"FLIC" : le récit très sombre d'un journaliste infiltré au sein de la police française

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Le journaliste Valentin Gendrot a passé deux années en immersion dans la police française, témoin de la violence, du racisme, du manque de moyen et de formation.​

Que se passe-t-il derrière les murs des commissariats ? Comment travaillent réellement les policiers en France ? C'est une plongée dans un univers où aucun journaliste n'avait encore pu s'immerger à ce point que propose le livre "Flic".

Valentin Gendrot, son auteur, a infiltré la police deux années durant dont six mois dans un commissariat parisien. Il raconte les difficultés du métier et les dérives violentes d'une partie de ces anciens collègues.

"J'aborde dans mon livre "Flic" les grands tabous de la police qui sont les violences policières et le mal-être policier. C'est représentatif parce que je dépeins un univers qui est violent et anxiogène. (...) C'est des conditions de travail dégradées, pas de moyens, des effectifs par forcément suffisants... De l'autre côté, les victimes des violences policières racontent aussi les abus d'une minorité de policiers. Donc oui, c'est représentatif", témoigne Valentin Gendrot.

Un ouvrage qui interroge aussi sur le racisme au sein des forces de l'ordre. Dénoncé depuis des années par des militants des quartiers populaires, la question est aujourd'hui particulièrement sensible notamment depuis les manifestations Black Lives Matter en France.

Alors, certains policiers ont-ils des préjugés racistes et cela les influence-t-il dans leur mission ? Pour Valentin Gendrot, la réponse est clairement oui.

"Un jour on fait un contrôle routier ; on regarde des voitures passer et on décide de contrôler des voitures et pas d'autres. A un moment un policier dit, en voyant deux hommes noirs passer, "contrôlons cette voiture, il y a deux bâtards à l'intérieur". Evidemment ces deux jeunes hommes noirs ont été contrôlés et sont repartis parce qu'ils étaient en règle. Ils n'ont été contrôlés que parce qu'ils étaient noirs (...) Si les deux personnes avaient été deux jeunes hommes blancs, il est très probable qu'ils n'auraient pas été contrôlés".

Depuis la parution de "Flic", Valentin Gendrot a été accusé notamment sur les réseaux sociaux d'avoir couvert des bavures racontées dans son livre.
C'est le cas du passage à tabac d'un adolescent de 16 ans. Mais pour lui, sa décision a été dictée par les besoins de son infiltration.



J'ai fait un choix qui est celui d'un journaliste qui a accès à toute une bavure policière, qui peut tout raconter, qui peut même raconter comment des policiers peuvent se protéger pour échapper à la sanction puisque ce qui a été fait ce jour-là est quelque chose de très grave", analyse-t-il.

Le parquet de Paris a déclaré ouvrir une enquête sur les faits dépeints dans le livre, certains pourraient être qualifiés pénalement. A ce stade, les fonctionnaires de police mis en cause n'ont pas été identifiés.


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Une policière s'adresse à une collègue maghrébine: "Moi je dirais bougnes de *****. Toi tu es un bougne de *****, voilà"

L'Oeil du 20h a recueilli la parole de policiers victimes de racisme au sein de l'institution.


Au cours de notre enquête, nous avons échangé avec une dizaine de policiers dénonçant des faits de racisme. Beaucoup ont refusé de témoigner face caméra, par peur des représailles. "Si vous parlez, vous êtes face à un rouleau compresseur", nous assure l'un d'entre eux. "Dans la police, on ne dénonce pas ses collègues", ajoute un autre.

Ceux qui ont finalement accepté de prendre la parole l’ont fait à une condition : rester totalement anonyme.

Par la suite, tout au long de sa carrière, les incidents de ce genre auraient continué selon lui.

Un jour, un chef de service m’a proposé de passer le bloc OPJ, le bloc d’officier de police judiciaire et en mon absence un collègue du groupe a dit : “il fait passer le bloc OPJ à un arabe et pas à moi, le Français de souche”.
Un ancien policier

Il ajoute une autre anecdote : "Lors de l’apéritif il y a quelques années, une collègue avait acheté du jambon halal. Eh ben un autre collègue n’a rien trouvé de mieux à faire que de prendre une tranche de jambon traditionnel et la frotter contre la tranche de jambon halal."

Cet ancien policier n’a jamais fait de signalement officiel pour ne pas être, dit-il, mis au ban par ses collègues. Mais il a fini par quitter l’institution, écoeuré par ces comportements : "J’en ai énormément souffert parce que j’aime trop ce métier. On épouse les valeurs, on porte l’uniforme, on est prêts à mettre nos vies en jeu, et une minorité de collègues nous considère comme des sous-policiers."

"Ton nom de famille, c'est un bon nom de bougnoule"​

Confrontée à des agissements similaires, cette autre policière a elle franchi le pas, et a décidé de porter plainte. D’origine maghrébine, elle raconte être en train de quitter l’institution après une longue dépression. Dans son dépôt de plainte, elle a détaillé des propos tenus par certains de ses collègues : “ton nom de famille, c’est un bon nom de bougnoule”, ou encore : “t’as un nom de bougnoule, mais comme t’as une tête de Mexicaine, ça passe”.

Elle décrit des dérapages verbaux fréquents, qu’elle finit par ne plus supporter : "Un jour dans la voiture, je m’énerve un peu, j’explique que “bougnoule” ca ne me va pas du tout et il se mettent à rigoler, et ils disent “si bougnoule ça ne te plaît pas, on n’a qu’à dire bicot ou melon.”

Pour garder une preuve de ces propos pénalement répréhensibles, elle décide, un autre jour, d’enregistrer avec son téléphone les propos tenus par ses collègues.

Elle vient de leur demander de ne plus employer de terme racistes, mais ils poursuivent la discussion devant elle. Voici ce qu'on entend dans l'enregistrement, que nous avons récupéré :
Quand je dis "bougnoule", c’est les arabes bâtards, ça veut dire en gros un sale arabe. Pour résumer les choses, ca va être un bougnoule. Un arabe de cité quoi.
Un policier

Une policière enchérit : "Moi, je dirais bougnes de *****.Toi t’es un bougne de *****, voilà."

Le premier policier assure alors que le terme "bougnoule", à l'origine, "n'est pas péjoratif'. Il ajoute : "mais vu que toutes ces ethnies-là se sentent victimisées, c’est devenu péjoratif."

"A partir du moment où j'ai osé parler, j'ai été harcelée"​

Après cet enregistrement, cette policière décide de faire un signalement auprès de l’IGPN, l’inspection générale de la police nationale.

Elle raconte que l’ensemble de ses collègues se sont alors retournés contre elle et assure ne pas avoir été soutenue par sa hiérarchie. Elle raconte : "A partir du moment où j’ai osé parler, j’ai été harcelée. J’ai changé de commissariat et j’ai été considérée comme la balance. La chef de ma nouvelle brigade a dit à mes collègues de ne pas me parler. On m’a crevé les pneus."

Elle conclut : Si on ose parler, on peut penser à une reconversion.
A la suite de son signalement auprès de l’IGPN, elle affirme qu’une de ses collègues a bien été sanctionnée. Sa plainte pour injures raciales a elle en revanche été classée sans suite.


Stéphane Lemercier, capitaine de police

 
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Un rapport sur le racisme "enterré"​

Un rapport sur ce thème a en revanche été réalisé en 2021 par le conseil scientifique de la DILCRAH, la délégation interministérielle de lutte contre le racisme.

Voici ce qu’on peut notamment y lire : “Qu’il y ait des policiers racistes au sein de la police française et que cela se traduise par des comportements [...] pénalement condamnables, cela ne fait pas l’ombre d’un doute.”

Cette note n’a jamais été rendue publique par les autorités. Nous avons contacté deux de ses auteurs. Ils affirment ne pas comprendre pourquoi ce rapport a été selon eux passé sous silence :
Ce rapport a été enterré. Cela nous a surpris. Il aurait dû y avoir des conséquences, il n’y en pas eu.
Anna Zielinska, co-autrice du rapport

La DILCRAH assure que cette note a bien été adressée aux autorités concernées. Contacté à deux reprises, le ministère de l’Intérieur ne nous a pas répondu sur ce point.

Un gradé brise le silence​

Dans les rangs de la police nationale, rares sont les gradés qui osent dénoncer ces comportements et briser le silence. Stéphane Lemercier est capitaine. C’est un ancien syndicaliste. Selon lui, la parole raciste, bien que minoritaire, serait décomplexée dans certaines brigades.

Il explique : "Moi-même j’en ai été témoin régulièrement, et j’ai pas honte de le dire, j’ai pas toujours réagi en disant à la personne qui tenait ce genre de propos que c’était pas correct. La difficulté c’est que dénoncer ce genre de pratiques auprès de la hiérarchie, ce n'est pas toujours très bien perçu."

Stéphane Lemercier ajoute :
C’est une question taboue et il y a un déni au niveau de la hiérarchie policière.

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Police : l’inquiétante chute du niveau des nouvelles recrues​

PODCAST. Des formateurs s’inquiètent du niveau de plus en plus faible des candidats au concours, parfois admis avec une moyenne de 8 sur 20. Dans Code source, on vous explique pourquoi l’Île-de-France particulièrement touchée par ce phénomène.


Chrisky en tant qu''avocat commis d'office des FDO sur ce forum , n'est pas prêt d'être au chômage !
Il va devoir redoubler d'imagination pour leur trouver excuses et circonstances atténuantes !
 
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