Ahmed était aux côtés de son fils quand celui-ci a été froidement abattu vendredi dans la maison de quartier Nelson-Mandela. Dévasté, il témoigne de sa douleur.
Dans l'avion qui va l'emmener ce dimanche vers l'Algérie, Ahmed Kaïd, prend le temps d'évoquer la fin tragique de son fils au Aymane ,15 ans, vendredi à Bondy (Seine-Saint-Denis). C'est dans la ville de Sétif que le jeune homme tué d'une balle en pleine poitrine sera inhumé dans quelques jours.
« C'était un enfant adorable, serviable. Il ne cherchait jamais les histoires. On est perdus. Je n'arrive même pas à toucher ses affaires. Sa chambre est restée fermée », confie ce père dévasté, qui a littéralement vu mourir son fils dans ses bras. Il venait d'être atteint par une balle.
Son papa qui se tenait à ses côtés l'a vu un court instant rester debout sans rien dire puis se retourner vers lui et lancer : « Papa, j'ai mal. » « Au début, on a cru que c'était une balle à blanc, puis j'ai vu mon fil marcher et s'effondrer. Je lui ai enlevé son tee-shirt et c'est là que j'ai vu la blessure. J'ai essayé de le mettre en position latérale de sécurité et de lui parler pour qu'il reste conscient. » Mais ni lui, ni les secours ne sont parvenus à le ranimer. Il est décédé peu de temps après.
«Papa, ils sont capables de nous tuer»
Les agresseurs ont été formellement identifiés. Ces jeunes du quartier ont agi à visage découvert. Dès le lendemain, à 9 heures, deux suspects âgés de 27 et de 17 ans se sont présentés au commissariat pour se rendre. « Ils ont été placés en garde à vue pour assassinat et elle a été prolongée », indique le parquet de Bobigny. Le meurtre était donc prémédité.
Vendredi, Aymane doit se rendre à l'espace Nelson-Mandela, où il va régulièrement depuis qu'il est tout petit. Son père le dépose à 13h30. Deux heures plus tard, un responsable du centre l'appelle et lui explique que deux frères se sont battus avec Aymane juste devant le centre. Ils décident de mettre le jeune homme à l'abri. « J'ai dit à Aymane :
Tu ne sors pas avant que j'arrive », indique son père.
Une fois sur place, les deux frères sont toujours là. « Le grand a sauté sur lui. Je me suis interposé. Puis ils sont repartis », explique Ahmed. Le père et le fils retournent au centre. Mais ils ne sont pas tranquilles : « Aymane me dit :
Papa, tu sais, ils sont capables de nous tuer. »
Les habitants ne comprennent pas
Vers 17 heures les deux frères reviennent sur un scooter. Ils appellent Aymane qui se tient derrière la grande porte en bois. Mais par la fente de la boîte aux lettres, le tireur glisse le canon de son arme et fait feu une seule fois, blessant mortellement l'adolescent à la poitrine.
Rym, une mère venue déposer une rose blanche sur le seuil du centre Nelson-Mandela, résume l'état d'esprit de beaucoup de gens : « On ne comprend pas ». Le mobile qui a poussé ce jeune de 27 ans à abattre froidement Aymane reste mystérieux.
Le parquet de Bobigny indique « qu'un différend opposait la victime et ses agresseurs depuis un an sans que l'origine ne soit pour l'heure connue ».
Une rivalité sur le ring qui aurait dégénéré
Mais selon le père d'Aymane, tout aurait commencé depuis que son fils s'est inscrit au Cris Fight club de Bondy. Un club où il pratique le kick boxing et le muay thaï. Un sport de combat très populaire qui ne compte pas moins de 10 000 licenciés en Seine-Saint-Denis et qui passionnait la jeune victime.
« Mon fils avait un bon niveau », confie Ahmed Kaïd modestement. En fait, en un an Aymane est parvenu à décrocher une médaille d'or la saison dernière au championnat d'Ile-de-France, précise Nadir Allouache, président de la Fédération française de kick boxing et de muay thaï. Il avait un avenir et aurait pu devenir un grand champion. »
Dans ce club, Aymane s'entraînait et combattait régulièrement contre le plus jeune des deux frères au palais des sports de Bondy. « Aymane l'a battu dans un combat et c'est comme ça que l'histoire a commencé, affirme son père qui subodore une affaire de pure jalousie. Il l'enviait car Aymane avait des capacités que l'autre n'avait pas malgré plusieurs années de pratique. »
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