Mais, quel que soit l'objet de l'appétit de l'homme ou de son désir, c'est, pour sa part, ce qu'il nomme bon, et l'objet de sa haine et de son aversion, il le nomme mauvais[1]. L'objet de son mépris, il le nomme sans valeur et insignifiant[2]. Mais l'utilisation de ces mots de bon, mauvais, et méprisable se fait selon la personne qui la pratique [3]. Il n'existe rien qui soit ainsi, simplement et absolument, ni aucune règle commune du bon et du mauvais qu'on puisse tirer [4] de la nature des objets eux-mêmes, car cette règle [5] vient de l'individualité de l'homme, là où il n'y a pas de République [6], ou, dans une République, d'une personne qui le représente, ou d'un arbitre, d'un juge [7] que les hommes en désaccord établissent par consentement [8], et dont la sentence constitue la règle du bon et du mauvais.
[1] "good" et "evil". Bon et mauvais, bien et mal (ces deux derniers termes étant choisis par R. Anthony). (NdT)
[2] "vile and inconsiderable". R. Anthony : "vil et indigne d'être pris en considération". (NdT)
[3] Phrase simple mais difficile à rendre clairement :"For these words of good, evil, and contemptible are ever used with relation to the person that useth them". La suite indique le sens. (NdT)
[4] G. Lyon (La philosophie de Hobbes, Paris, Alcan, 1893, p.115) : "qui puisse être empruntée". (NdT)
[5] R. Anthony : "une mesure". La version latine donne "regula". (NdT)
[6] "Commonwealth". (NdT)
[7] "an arbitrator or judge". (NdT)
[8] "by consent". (NdT)