Quand valls est en campagne, manifs interdites (enfin, pas toutes)

Drianke

اللهم إفتح لنا أبواب الخير وأرزقنا من حيت لا نحتسب
Contributeur
Vendredi soir, Manuel Valls et trois de ses ministres (Education, Agriculture, Défense) faisaient campagne dans la salle polyvalente de Betton, au nord de Rennes, en vue des élections départementales. C’était un meeting sur invitation auquel assistaient des militants et sympathisants du PS, et à peu près tout le gratin socialiste d’Ille-et-Vilaine : députés, sénateur, élus municipaux, départementaux, régionaux, hiérarques du parti... qui sont souvent les mêmes, cumul oblige.

Pour ma part, n’étant ni socialiste, ni invité, je participais à une manifestation devant la mairie de Betton, qui se situe devant la salle polyvalente. Le rassemblement était organisé par un collectif rennais pour dénoncer la politique d’immigration du gouvernement.

Manifestations interdites

Nous avions plusieurs banderoles, qui disaient « Non aux expulsions », « Des papiers et des logements pour tou-te-s ! Valls dégage ! » ou encore « Régularisation de toutes les personnes sans-papiers ». Nous avons commencé à distribué des tracts aux gens qui allaient au meeting, et aux habitant-e-s de Betton qui étaient venus voir passer les ministres.

Nous étions à peu près 25, et les CRS, présents en masse sur un parking un peu plus loin, ne se montraient pas. Etant donné notre faible nombre, je me suis dit qu’on ne gênait pas grand monde et qu’on ne devait pas faire trembler le gouvernement – hélas.

J’ai commencé à penser qu’on allait nous laisser manifester gentiment, et qu’au moment ou les ministres arriveraient, on nous obligerait à nous éloigner un peu. Mais dans le même temps, le souvenir des derniers déplacements de Valls à Rennes, et celui des récentes manifestations interdites pas la préfecture, me faisaient redouter une intervention policière un peu plus musclée. J’ai été servi.

Après cinq minutes de distribution de tracts, et alors que nous venions de commencer à chanter nos slogans, un groupe de CRS a débarqué. Leur chef a dit à celui d’entre nous qui avait le mégaphone que notre manifestation était illégale et qu’ils allaient nous faire reculer.

Sans sommation, il a ordonné à ses hommes de nous pousser. Sans résistance, mais en nous efforçant de rester tous ensemble, nous avons été contraint-e-s de reculer jusqu’au milieu de la chaussée, où les policiers nous ont encerclés, pressés les uns contre les autres, nous privant de toute liberté de mouvement.

On a commencé à se demander ce qu’ils allaient faire de nous, dans une situation un tantinet anxiogène. Ils se sont alors mis à nous arracher nos banderoles des mains, sans ménagement et dans une confusion totale.

Celui qui avait le mégaphone a expliqué aux badauds restés devant la mairie ce qui nous arrivait.

Puis ils nous ont fait reculer jusqu’au trottoir d’en face. Alors que nous obtempérions en demandant aux policiers de se calmer, le chef a ordonné à ses hommes de s’emparer du mégaphone. Deux Robocops se sont alors jetés sur son porteur, comme dans une mêlée de rugby, qui a fini par le lâcher pour ne pas partir avec.

« Encagés » pendant deux heures

Pendant ce temps-là, la poussée policière continuait à l’arrière du groupe, des camarades criaient, nos tracts se répandaient au sol. J’ai aperçu une amie en larmes, un autre violemment bousculé par les policiers.

Ils ont continué à nous trimballer jusqu’à ce qu’on se retrouve sur un chemin de terre, entre un parking garni de cars de CRS et un étang, à 200 mètres du lieu initial. Sans banderoles, sans mégaphone. Histoire que notre manifestation n’existe pas.

Nous sommes restés « encagé-e-s » pendant deux heures, jusqu’à la fin du meeting. Pendant tout ce temps, les CRS en large surnombre se relayaient régulièrement pour nous garder. Des amis qui avaient eu la bonne idée d’arriver en retard ont échappé à l’enfermement, mais étaient empêchés de venir nous parler.

Plusieurs CRS répondaient à nos protestations par des « Fallait pas venir » ou des « La prochaine fois, vous resterez chez vous. »

Mais à cette heure-là, nous n’avions même plus le droit de rentrer chez nous. Une seule personne a pu sortir pour aller prendre un bus, après l’intervention d’un policier local du renseignement qui surveille régulièrement nos manifestations. Une personne qui a des problèmes de santé a dû âprement négocier pour être autorisée à s’assoir sur un plot de parking. D’autres se sont vus refuser cette faveur réservée à « votre amie, vu qu’elle est soi-disant handicapée ».

Encore mieux : deux femmes qui n’ont pas eu droit d’aller faire pipi ont fini par se résoudre à uriner dans un coin de notre prison, se cachant comme elle pouvait, sous les yeux de deux policiers moitié gênés, moitié goguenards.

Interdiction à géométrie variable..............

http://rue89.nouvelobs.com/2015/02/28/quand-valls-est-campagne-manifs-interdites-enfin-toutes-257978
 
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