Anne Joubert, ancienne SDF, est sortie diplômée de lEcole nationale dadministration (ENA) en mars 2008, à lâge de 43 ans. Celle qui a écrit "De la Zone à lENA" nous éclaire sur son destin pour le moins atypique.
Anne Joubert a aujourdhui 47 ans. Lyonnaise dorigine, elle a connu le pire de lexclusion quand, dans sa jeunesse, elle tourne le dos à un milieu familial aisé pour se retrouver dans la rue parmi les routards et les SDF.
Elle "zone" pendant deux ans, connaît le vol, la drogue, les arrestations, le froid, jusquoù jour où, à 19 ans, elle décide davoir un enfant. La raison reprend alors le dessus, " il fallait que je fasse quelque chose sinon la Ddass maurait pris mon bébé" .
Elle passe son bac, enceinte de six mois, et commence des études de communication. La galère nest pas pour autant terminée, loin sen faut. "Les cinq-six ans qui ont suivi ma sortie de la rue ont été les plus difficiles : dans ma tête jétais encore dans la zone. Avec mon mari, on hébergeait toutes sortes de marginaux qui buvaient, fumaient et veillaient toute la nuit. Le manque dargent était constant, sauf que je ne voulais plus voler, je ne pouvais plus squatter, je devais étudier et faire vivre seule ma famille ". Son salut, elle larrache à force de ténacité, mais aussi grâce à ses parents qui lont toujours épaulée, et à ses deux filles, qui lont poussée à chercher la stabilité et la sécurité tant redoutées.
Militante, elle nen oublie pas pour autant les autres. " Toute ma vie, mon fil conducteur a été de travailler pour les gens en difficulté " confie Anne, qui le prouve à chaque étape de son parcours : révolutionnaire à 17 ans, elle rejoint les plus exclus de la société. Elle devient ensuite journaliste pour des journaux alternatifs. A 32 ans, elle passe un Capes de Lettres modernes et devient enseignante dans un établissement difficile du nord parisien.
Puis dix ans plus tard, la consécration : lENA ! Un choix quelle fait presque par hasard : " Javais entendu parler dune préparation à ce concours pour les fonctionnaires qui permettait dêtre payé pendant un an" dit-elle amusée. Au final, elle passe et réussit le concours interne de lENA, en 2005, à lâge de 43 ans. Doyenne de sa promotion, elle avoue sêtre sentie parfois quelque peu en décalage avec ses nouveaux compagnons de route dont elle a pourtant su se faire accepter et apprécier les qualités. "Jestime avoir une certaine dualité en moi que jassume totalement. Elle me permet dassurer un rôle de médiateur entre les décideurs politiques et ceux que visent les réformes ".
Devenue chef de bureau à la Direction générale de l'action sociale, chargée des politiques de prévention, dinsertion et daccès au droit, Anne doit maintenant trouver des solutions pour aider les plus démunis. Un terrain quelle connaît bien. Elle fera dailleurs tout pour leur donner au maximum la parole : "Vous savez, ceux qui vivent dans la rue ont des choses à dire et savent les exprimer. Ils doivent participer à lélaboration et à lévaluation des politiques qui les concernent ". Un message qui doit encore faire son chemin .
Pour en savoir plus : "De la Zone à lENA" dAnne Joubert , Editions Le Cherche Midi, novembre 2008.
Magdeleine Walger (Reporters d'Espoirs)
Mai 2009
Anne Joubert a aujourdhui 47 ans. Lyonnaise dorigine, elle a connu le pire de lexclusion quand, dans sa jeunesse, elle tourne le dos à un milieu familial aisé pour se retrouver dans la rue parmi les routards et les SDF.
Elle "zone" pendant deux ans, connaît le vol, la drogue, les arrestations, le froid, jusquoù jour où, à 19 ans, elle décide davoir un enfant. La raison reprend alors le dessus, " il fallait que je fasse quelque chose sinon la Ddass maurait pris mon bébé" .
Elle passe son bac, enceinte de six mois, et commence des études de communication. La galère nest pas pour autant terminée, loin sen faut. "Les cinq-six ans qui ont suivi ma sortie de la rue ont été les plus difficiles : dans ma tête jétais encore dans la zone. Avec mon mari, on hébergeait toutes sortes de marginaux qui buvaient, fumaient et veillaient toute la nuit. Le manque dargent était constant, sauf que je ne voulais plus voler, je ne pouvais plus squatter, je devais étudier et faire vivre seule ma famille ". Son salut, elle larrache à force de ténacité, mais aussi grâce à ses parents qui lont toujours épaulée, et à ses deux filles, qui lont poussée à chercher la stabilité et la sécurité tant redoutées.
Militante, elle nen oublie pas pour autant les autres. " Toute ma vie, mon fil conducteur a été de travailler pour les gens en difficulté " confie Anne, qui le prouve à chaque étape de son parcours : révolutionnaire à 17 ans, elle rejoint les plus exclus de la société. Elle devient ensuite journaliste pour des journaux alternatifs. A 32 ans, elle passe un Capes de Lettres modernes et devient enseignante dans un établissement difficile du nord parisien.
Puis dix ans plus tard, la consécration : lENA ! Un choix quelle fait presque par hasard : " Javais entendu parler dune préparation à ce concours pour les fonctionnaires qui permettait dêtre payé pendant un an" dit-elle amusée. Au final, elle passe et réussit le concours interne de lENA, en 2005, à lâge de 43 ans. Doyenne de sa promotion, elle avoue sêtre sentie parfois quelque peu en décalage avec ses nouveaux compagnons de route dont elle a pourtant su se faire accepter et apprécier les qualités. "Jestime avoir une certaine dualité en moi que jassume totalement. Elle me permet dassurer un rôle de médiateur entre les décideurs politiques et ceux que visent les réformes ".
Devenue chef de bureau à la Direction générale de l'action sociale, chargée des politiques de prévention, dinsertion et daccès au droit, Anne doit maintenant trouver des solutions pour aider les plus démunis. Un terrain quelle connaît bien. Elle fera dailleurs tout pour leur donner au maximum la parole : "Vous savez, ceux qui vivent dans la rue ont des choses à dire et savent les exprimer. Ils doivent participer à lélaboration et à lévaluation des politiques qui les concernent ". Un message qui doit encore faire son chemin .
Pour en savoir plus : "De la Zone à lENA" dAnne Joubert , Editions Le Cherche Midi, novembre 2008.
Magdeleine Walger (Reporters d'Espoirs)
Mai 2009