"Je ne comprends pas qu'on puisse avoir autant de haine en soi"
Suite aux dégradations perpétrées sur l'édifice religieux, Larbi Marchiche, recteur de la grande mosquée de Saint-Étienne, a accepté de répondre à nos questions.
Quelle a été votre première réaction, hier matin, au moment où vous avez découvert ces graffitis ?
J'ai été choqué. Vraiment, très choqué. Mais je m'y attendais un peu.
Avec tout ce qu'on entend à la télévision, sur les radios ; avec tout ce qu'on lit dans les journaux sur les questions d'identité nationale, sur le port de la burqa, il ne faut pas s'étonner.
Tout cela pousse les extrémistes à se manifester par des gestes aussi stupides. Et puis nous sommes en pleine période électorale avec les élections régionales qui se dérouleront en mars prochain. Et à chaque fois, c'est la même chose. Les extrêmistes ressortent toujours avec la même haine.
Qu'avez vous fait à cet instant précis ? Qui avez-vous joint en premier au téléphone hier matin ?
J'ai d'abord appelé le président du Comité français du culte musulman. Je lui ai expliqué ce qui était arrivé.
Il a prévenu dans la foulée le ministère de l'Intérieur à Paris. J'ai ensuite appelé le préfet de la Loire et le directeur de la police nationale à Saint-Étienne.
Ils sont tous arrivés dans la foulée pour constater, mais aussi, pour nous soutenir.
Qui est venu précisément ?
Le préfet est venu, la police aussi, puis un peu plus tard le Consul général du royaume du Maroc, M. Saâd Bendourou.
Il y a aussi des élus qui se sont déplacés dans la journée, comme le maire de Saint-Étienne, Maurice Vincent. Tous nous ont dit leur compassion et ne comprenaient pas que l'on puisse s'en prendre de façon aussi stupide à un lieu de culte.
Vous avez déposé une plainte ?
Oui, bien sûr, dans l'après-midi.
Que vous inspirent ces graffitis ?
Un profond désarroi. Mais surtout, ce que je ne comprends pas, ce sont ces références à Hitler. Les musulmans n'ont rien à voir avec cette page de l'Histoire. Il y a un amalgame qui est fait par ces individus.
Je ne comprends pas que l'on puisse avoir autant de haine en soi, d'autant que la grande mosquée de Saint-Étienne est ouverte à tout le monde.
Aux musulmans, comme aux non musulmans.
Tout le monde peut venir la visiter, voir l'avancement des travaux. Nous accueillons ici les visiteurs, sans distinction.
Nous sommes des gens ouverts d'esprit qui n'avons rien à cacher.
Au contraire. Nous sommes transparents.
D'ailleurs, cette mosquée est construite en étroite collaboration avec les autorités françaises.
Pour moi, il s'agit d'un acte isolé mais nous allons devoir installer plus tôt que prévu des caméras de vidéo surveillance.
Source: Le Progrès - F. P.