Collègues handicapés harcelés, insultes racistes et glorification de la violence: 30 agents du SPF Justice risquent la prison

belgika

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Ils devraient faire ça plus souvent, et si possible par quatre ou cinq à la fois”:


Voilà les propos tenus par des agents de police dans un groupe Whatsapp au sujet d'un musulman qui avait été incinéré par accident.




Ces propos racistes ne sont pas un fait isolé: à une autre occasion, les policiers ont commenté une information sur le gagnant non blanc d’un marathon.



“Ils courent quand même vite, ces bronzés.



À force de voler des sacoches!”, lit-on, entre autres propos indignes.


Des discussions qui sont remontées jusqu’au parquet d’Anvers, qui a décidé d’enquêter sur ce groupe et de renvoyer devant le tribunal trente agents de police et de surveillance pour harcèlement répété sur des collègues.


Quinze d’entre eux devront répondre de propos racistes.


Le parquet d’Anvers demande ce jeudi à la Chambre du conseil le renvoi devant le tribunal correctionnel de trente membres du corps de sécurité du SPF Justice (qui est chargé de la surveillance et du transfert des détenus) pour infractions à la loi relative au harcèlement.



Mais ce n’est pas tout: le parquet veut aussi que la moitié des agents incriminés soient poursuivis pour racisme.


En cause: des groupes et conversations privés sur la messagerie Whatsapp dans lesquels des policiers et gardiens ont tenus des propos inappropriés, souvent à caractère raciste.



Selon les informations de nos collègues d’Het Laatste Nieuws, l’instance devrait remettre sa décision à plus tard.


Les avocats de la défense auraient déjà fait savoir qu’ils voulaient des devoirs d’enquête complémentaires.

Malaise d'un membre du groupe​

Le dossier trouve sa source en 2017.


Un policier avait alors tiré la sonnette d’alarme auprès de ses supérieurs hiérarchiques.


Il avait été ajouté à un grand groupe Whatsapp dans lequel il avait été choqué de constater que ses collègues proféraient des propos selon lui à la limite du racisme et des discours haineux.



Cette “chaîne Whatsapp” n’avaient pas été créée afin de véhiculer des propos discriminants, mais bien pour l’organisation interne au SPF Justice de détails pratiques des transferts de détenus vers le tribunal.


Selon le ministère public, la discussion a rapidement pris un tournant bien différent, avec des propos humiliants envers les détenus et une certaine glorification de la violence à leur encontre.


"Quand je lui ai fait une prise, son épaule a un peu craqué.


C’était un peu comme quand tu craques une branche”, s’amuse l'un d’eux.

Ce n’est pas tout.



Des collègues des agents incriminés étaient également les boucs émissaires du groupe et victimes d’insultes, particulièrement ceux qui étaient issus de l’immigration.



Des remarques désobligeantes et réductrices sur leur couleur de peau ou origine, mais aussi des explications sur la manière dont ils changeaient leurs shifts de travail pour être sûrs de ne pas travailler avec des collègues “allochtones”.

Un agent qui souffre d'un tic nerveux faisait quotidiennement l’objet d’imitations de la part de ses collègues. Dans le groupe Whatsapp, ils s’amusaient d’une vidéo de l’homme qui tremblait et sursautait

Enquête interne​

Après que ces faits gênants ont été dévoilés, captures d’écran à l’appui, la police locale d’Anvers a engagé une procédure interne.



Les résultats de l’enquête ont finalement été transmis au parquet anversois qui a désigné un juge d’instruction.


Celui-ci était chargé de déterminer s’il y avait assez d’éléments prouvant qu’il y a bel et bien infraction à la loi relative au racisme et à la discrimination et si les policiers et gardes incriminés s’étaient rendus coupables de harcèlement dans le cadre de leurs fonctions.



Un agent de sécurité, qui avait entre-temps été muté, avait lui déposé plainte pour un harcèlement répété sur son lieu de travail.

Notes de services déchirées​

Un autre plaignant qui a émergé en cours d’enquête explique comme il est devenu la “tête du Turc” du service parce qu’il travaillait à temps partiel.


Ces harceleurs allaient jusqu’à déchirer ses notes de service “parce que tu ne prestes quand même qu’à mi-temps”.


Plus grave encore, un membre du personnel souffrant d'un bras défaillant s’est entendu dire par un collègue qu’il “ne collaborait pas avec les handicapés”.


L’agent en question échangeait donc systématiquement ses horaires pour être sûr de ne pas faire équipe avec une personne moins valide.

Le dossier évoque aussi un collègue victime de tics nerveux qui faisait l’objet de railleries et imitations quotidiennes au bureau.









 

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Une vidéo avait même été partagée dans le groupe Whatsapp et ses membres s’amusaient de l’homme qui tremblait ou sursautait nerveusement bien malgré lui.



Enfin, un collègue excédé qui avait décidé de quitter le corps anversois pour rejoindre celui d’Ypres a également été victime d'une expédition punitive sur internet après son départ.


Ses anciens acolytes ont même envoyé des photos à ses nouveaux collègues, l’une avec Anvers en fête de son départ et l’autre avec Ypres déprimée d’accueillir ce nouvel effectif.

“Singes bronzés”​

Dans ce groupe de messagerie instantanée regroupant tant des policiers que des gardiens, les jugements de valeur et les propos racistes étaient légion.



“Si on était des migrants, on aurait du respect pour le pays qui nous accueille, on apprendrait la langue, on travaillerait et subviendrait à nos propres besoins.



Ces gens ne font rien d’autre que geindre et se plaindre que le wifi est trop lent ou la nourriture trop peu variée.


Ils laissent des crasses partout derrière eux et ils agressent nos femmes et nos enfants.



Qu’elles crèvent toutes, ces saletés”, lance même l’un des membres dans une diatribe contre l’immigration.

Et il n’est pas le seul à partager cet avis, à en croire la teneur des discussions entre fonctionnaires de police et agents de surveillance.


Même les sportifs de haut niveau n’ont pas grâce à leurs yeux et sont réduits à leur couleur de peau voire traités de “voleurs de sacoches allochtones” qui ont appris à “courir vite” en s’enfuyant après leurs méfaits.


Ce à quoi un autre répond: “Moi, je ne fais pas de transfert avec des singes bronzés”.

“C’est un dossier d'une ampleur assez unique”​

Pour l'instant, trois des victimes identifiées ont décidé de se porter parties civiles dans l’affaire.


Mais la Ligue des droits de l’homme s’est également ajoutée à la liste après avoir pris connaissance du dossier, confirme Jos Vander Velpen, avocat de l’association.


Il explique: “Il est exact que le renvoi de trente personnes devant le tribunal correctionnel a été demandé.


Ce n’est pas rien et c’est même assez unique. Rien que cela traduit la gravité de l’affaire. Mais je ne peux pas m’exprimer sur les détails du dossier, qui est encore sous le coup du secret de l’instruction”.

Le fait que le parquet ait opté pour un traitement en correctionnelle est lourd de conséquences pour les suspects, qui encourent des peines d’un an de prison pour entrave à la loi contre le racisme.



Le harcèlement sur le lieu de travail peut même conduire à des peines allant jusqu’à trois ans.


Et plusieurs des agents impliqués dans ce lourd dossier sont aussi visés par une enquête pour discrimination mais celle-ci sera traitée - et éventuellement jugée - séparément.


Le fait que les suspects sont des fonctionnaires de police et du SPF Justice ne jouera pas en leur faveur.



 
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