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"Ce que j'ai à dire sur les SDF", par Martin Hirsch
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[QUOTE="FPP75, post: 5074559, member: 143861"] Il paraît absurde de dire que depuis le temps que l'on parle des SDF, qu'on y consacre rapports et reportages, il faille encore enquêter et produire des connaissances. Mais c'est la réalité, en partie liée à la difficulté des enquêtes, en partie parce qu'il y a une part de connaissance qui dérange... Cela ne veut pas dire qu'il faut des années pour affiner le diagnostic. C'est une affaire de quelques mois et d'ailleurs certaines enquêtes ont déjà été lancées. Cela veut dire qu'il faudra bien prendre en compte la question - souvent occultée - de la proportion de personnes en situation irrégulière, sans la traiter d'une manière qui se retournerait contre des personnes vulnérables qu'il faut aider et non pas chasser, ignorer ou maintenir dans un état de semi-clandestinité. La deuxième orientation, c'est d'énoncer clairement des objectifs adaptés à chaque problématique assortis d'une stratégie de programmation des moyens cohérente avec chacun de ses objectifs et les mesurer. Accroître le taux de sortie des travailleurs pauvres de l'hébergement d'urgence vers le logement durable. Réduire le non-recours aux soins, notamment en matière de santé mentale. Assurer que tous ceux qui relèvent des procédures de la loi DALO (droit au logement opposable) y ont bien eu accès. Améliorer le taux de prise en charge en sortie d'hôpital, de prison, d'aide sociale à l'enfance. Mieux prévenir le passage de l'expulsion à la rue. Cela conduira à distinguer plus nettement, comme le préconise notamment Julien Damon, ce qui relève du "sans-abrisme" de ce qui relève du "mal-logement", ce qui appelle des réponses différentes, sauf à essuyer échecs, refus et rechutes. La troisième orientation consisterait à prendre à bras-le-corps la spécificité des problèmes de l'agglomération parisienne. En région parisienne, les dispositifs d'hébergement sont, plus qu'ailleurs, otages de deux tensions : satisfaire aux besoins des personnes sans abri et pallier l'insuffisance de logement social et singulièrement de logement très social. Le rythme de résorption du retard est manifestement trop long. Il souffre de ce que certaines communes préféreraient que l'effort ne soit porté que par leurs voisines, de ce que les procédures sont complexes, les mécanismes de financement si partenariaux que leur montage est interminable, les coûts trop élevés... La nécessité de repenser la gouvernance du "Grand Paris" ou même du "Très Grand Paris" s'applique avec une particulière acuité pour la question du logement et de l'hébergement, de manière aussi criante que dans les années 1960, quand avaient été lancées les villes nouvelles. C'est ce qu'appelle de ses voeux le maire de Paris quand il demande que l'effort de prise en charge soit mieux réparti avec la périphérie, et c'est l'ambition du président de la République quand il a identifié au sein du gouvernement un chantier spécifique pour la région-capitale. Il faudrait pouvoir répondre à un problème d'une ampleur et d'une complexité exceptionnelles par des procédures exceptionnelles. Une programmation des besoins sur l'ensemble de la région, avec un équilibre de contraintes et d'incitations, devrait être réalisée sous l'égide de l'Etat qui, après avoir procédé aux concertations nécessaires, pourrait avoir recours à la loi pour imposer ce qui ne se ferait pas spontanément et mettre en place des procédures ultrarapides dérogatoires au droit commun. La loi permettrait de gagner du temps sur les délais imposés par les procédures classiques, notamment en matière d'urbanisme. La quatrième orientation... c'est de financer ces besoins en les intégrant dans les mesures de relance, au même titre que les grands travaux d'infrastructure. L'effort nécessaire pour le logement social et l'hébergement, c'est probablement l'équivalent de 100 à 200 km de ligne TGV... Le grand chantier du logement social, notamment en région Ile-de-France, y trouve toute sa place et les financements qui peuvent lui être consacrés sont un véritable investissement pour l'avenir et une manière utile de soutenir le secteur du BTP en temps de crise. La cinquième orientation serait de repenser la prise en charge des personnes sans abri dans le cadre d'un véritable service public. Cela obligerait à mettre de l'ordre dans un système d'une complexité déroutante et d'une cohérence douteuse. Les associations deviendraient délégataires de ce service public, pour une partie de leur activité. Cette organisation permettrait d'avoir une vision sur l'ensemble des places disponibles pour pouvoir mieux gérer l'accueil d'urgence. Elle conduirait à mieux coordonner les maraudes, pour ne pas laisser des zones non couvertes, ou pallier les inconvénients de méthodes parfois hétérogènes. Cela induirait de clarifier les conditions de financement des différents acteurs, notamment associatifs, en corrigeant les écarts parfois importants et non expliqués que relève la Cour des comptes, tout en donnant une meilleure visibilité aux organismes qui courent après leurs subventions. La sixième orientation, c'est de développer le recours à l'intermédiation locative, approche quantitativement plus importante que la réquisition. Elle consiste, rappelons-le, à ce qu'un propriétaire puisse être sécurisé en louant à un intermédiaire - association ou organisme public - qui sous-loue à une personne fragile en endossant le risque. Quelques milliers de logements supplémentaires pourraient être ainsi mobilisés rapidement. La septième orientation serait d'élargir la réponse aux besoins des personnes sans domicile au développement d'activités rémunérées, qui contribuent à leur projet de vie. Cette dimension est souvent ignorée. A tort. Après l'épisode du canal Saint-Martin, Emmaüs avait pris conscience de l'insuffisance des réponses dans ce domaine. Cela avait conduit à créer une nouvelle association proposant du travail aux ex-campeurs. Activités de récupération, de ramassage, de vente, qui ont permis à une cinquantaine de personnes de rebâtir un projet personnel. Des "charity shops" peuvent être créées, associant bénévoles et personnes en difficulté. D'autres activités peuvent être développées dans l'entretien de l'espace public, C'est une dimension essentielle à prendre en compte. Elle peut être d'autant mieux traitée que la loi généralisant le revenu de solidarité active (RSA) et réformant les politiques d'insertion a officialisé un statut de "travailleur solidaire", inspiré des communautés d'Emmaüs. Ce statut est particulièrement adapté à des personnes désocialisées, qui auraient du mal à souscrire d'emblée un contrat de travail mais qui peuvent, pour certaines d'entre elles, envisager une activité très réduite, souple, adaptable en fonction des capacités de chacun. Huitième orientation : renforcer l'effort vers les zones où les sans-abri se cachent. Les drames du bois de Vincennes sont révélateurs d'un phénomène émergent et s'aggravant, même s'il ne date pas d'hier et qu'il a commencé à être pris en compte, avant les morts de ces dernières semaines. D'autres bois, des bordures de boulevard périphérique sont devenus des lieux de rassemblement d'une nouvelle forme de "sans-abrisme". Quelle est la signification de cette volonté de se cacher ? Echapper à une certaine forme de violence ? Eviter le harcèlement ? Est-ce pour certains un premier pas pour sortir de la rue ? Est-ce une manière de trouver une plus grande organisation collective ? Cela ne peut s'observer de loin. Neuvième orientation : mieux prendre en compte les problématiques spécifiques des jeunes. Le fonds d'expérimentation en faveur des politiques sociales à l'égard des 18-25 ans, qui vient d'être créé pourrait être rapidement mis à contribution à cette fin. La dixième orientation préconisée est de continuer à traiterles controverses par des méthodes de consensus, y compris par des conférences citoyennes de consensus, qui pourraient être organisées au début de l'année 2009 pour que ceux qui ne sont pas familiers avec ces enjeux, souvent confisqués par les techniciens et les experts, puissent se forger leur opinion. Il y a quelques années, on égrenait inexorablement les morts de la route. Il y a eu un déclic, une mobilisation sans précédent, qui a permis de renverser une tendance que l'on croyait irréversible. Le nombre de morts sur la route a été divisé par deux. Si on commençait à faire de même avec les SDF, ce ne serait pas si mal... Est-ce vraiment un objectif plus inaccessible ? [/QUOTE]
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"Ce que j'ai à dire sur les SDF", par Martin Hirsch
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