DEVELOPPEMENT :
I)Connaître et observer :
Qu’est-ce que connaître quelque chose ? A un premier niveau c’est en avoir une idée claire et distincte. Que signifie pour moi connaître la mécanique automobile ? Cela signifie que j’ai présent à l’esprit les différents éléments d’un moteur, ainsi que leurs principales propriétés. Connaître un objet, c’est avoir à son propos une croyance vraie et justifiée. La connaissance désigne en ce sens un processus, une relation, qui unit d’une part un sujet, porteur de certaines facultés, un objet, qu’il s’agit de connaître, et toute une gamme de procédure. Que faut-il entendre par l’idée d’observation ? Lorsque j’observe un tableau, ou bien un paysage, je me confronte directement à la réalité et m’y rapporte par l’intermédiaire de mon appareil sensitif. Observer quelque chose, c’est l’examiner, le regarder avec attention.
Mais la connaissance se réduit-elle à l’observation ? Une telle position semble intenable, ne serait-ce qu’à cause des définitions précédentes. La connaissance qu’à un astronome de la voûte céleste doit immanquablement sembler plus aboutie et plus complète que celle d’un poète. Ce dernier peut bien avoir passé de longs moments à observer le ciel en soupirant, ce rapport sensible ne saurait, à lui seul, lui fournir une connaissance identique à celle de l’astronome. Pourquoi ? Parce que les propriétés du réel ne se manifestent pas à même la sensation. L’observation, lorsqu’elle désigne notre rapport premier à la réalité sensible est insuffisante à fonder la connaissance. Pourquoi ? Parce que connaître un objet ou une théorie ne signifie pas simplement en avoir une image dans l’esprit, mais bien plutôt avoir une conception claire et distincte des rapports qu’entretient un objet avec ses propriétés, ainsi que des relations qu’entretiennent les phénomènes. En outre, puisque la connaissance désigne une croyance vraie justifiée, elle se doit d’être universellement valable. Qui sont les savants ? La communauté des connaisseurs, c’est-à-dire celle regroupe des êtres humains qui ont consacré leur temps et leur énergie à l’étude d’un objet ou d’un phénomène. Mais autour de quoi ces hommes se regroupent-ils ? Autour d’un certain socle de connaissances communes qu’ils ont en partage. Ici affleure la caractéristique déterminante de la connaissance : son caractère universel. Selon celui-ci, la véritable connaissance est valable en tout lieu et en tout temps.
A cette universalité de la connaissance s’oppose la relativité des observations : tout le monde ne fait pas les mêmes observations. Pourquoi cela ? Parce que, d’une part, tout le monde n’est pas doté du même appareil sensitif, et parce que, d’autre part, personne ne peut jamais éprouver les sensations d’un autre. Si l’observation était seule responsable de la connaissance, un savant qui serait doté d’une vue moins bonne qu’un autre ne pourrait pas s’accorder avec lui. Qu’est-ce que cela signifie ? Que l’observation, en tant qu’elle désigne ce rapport directe et sensible à la réalité, ne peut pas fonder la connaissance universelle. Quel est donc l’ultime fondement des connaissances universelles ? Les inférences de la raison. Que faut-il entendre par la notion d’inférence ? L’ensemble des procédures rationnelles qui permettent aux différents sujets de s’accorder sur les propriétés d’un phénomène ou d’un objet Euclide travaillait sur papyrus, le professeur de mathématiques contemporain travaille sur le tableau noir, et les chercheurs, sur ordinateur… Comment expliquer que les propriétés du carré soient les mêmes en tout lieu et en tout temps, alors que les carrés sensibles sur lesquels travaillent les mathématiciens sont si différents ?