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VIB
(De Tel Aviv) En cette fin daprès-midi estivale à Tel Aviv, à lheure où les touristes profitent du coucher du soleil en flânant sur le front de mer, Suleyman retrouve ses amis dans le square Lewinsky, une aire de jeu des quartiers sud de la capitale.
Ils sont nombreux à se rendre ici quotidiennement pour profiter dun repas distribué par les ONG du quartier. Alors que tout le monde patiente en attendant le début de la distribution, Suleyman sévertue à me conter avec précision la longue et périlleuse route qui la mené jusquici.
Arrêté par la police française et expulsé
Tout commence en 2004 au Darfour, dans cette région du Soudan ravagée par une guerre civile qui fait rage depuis plus dun an à lépoque. Face à
la multiplication des attaques contre son village, il choisit le chemin de lexil,
espérant ainsi retrouver la paix. Direction le Caire, puis Tripoli où il travaillera
pendant deux ans, le temps de réunir largent nécessaire pour tenter sa chance vers lEurope. Son objectif est de rejoindre Londres où des membres de sa famille ont obtenu lasile politique.
En 2006, il embarque sur un vieux bateau où sentassent plus de 120 passagers venus dAfrique subsaharienne et du Maghreb. Après deux jours de traversée, les côtes françaises se dessinent enfin à lhorizon. Depuis le
sud de la France, Suleyman poursuivra son voyage jusquà Arras. Avec laide
dassociations locales, il dépose une demande dasile qui lui sera refusée quelques mois plus tard.
Commence alors pour lui une vie de clandestin rythmée par les tentatives ratées de rejoindre lAngleterre et les séances de cache-cache avec la
police. Le moment tant redouté de larrestation arrive à la fin de lannée 2007 :
« La police française ma arrêté à Arras. Jai ensuite été enfermé quelques jours avant dêtre expulsé vers Khartoum. Quand je suis descendu de lavion, la police soudanaise ma directement mis en prison pour avoir sollicité lasile en France. Je suis resté enfermé deux mois avant dêtre libéré. »
Israël par la terre
A partir du milieu des années 2000, avec le durcissement des politiques
migratoires de lUnion européenne et la multiplication des contrôles visant à
stopper les bateaux reliant les côtes dAfrique du Nord à lEurope, Israël est
progressivement devenue une alternative de choix pour des milliers de réfugiés africains, principalement originaires du Soudan et dErythrée.
De retour au Soudan, Suleyman entend parler dIsraël comme dun pays démocratique, un endroit où règne la paix, où les offres demploi sont nombreuses et où les réfugiés sont les bienvenus. Il pense déjà à
repartir, ce quil fera cinq mois plus tard :
« Je ne souhaitais pas retourner en Europe. Javais peur de retraverser la mer. Prendre tous ces risques pour être expulsé une nouvelle fois, ça nen valait pas vraiment la peine. A linverse de lEurope, Israël est facilement accessible par la route et on nexpulse pas les gens venus du Darfour. »
Depuis Khartoum, il lui faudra moins dune semaine pour poser le pied
en Israël :