JALMA, en 2014, il fallait compter jusqu’à 111 jours pour voir un ophtalmo, 57 jours pour un gynéco, 42 jours pour un cardio, 36 jours pour un rhumato, 31 jours pour l’obtention d’une IRM… Une situation qui ne cesse de se dégrader.
 

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la rose et le réséda
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L’aspect mercantile choque

Mais loin de paraitre une solution aux déserts médicaux, cette idée fait polémique au sein de la profession. « L'aspect mercantile choque », explique ce praticien breton qui s’interroge sur l’absence de réaction du Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM). Lequel CNOM « s’interroge sur la marche à suivre », explique à Medscape France son vice-président, le Dr Jacques Lucas. Car la marge de manœuvre est étroite. Et le délégué général aux systèmes d’information en santé d’expliquer : « dès lors que ce site n’est pas ouvert par un médecin, ou qu’aucun médecin n’en est actionnaire, l’Ordre ne dispose pas de pouvoir de sanction ». La raison ? Le pouvoir de l’Ordre est avant tout disciplinaire.

Quelle conformité avec la législation française ?

Autre problème : « A partir du moment où un rendez-vous est pris mais que le règlement n’a lieu qu’après sans que le moindre centime ne soit versé en guise d’arrhes, la revente d’un rendez-vous ne peut être considérée comme un enrichissement sans cause et risque donc de ne pouvoir être
sanctionnée », précise encore le Dr Lucas. L’Ordre s’émeut néanmoins de « ces pratiques d’achats et de reventes de prestations médicales qui peuvent sembler antinomiques avec la nature même d’une activité médicale », ajoute Jacques Lucas. D’où la saisine de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) par l’instance ordinale qui, après avoir mobilisé ses juristes, déclare « envisager une réponse adaptée, en cas d’achats massifs de rendez-vous afin que les médecins ne pâtissent de ces pratiques. »

De là à envisager une condamnation des fondateurs du site… La seule véritable question à se poser est : « l’activité est-elle en conformité avec la législation française ? », résume maître Marine Guénin, avocate inscrite au barreau de Rennes (Ille-et-Vilaine) et spécialiste en droit de la santé. Et de ce point de vue, il n’y a aucun doute, pour cette habituée des chambres disciplinaires des conseils de l’Ordre et autres prétoires civils et pénaux : « outre le non-respect du droit des praticiens à accepter un patient et à organiser leur planning en fonction des pathologies à traiter, cette initiative constitue une rupture d’égalité devant l’accès aux soins, puisque seuls les patients à mêmes d’acheter un rendez-vous pourront consulter. Sans oublier le risque inhérent à tout contrat aléatoire, puisque « le médecin peut toujours refuser le patient qui aurait acheté son rendez-vous », ajoute maître Guénin qui n’obère pas, non plus, le danger d’un éventuel risque de violation du secret professionnel.
http://www.medscape.fr/voirarticle/3601372_2

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