Salma ancien tindoufien: "la question du sahara est une vache à lait pour les grandes puissances"

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VIB
Après trois années de militantisme acharné, dont 39 jours de grève de faim en protestation contre l’atermoiement du HCR à réguler sa situation, le cas du dissident sahraoui est toujours au point mort. Mustapha Salma, ancien inspecteur général de la police du front Polisario, a plaidé en faveur du plan d’autonomie au Sahara. Résultat : il est privé du droit de rejoindre sa famille, privé d’exercer des activités politiques, privé de son passeport, privé de son droit de se déplacer librement. Interview.

Yabiladi - Du nouveau dans votre affaire ?

Salma - Le HCR (le Haut commissariat des Nations Unis pour les réfugiés) ne fait rien pour que je puisse retrouver ma famille. Ce qu’ils me proposent, c’est que j’aille en Finlande, tout seul. Ils n’accordent aucune attention à ma famille « qu’elle reste à Tindouf ou qu’elle s’en aille, on s’en fiche ! ». En gros, ils m’ont fait savoir que tout ce qui les intéressait, c’était moi. Ma famille, c’est le cadet de leurs soucis.

Yabiladi - Qu’en est-il des ONG des droits de l'Homme ? Quel est le degré de leur attention à votre égard ?

Salma - Le monde est injuste. Je m’attendais à un dénouement plus juste mais il n’en est rien. Même les organisations qui se disent militer pour les droits de l’homme ne sont humanistes qu’en apparence, elles sont en réalité fortement « politisées ». D’ailleurs, ne nos jours, tout devient « politisé ». Comme vous pouvez le constatez, mon affaire dure depuis plus de deux ans et demi. Le pays où je me trouve actuellement en tant que réfugié n’accepte pas d’accueillir mes enfants. Cela est tout de même scandaleux et injuste ! Ce ne sont que des enfants, qui sont d’ailleurs très affectés par cette affaire. En fait, ces ONG font du « deux poids, deux mesures »…

Yabiladi - Comment ça ?

Salma - J’ai reçu la visite de plus de 20 organisations d’apparence « humanitaire », des parlementaires, des journalistes, des hommes politiques… mais aucune de ces personnes ne s’est réellement intéressée à mon cas. Leur but n’est pas de prendre ma défense, ils ont des enjeux géopolitiques et doivent faire pression sur le Maroc. Si les droits de l’homme les intéressent réellement, qu’ils aillent faire un tour dans les camps de Tindouf pour voir de leurs propres yeux le calvaire que vivent les Sahraouis.
Je suis une victime, victime des violations des droits de l’homme de la part de l’Algérie et du Polisario. Ces organisations mentent à la société. Elles font des pieds et des mains pour des histoires qui n’ont pas la même ampleur ni la même gravité que mon affaire et évitent de traiter mon cas.C’est ridicule!
Actuellement, la plus grande affaire qui touche les droits de l’homme sahraoui, c'est la mienne. Il n’ y a, à ce jour, aucun autre sahraoui privé de rejoindre sa famille. Mon « erreur », si l’on considère cela comme une erreur, a été d’exprimer mon avis. Aujourd’hui, j’en fais les frais.

Yabiladi - Certains supports médiatiques disent que votre famille a bénéficié de nombreux privilèges suite à votre déclaration en faveur de l’autonomie du Sahara. Est-ce vrai ?

Salma - Faux. Que les médias disent ce qui leur plaît, mes enfants et ma femme se trouvent encore dans les camps, de quels privilèges parlent-ils au juste?

Yabiladi - Ils parlent de certains membres de votre famille qui se trouvent au Maroc ?

Salma - Je n’ai qu’un frère fonctionnaire au Maroc. Pourtant je suis issu d’une fraterie de 4 filles et 5 garçons.

Yabiladi - Enfin, dernière question, comment voyez-vous l’évolution de la question du Sahara ?

Salma - C’est un grand débat. En vérité, le monde est aujourd’hui dirigé par des pays qui se comptent sur les doigts des mains. D’une part, ces pays-là ne veulent pas d’issue à la question du Sahara car cela compromettra leurs propres intérêts. D’autre part, l’Algérie n’aide pas à l’avancement des négociations. Le front du Polisario ne détient pas le monopole des décisions. Quant aux Sahraouis concernés par la question, ils ont été liquidés par le Polisario et l’Algérie. En résumé, je ne vois aucun soupçon de solution à la question du Sahara.
Et à mon avis, les plus grandes puissances veulent réduire le monde arabo-musulman en miettes. Leur but est de dominer le monde, non seulement en essayant de faire durer les problèmes existants au sein de la communauté arabe, mais en y créant de nouveaux problèmes, comme ce qu’il s’est passé en Irak et ce qu’il se passe aujourd’hui en Egypte, en Lybie et en Syrie. Comment voulez-vous que votre « bourreau » soit votre « sauveur » ?
En plus, la question du Sahara n’est pas une question de problèmes entre chiites, kurdes ou sunnites, tout le monde est bien intégré ici. Ce « faux » problème éthnique a été fabriqué de toutes pièces pour attiser la haine entre le Maroc et l’Algérie et en faire des ennemis. Surtout qu’en Algérie, c’est l’armée qui gouverne, et elle a besoin de soutien pour assurer sa pérennité. L’armée algérienne est à la merci des plus grands Etats, en échange de leur silence. D’ailleurs, l’Algérie est le seul pays où les ONG ne mettent pas les pieds... en plus de la Corée du Nord… (rires). Et ce, en dépit de la guerre civile qui a ravagé le pays.
En résumé, la question du Sahara est une « vache à lait » pour l’occident. Quoi que l’on propose comme solution, les « grands Etats » feront tout pour que les problèmes persistent, c’est une arme qu’ils utilisent quand ils veulent et dont ils ne sont pas prêt de se séparer.

Source: Yabiladi 26/07/2013 (j'ai coupé deux-trois passage, allez sur leur site si vous voulez tout lire)
 
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