MARIANNE
La triche des riches
Les patrons indélicats qui ne déclarent pas leurs salariés sont à l'origine de 79 % des 10 à 20 milliards d'euros annuels de fraudes à la Sécu.
Mieux, sans cette tricherie massive, quasi banalisée, les comptes sociaux de la nation seraient à l'équilibre !
Telles sont les conclusions édifiantes du dernier rapport parlementaire sur la fraude aux prestations et cotisations sociales.
Ainsi, près de 12 % des patrons, notamment dans le BTP et le textile, seraient en infraction puisque au moins 5 % de leurs troupes oeuvrent au noir. Au regard de cette gigantesque arnaque aux prélèvements, les fraudes estimées aux prestations (allocations familiales, chômage et RSA) seraient cinq fois moindres.
« Les pouvoirs publics ne se sont jamais sérieusement attaqués au travail au noir parce que l'on n'y décelait qu'une petite triche permettant à de petites gens de se débrouiller, estime le député UMP Dominique Tian, rapporteur de cette mission.
En réalité, c'est le champ d'action de bandes organisées qui faussent toute la concurrence. » Or, les redressements pour travail illégal ne représentent qu'entre 1,5 et 2,9 % de la fraude présumée ! Proche du Medef, la droite veut-elle lutter contre les patrons voyous ? Elle devra alors se montrer moins frileuse.
En effet, dès 2006, Dominique Tian préconisait la création d'un fichier de dirigeants condamnés pour abus de biens sociaux ou fraude aux prélèvements. Sans être suivi. A la même époque, son collègue Pierre Morange imposait par la loi l'interconnexion de fichiers sociaux. Las, le décret d'application de ce texte n'a été publié qu'en 2010 ! Cette fois, le président de la Mission d'évaluation des comptes de la Sécurité sociale (Mecss) prêche pour l'instauration d'une procédure de « flagrance sociale » qui permettrait aux limiers de l'Urssaf de dresser des procès-verbaux dès qu'ils détectent du travail au noir.
Une urgence tant « nous avons l'impression de donner des coups d'épée dans l'eau », a déploré devant les députés le directeur des Urssaf de Paris, en incriminant une procédure longue qui laisse tout loisir aux entreprises de disparaître. « Jusqu'à une date récente, la lutte contre les fraudes n'a pas fait l'objet d'investissement de temps et de moyens à la hauteur de l'enjeu », a reconnu le directeur de la Caisse nationale d'assurance vieillesse, Pierre Mayeur. Or, au niveau de l'Etat, la Délégation nationale de lutte contre la fraude ne comprend que 14 personnes ! « Je ne vois pas comment on peut conjuguer la lutte contre la fraude et le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux », doute le parlementaire PS Jean Mallot.
Dominique Tian, député UMP, rapporteur de la mission sur la fraude aux prestations et cotisations sociales. Le travail au noir est « le champ d'action de bandes organisées qui faussent toute la concurrence ».
PAR LAURENCE DEQUAY
La triche des riches
Les patrons indélicats qui ne déclarent pas leurs salariés sont à l'origine de 79 % des 10 à 20 milliards d'euros annuels de fraudes à la Sécu.
Mieux, sans cette tricherie massive, quasi banalisée, les comptes sociaux de la nation seraient à l'équilibre !
Telles sont les conclusions édifiantes du dernier rapport parlementaire sur la fraude aux prestations et cotisations sociales.
Ainsi, près de 12 % des patrons, notamment dans le BTP et le textile, seraient en infraction puisque au moins 5 % de leurs troupes oeuvrent au noir. Au regard de cette gigantesque arnaque aux prélèvements, les fraudes estimées aux prestations (allocations familiales, chômage et RSA) seraient cinq fois moindres.
« Les pouvoirs publics ne se sont jamais sérieusement attaqués au travail au noir parce que l'on n'y décelait qu'une petite triche permettant à de petites gens de se débrouiller, estime le député UMP Dominique Tian, rapporteur de cette mission.
En réalité, c'est le champ d'action de bandes organisées qui faussent toute la concurrence. » Or, les redressements pour travail illégal ne représentent qu'entre 1,5 et 2,9 % de la fraude présumée ! Proche du Medef, la droite veut-elle lutter contre les patrons voyous ? Elle devra alors se montrer moins frileuse.
En effet, dès 2006, Dominique Tian préconisait la création d'un fichier de dirigeants condamnés pour abus de biens sociaux ou fraude aux prélèvements. Sans être suivi. A la même époque, son collègue Pierre Morange imposait par la loi l'interconnexion de fichiers sociaux. Las, le décret d'application de ce texte n'a été publié qu'en 2010 ! Cette fois, le président de la Mission d'évaluation des comptes de la Sécurité sociale (Mecss) prêche pour l'instauration d'une procédure de « flagrance sociale » qui permettrait aux limiers de l'Urssaf de dresser des procès-verbaux dès qu'ils détectent du travail au noir.
Une urgence tant « nous avons l'impression de donner des coups d'épée dans l'eau », a déploré devant les députés le directeur des Urssaf de Paris, en incriminant une procédure longue qui laisse tout loisir aux entreprises de disparaître. « Jusqu'à une date récente, la lutte contre les fraudes n'a pas fait l'objet d'investissement de temps et de moyens à la hauteur de l'enjeu », a reconnu le directeur de la Caisse nationale d'assurance vieillesse, Pierre Mayeur. Or, au niveau de l'Etat, la Délégation nationale de lutte contre la fraude ne comprend que 14 personnes ! « Je ne vois pas comment on peut conjuguer la lutte contre la fraude et le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux », doute le parlementaire PS Jean Mallot.
Dominique Tian, député UMP, rapporteur de la mission sur la fraude aux prestations et cotisations sociales. Le travail au noir est « le champ d'action de bandes organisées qui faussent toute la concurrence ».
PAR LAURENCE DEQUAY