Jai rencontré peu de gens aussi admirables quAndré Azoulay, conseiller de longue date du roi du Maroc. Lui et sa femme, Katia, sont nés à Essaouira, la seule ville du monde arabe à avoir été majoritairement juive. Lattitude et les propos dAndré Azoulay témoignent de sa noblesse et de sa perspicacité. Lorsque je lai rencontré pour la première fois, il y a vingt-cinq ans, jai téléphoné à lhôtel où il était logé, à Jérusalem, et demandé à parler à M. Azoulay. « Est-ce quil travaille à lhôtel ? » ma demandé le réceptionniste, visiblement incapable dimaginer quun dénommé Azoulay puisse être un client.
Lors de notre rencontre en avril, il était abattu et perturbé. Pour la première fois au cours de sa longue carrière de conseiller de Hassan II, puis de son fils Mohammed VI, lactuel monarque, Azoulay a été accusé dêtre un agent du Mossad par un avocat local, Khalid Soufiani, un militant de la cause palestinienne.
Azoulay a un parcours impressionnant. Il a fondé le groupe Identité et Dialogue, lun des premiers cercles à avoir appelé à des négociations entre Palestiniens et Israéliens dans les années 1970, et il a, tout au long de sa carrière, plaidé pour la paix entre Juifs et Arabes. Il sest toujours senti fier de son identité juive tout en étant un patriote marocain. Tout compte fait, il est étonnant quil nait pas été accusé plus tôt de travailler pour le Mossad. Après tout, être juif et conseiller du roi dans un pays arabe nest pas banal, dautant quil a possédé une maison en Israël.
Les journaux du royaume ont immédiatement défendu Azoulay. De son côté, il na pas hésité à participer, en avril, au dîner annuel du Club Mimouna, une association qui a pour but de préserver lhéritage culturel juif au Maroc. Lentrée de lauditorium était ornée dune grande inscription en hébreu, et le secrétaire dÉtat au Tourisme était présent à la cérémonie douverture. Je nen croyais pas mes yeux. Décidément, le Maroc se révélait très différent de ce que jimaginais. À Fès, par exemple, le cimetière juif est mieux entretenu que nimporte quel cimetière musulman dIsraël, et la synagogue de la ville a été restaurée, à linitiative dAzoulay, évidemment. Il ne reste que 60 Juifs à Fès, et le sacrificateur rituel qui me guide, Avraham Sabag, la soixantaine, fait partie des plus jeunes. Il envisage démigrer en Israël, où il contrôlerait les produits casher dans un hôtel dEilat.
Parmi les 3 000 Juifs qui vivent au Maroc, jen ai rencontré beaucoup qui rêvaient que le modèle de coexistence marocain puisse inspirer une solution au conflit israélo-palestinien. Le peintre et journaliste Claude Senouf caresse même le projet dinviter des groupes dIsraéliens et de Palestiniens au Maroc pour rapprocher les deux peuples. Mais dautres, comme Simon Lévy, directeur du musée du Judaïsme marocain de Casablanca, comparent loccupation israélienne au nazisme. Au Maroc comme ailleurs, il y a autant dopinions quil y a de Juifs.
Source : Jeune Afrique http://www.jeuneafrique.com/Article...sad-dialogueau-royaume-de-la-coexistence.html
Lors de notre rencontre en avril, il était abattu et perturbé. Pour la première fois au cours de sa longue carrière de conseiller de Hassan II, puis de son fils Mohammed VI, lactuel monarque, Azoulay a été accusé dêtre un agent du Mossad par un avocat local, Khalid Soufiani, un militant de la cause palestinienne.
Azoulay a un parcours impressionnant. Il a fondé le groupe Identité et Dialogue, lun des premiers cercles à avoir appelé à des négociations entre Palestiniens et Israéliens dans les années 1970, et il a, tout au long de sa carrière, plaidé pour la paix entre Juifs et Arabes. Il sest toujours senti fier de son identité juive tout en étant un patriote marocain. Tout compte fait, il est étonnant quil nait pas été accusé plus tôt de travailler pour le Mossad. Après tout, être juif et conseiller du roi dans un pays arabe nest pas banal, dautant quil a possédé une maison en Israël.
Les journaux du royaume ont immédiatement défendu Azoulay. De son côté, il na pas hésité à participer, en avril, au dîner annuel du Club Mimouna, une association qui a pour but de préserver lhéritage culturel juif au Maroc. Lentrée de lauditorium était ornée dune grande inscription en hébreu, et le secrétaire dÉtat au Tourisme était présent à la cérémonie douverture. Je nen croyais pas mes yeux. Décidément, le Maroc se révélait très différent de ce que jimaginais. À Fès, par exemple, le cimetière juif est mieux entretenu que nimporte quel cimetière musulman dIsraël, et la synagogue de la ville a été restaurée, à linitiative dAzoulay, évidemment. Il ne reste que 60 Juifs à Fès, et le sacrificateur rituel qui me guide, Avraham Sabag, la soixantaine, fait partie des plus jeunes. Il envisage démigrer en Israël, où il contrôlerait les produits casher dans un hôtel dEilat.
Parmi les 3 000 Juifs qui vivent au Maroc, jen ai rencontré beaucoup qui rêvaient que le modèle de coexistence marocain puisse inspirer une solution au conflit israélo-palestinien. Le peintre et journaliste Claude Senouf caresse même le projet dinviter des groupes dIsraéliens et de Palestiniens au Maroc pour rapprocher les deux peuples. Mais dautres, comme Simon Lévy, directeur du musée du Judaïsme marocain de Casablanca, comparent loccupation israélienne au nazisme. Au Maroc comme ailleurs, il y a autant dopinions quil y a de Juifs.
Source : Jeune Afrique http://www.jeuneafrique.com/Article...sad-dialogueau-royaume-de-la-coexistence.html