Indemnité pour perte d'emploi : l'Etat met 250 MDH mais...

L'Etat ne participe qu'au démarrage du dispositif avec un fonds d'amorçage qui ne couvre même pas la moitié du coût annuel minimal. Les syndicats veulent une participation symbolique des salariés alors que la CGEM parle d'une contribution à hauteur de 0,38% de la masse salariale.


Elle est prévue dans le nouveau code du travail promulgué en 2004, et elle est au menu du dialogue social depuis 2006. Et néanmoins, elle tarde à voir le jour. «Elle», c’est l’indemnité pour perte d’emploi (IPE). Sans être tout à fait une caisse d’allocation chômage, comme il en existe dans certains pays, notamment ceux avancés, l’IPE est conçue, dans le cas du Maroc, comme un dispositif pouvant amortir quelque peu le choc des licenciements, en particulier ceux dits économiques.

Fortement réclamée par le patronat d’abord, qui y voyait une opportunité pour favoriser la mobilité sans que cela engendre trop de difficultés pour les salariés concernés, l’IPE reste aujourd’hui…orpheline de financement.
Une fois de plus, cette indemnité a fait partie du paquet de mesures décidées lors de la dernière réunion du dialogue social du 26 avril 2011, mais elle n’est pas d’application immédiate. Il faut encore réfléchir, se réunir, selon la Confédération générale des entreprises du Maroc. Peut-être la question sera-t-elle tranchée lors de la prochaine réunion du Conseil d’administration de la CNSS !

Pourtant, contrairement aux précédentes sessions du dialogue social, où les partenaires sociaux réclamaient au gouvernement qu’il prenne une part dans le financement du dispositif, cette fois-ci ce «blocage» qui servait en fait de prétexte est désormais levé : l’Exécutif, annonce Jamal Rhmani, ministre de l’emploi, s’est en effet engagé à mettre 250 millions de DH comme fonds d’amorçage pour la mise en place de l’IPE. Du coup, la balle se trouve désormais dans les camps des partenaires sociaux (syndicats et patronat).

Un membre de la Confédération démocratique du travail (FDT) confie que le sujet sera évoqué lors de la réunion sur les conventions collectives qui devait se tenir mardi 3 mai, mais sans plus de précision. S’il fallait interpréter les propos de Mohamed Horani, président de la CGEM, dans une déclaration faite à La Vie éco, lundi 2 mai, le patronat ne veut pas précipiter les choses dans le sens où il cherche surtout à créer une structure pérenne.

Autrement dit, le fonds d’amorçage décidé par le gouvernement est évidemment une bonne chose pour lancer la machine, mais le plus important est d’assurer la suite. Et la suite, dans ce cas de figure, ce seront les cotisations salariales et patronales.
 
Coût annuel de l’IPE : entre 590 MDH et 790 MDH par an

En fait, le fonds d’amorçage ne paraît pas devoir suffire même pour une année de fonctionnement du dispositif. Selon le ministère de l’emploi, selon que l’on retienne l’un ou l’autre des scénarios de financement proposé par la CNSS (voir encadré), le coût annuel sera de 590 MDH, 660 MDH ou 790 MDH. Le problème est que l’on ne sait pas encore qui paiera quoi.

Et précisément, le blocage se niche à ce niveau : la CGEM s’est déjà exprimée sur ce point, estimant que sa quote-part dans le financement du dispositif ne peut pas aller au-delà de 0,38% de la masse salariale, tandis que les syndicats ont longtemps revendiqué au mieux une participation symbolique des salariés. Or, avec l’option du gouvernement pour un fonds d’amorçage, il est clair que le financement pérenne de l’IPE sera nécessairement supporté par les salariés et l’entreprise. Et cela donnera certainement lieu à des tiraillements entre le patronat et les syndicats lors des prochaines rencontres. En tout cas, et comme cela peut être observé un peu partout, le financement de ce type de dispositif est généralement bipartite, assuré par les entreprises et les salariés. C’est le cas, à titre d’exemple, en Grèce et en Algérie où la part la plus importante revient au patronat : 67% et 75% respectivement. Des exemples de financements tripartites (y compris donc l’Etat) existent également (Turquie, Chypre) mais ce n’est pas la règle.

Simulations : Les trois hypothèses de la CNSS

La CNSS a élaboré trois scénarios de financement de l’IPE. Mais dans ce financement, on ne dit pas qui paiera quoi. Cette question relève des négociations entre l’Etat, les syndicats et le patronat.

Scénario 1 : une contribution à hauteur de 1,1% de la masse salariale pour une indemnité de 70 % du Smig.

Scénario 2 : une contribution de 1,25 % de la masse salariale pour une indemnité de 50 % du salaire de référence, sans que cette indemnité dépasse 6 000 DH, soit le plafond de cotisation à la CNSS.

Scénario 3 : une contribution de 1,5 %, pour une indemnité de 50 % du salaire de référence. Toutefois, pour les salariés ayant cotisé pendant une durée dépassant 780 jours, l’indemnité est augmentée de 2,5 % tous les 216 jours supplémentaires, sans que cette indemnité puisse dépasser 70 % du salaire de référence, toujours dans la limite du plafond de cotisation (6 000 DH). Les salariés n’ayant pas cotisé au moins 780 jours n’ont donc pas droit à l'IPE.


La VieEco
 
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