Ukraine : les partisans de l'ue dispersés

Faudra-t-il revenir ou pas ? La question était sur les lèvres des milliers de manifestants réunis place de l'Indépendance à Kiev, vendredi 29 novembre, alors que se clôturait, à 650 km de là, le sommet européen de Vilnius (Lituanie) sur le Partenariat oriental.
Jour et nuit, depuis l'annonce par le pouvoir, le 21 novembre, d'une « pause » dansses négociations avec l'Union européenne (UE), les partisans d'un rapprochement de l'Ukraine avec l'Europe se sont relayés sur cette place emblématique de la capitale. Malgré la pression de la rue pour qu'un accord avec l'UE soit signé, le président Viktor Ianoukovitch n'a pas cédé d'un pouce. Et les forces de police ont violemment délogé les manifestants, samedi 30 novembre à l'aube, à coups de matraques et de gaz lacrymogènes. Officiellement, la police dit qu'elle est intervenue car il y avait des « incidents » sur la place, sans en préciser la nature. Vendredi soir, avant d'être délogés, de nombreux manifestants craignaient des débordements et s'interrogeaient sur la présence d'un certain nombre d'individus cagoulés.


Pendant huit jours pourtant, les rassemblements s'étaient déroulés dans une ambiance bon enfant. La présence policière, discrète les premiers jours, et même parfois bienveillante, certains policiers partageant un thé avec les manifestants ou prenant la pose devant les photographes, s'était nettement durcie vendredi en fin d'après-midi avec le positionnement de centaines de forces en tenue anti-émeutes (les médias ukrainiens parlaient de milliers de policiers présents aux abords de la place de l'Indépendance). Pour les partisans pro-Européens, il s'agissait d'une provocation des autorités destinée à les intimider.

Selon l'AFP, des dizaines de blessés ont été constatés. « Il nous a trahis », a lancé à la foule le député Vitali Klitschko, l'un des opposants les plus influents du pays. A peine rentré de Vilnius, où il s'était rendu avec d'autres figures de l'opposition, cet ancien champion du monde de boxe a demandé la démission du président.

QUELLES SUITES AU MOUVEMENT ?

Une dernière grande mobilisation était prévue, dimanche, mais ceux de « Maïdan », le nom donné par les Ukrainiens à la place de l'Indépendance, se divisaient sur la suite à donner au mouvement. « Si on ne reprend pas le mouvement, notre action n'aura servi à rien », estime Viktor, dynamique quinquagénaire, déjà deux nuits blanches à son actif. « On doit s'arrêter avant que la situation ne pourrisse », pense pour sa part M. Kourylo.

LA QUESTION DU RÉFÉRENDUM

Que va faire maintenant le gouvernement ukrainien ? La question d'un référendum est posée, mais « on ne peut pas organiser un référendum si on n'est pas certain de son issue, considère le député Mikhaïlo Tchetchetov. A l'heure actuelle, un scrutin serait trop serré et aggraverait les tensions dans le pays. » Le Parti des régions lui-même hésite entre rapprochement avec la Russie ou association avec l'UE. Ses dirigeants se sont pour l'heure contentés de faire monter les enchères des deux côtés, pesant les risques économiques et politiques de l'un ou l'autre choix. Le pouvoir a surtout en ligne de mire la présidentielle de 2015, où la question européenne sera centrale. Mais rien n'indique qu'UE et Russiemodéreront leurs exigences à l'égard de Kiev, et Viktor Ianoukovitch apparaît d'ores et déjà affaibli par cette crise au cours de laquelle il n'a cessé de louvoyer.

Les manifestants d'Euro Maïdan pensent quand même avoir marqué des points. « On était trop nombreux, le gouvernement devra nous écouter », veut croireKaterina Nevirko, étudiante de 19 ans. Les pro-Européens attendent désormais que l'opposition s'unisse. Certains font leur autocritique, comme Yegor Loukianov, 22 ans, venu quotidiennement sur la place depuis huit jours : « Il faut qu'on s'organise mieux. Pour l'instant, EuroMaïdan c'est une disco, mais pas encore une révolution. »
 
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