Cartographie culturelle : Céramique modelée et peinte et tracé du "Limes Romain"

Cette poterie ne s'étend pas à tous les pays berbères (elle est inconnue au Sahara) ni même à la totalité du "Maghreb".
Au Maroc, elle disparaît au sud du Rif. Dans les plaines et plateaux atlantiques, dans le Grand et le Moyen Atlas, ce sont d'autres techniques qui triomphent, telle la poterie moulée ou la poterie faite au tour. En Algérie, elle est limitée au Tell, atteint le sud de l'Ouarsenis et des Monts du Hodna, plus à l'est, son extension s'accroît en gagnant vers le sud, recouvrant l'Aurès et presque toute la Tunisie jusqu'aux monts des Matmata. Ainsi cette poterie, appelée souvent kabyle et qui paraît typiquement «berbère» n'est pas toujours le produit de populations berbérophones; elle existe, certes, dans les massifs montagneux peuplés de Berbères mais elle est inconnue dans les plus importants d'entre eux, ceux du Maroc central et méridional qui demeurent les plus vastes bastions de «berbéritude». En revanche la poterie modelée et peinte est très vivante chez les populations arabophones d'Algérie (Ouarsenis, nord de l'Algérie orientale) et de Tunisie. Elle est connue même des semi-nomades du sud de l'Aurès et du sud tunisien. Elle n'est donc un produit ni exclusivement berbère ni exclusivement sédentaire. Une carte de répartition de cette céramique offre la curieuse particularité de prendre en écharpe le Maghreb : elle est située, en gros, au nord d'une ligne orientée, nord-ouest/sud-est depuis Larache jusqu'à Zarzis. Ces limites ainsi grossièrement tracées correspondent approximativement aux Limes romain du IIIe siècle. Cette coïncidence n'est pas le fait du hasard : tout comme la domination romaine, la poterie berbère est d'origine méditerranéenne. Son extension est tellienne, sauf à l'est qui bénéficie des deux façades méditerranéennes de la Tunisie (Gabriel CAMPS)
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Cette extension si particulière offre donc un premier élément de solution quant à l'origine de cette céramique. Sa répartition ne semble pas convenir à une origine autochtone; elle n'est pas liée non plus à un genre de vie particulier, puisqu'elle s'étend dans les plaines comme dans les montagnes. Les recherches que j'ai entreprises dès 1953 sur les poteries modelées d'âge protohistorique de Gastel et de Tiddis ont apporté la preuve de l'existence, dès le ive siècle av. J.-C. et certainement avant, d'une céramique ayant les mêmes caractères techniques et stylistiques que la poterie dite kabyle
Aussi entrevoyons-nous plus facilement aujourd'hui les origines de cette poterie qui a conservé les traditions techniques nées en Orient, et une expression artistique méditerranéenne qui, ailleurs, a disparu. La poterie peinte est devenue «berbère» parce qu'elle est restée rurale alors que dans les villes, dès l'époque punique, triomphait une autre industrie céramique fondée sur l'usage du tour pour le façonnage et du four pour la cuisson. Parmi les multiples foyers de céramique peinte susceptibles d'avoir diffusé leur technique vers l'Afrique du Nord, celui de Sicile nous semble devoir être retenu en priorité. En faveur d'une origine sicilienne de la céramique peinte, plusieurs faits militent en effet : tout d'abord la proximité, puis l'ancienneté et l'importance des relations entre les deux pays, relations prouvées dès le Néolithique ancien par l'introduction au Maghreb d'obsidienne de Lipari et de Pantelleria, et à l'âge des Métaux par l'existence, dans le nord de la Tunisie comme en Sicile, des mêmes nécropoles de petits hypogées creusés à flanc de falaise ou de rocher. Les vases peints siciliens du Style de Castelluccio présentent les mêmes motifs agencés de la même façon sur des vases ayant souvent les mêmes formes. Or ce style s'étend jusqu'à Malte, rien ne s'oppose à ce qu'il ait également pénétré en Tunisie. Aux ressemblances morphologiques et décoratives s'ajoutent même des détails techniques très caractéristiques parce que peu répandus, c'est le cas, par exemple, du vernis à la résine des poteries de Cassibile et de celles de plusieurs régions d'Algérie. La poterie peinte qui a curieusement la même extension que la domination romaine est comme celle-ci un phénomène d'origine méditerranéenne.
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Ce style de poterie est bien antérieur aux romains et au Limes.
A Tiddis ( site archéologique numide/libyque impressionnant que j'ai eu l'occasion de visiter) on a retrouvé des poteries qui ont été datées à 2 millénaires avant J-C.
Si il y a eu une influence du sud de l'Italie dans le style géométrique des motifs, il reste que les populations berbères autochtones on développé leur propre style (motifs figuratifs : végétaux, oiseaux, astres etc...).
 
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La cartographie potière est plus imaginative que scientifique.
 
Ce style de poterie est bien antérieur aux romains et au Limes.
A Tiddis ( site archéologique numide/libyque impressionnant que j'ai eu l'occasion de visiter) on a retrouvé des poteries qui ont été datées à 2 millénaires avant J-C.
Si il y a eu une influence du sud de l'Italie dans le style géométrique des motifs, il reste que les populations berbères autochtones on développé leur propre style (motifs figuratifs : végétaux, oiseaux, astres etc...).
Bien-sûr on en trouve aussi de ces poteries du néolithique dans le Rif de plusieurs milliers d'années , maintenant c'est vrai que les historiens et archéologues français du maghreb du 20eme siècle adoptaient souvent une posture ethnocentriste en recherchant une influence externe par sentiment de supériorité ...
 
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