Sortie de l'euro : le scénario catastrophe

Quelles seraient les conséquences économiques et financières d'un éclatement de la zone euro ? Deux économistes français se sont penchés sur la question. Leurs conclusions sont plus qu'alarmistes...

Il y a peu, l'hypothèse d'un éclatement de la zone euro relevait de l'interdit dans les milieux officiels. Aujourd'hui, le tabou est brisé. Les affres grecques, l'imbroglio italien, l'inflexibilité des pays triple A d'Europe du Nord y sont pour beaucoup. Pour sortir de l'impasse actuelle, il n'est plus rare d'entendre des responsables européens envisager à mots à peine voilés la sortie de la zone de tel ou tel pays en grande difficulté budgétaire. « En dernier recours, les pays peuvent toujours décider de quitter la zone euro, une liberté qu'ils ont déjà », rappelait par exemple la semaine dernière le Premier ministre néerlandais Mark Rutte. Même tonalité chez Horst Seehofer, chef de la CDU allemande et Premier ministre du Land de Bavière, refusant d'écarter l'idée de la sortie de la Grèce de la zone euro. A cela s'ajoute le succès croissant, auprès des opinions publiques européennes ébranlées par la crise, des discours eurosceptiques. Dans ce contexte, deux économistes français de renom, Patrick Artus, responsable de la recherche économique chez Natixis, et Stéphane Déo, chef économiste chez UBS, se sont lancés dans l'exercice périlleux de mesurer les conséquences d'une éventuelle conflagration de l'eurozone. Leurs conclusions sont sans appel : un abandon ou un « détricotage » partiel de l'Union monétaire européenne auraient des retombées terribles pour tous les pays membres. Revue de détail.

Sortir, oui. Mais comment ?

« C'est l'Hôtel California. On peut faire le check out, mais on ne peut pas le quitter », résume Stéphane Déo. Puisqu'aucun mécanisme technique spécifique de sortie n'est inscrit dans les traités, « les coûts de sortie sont significatifs », enchaîne-t-il. Aucune provision n'est prévue. Si un pays souhaitait quitter la zone euro de son plein gré, il lui faudrait négocier l'adoption par ses anciens partenaires d'un amendement au traité de Lisbonne de 2007. Dans son article 50, ce dernier fournit en effet un cadre légal pour une éventuelle sortie de l'Union européenne, mais pas pour l'abandon de la monnaie unique. Fatalement, compte tenu des implications en tous genres, les tractations risqueraient de prendre du temps. Comme l'exigent leurs Constitutions, plusieurs pays seraient en outre contraints d'organiser des référendums pour valider les changements du traité. Une mise à l'écart souhaitée, cette fois, par l'ensemble des partenaires, ne serait pas plus facile à mettre en oeuvre : l'expulsion d'un pays ayant adhéré à l'euro n'étant tout simplement pas possible, seule son exclusion de l'Union européenne peut être imaginée... Reste l'hypothèse d'une séparation consensuelle : compliqué, là encore. Car il faudrait modifier à l'unanimité des 27 pays le Traité de l'Union européenne, mieux connu sous le nom de traité de Maastricht. L'assurance de voir le processus s'éterniser.
 
Quel effet sur la dette ?

Un pays qui sortirait malgré tout de la zone euro aurait deux options : conserver sa dette en euros ou, plus probablement, la convertir de force dans la nouvelle (ancienne) devise nationale. Dans le premier cas, l'Etat se priverait d'utiliser l'effet change, susceptible de faire évoluer favorablement sa dette. A la clef, de façon presque certaine, un défaut. Mais les investisseurs considéreraient aussi comme une forme de défaut la conversion forcée. Et la facture serait alors salée pour tout le monde, y compris pour les investisseurs non résidents.« Compte tenu des dévaluations que nous envisageons, cela leur coûterait 170 milliards d'euros dans le cas de la Grèce, 70 milliards d'euros dans le cas du Portugal, 90 milliards d'euros dans le cas de l'Espagne et 300 milliards d'euros dans celui de l'Italie », estime Patrick Artus. Le déclenchement d'un effet dominos serait presque instantané. « Concentrées sur les banques et les investisseurs institutionnels de la zone euro, ces pertes conduiraient normalement, avec le choc de la rupture de l'euro, à une forte dépréciation de l'euro à court terme », poursuit-il. Maigre consolation, il est permis de considérer qu'à plus long terme, après cette « purge », « l'euro pourrait au contraire s'apprécier du fait de l'amélioration de la "qualité" économique de la zone ».

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