EXCLUSIF - Après des mois de violences dans le nord du pays et des centaines de morts, le JDD a rencontré Ashin Wirathu, ce religieux qui prône l'apartheid entre la majorité bouddhiste et la minorité musulmane
"La nuit, nous dormons très mal. Dans le noir, nous écoutons le moindre bruit." Dans le quartier musulman de Thaya Gone, à Meiktila (centre de la Birmanie), quinze hommes se relaient chaque soir pour monter la garde. Les habitants ont pratiqué des ouvertures dans les clôtures en bois des jardins pour faciliter leur fuite. Il y a trois mois, des émeutes emmenées par des hommes revêtus de la robe bordeaux des moines birmans ont mis la ville à feu et à sang, faisant quarante-cinq morts. "Nous n'avions jamais eu de problème avec les bouddhistes avant. Nous mangions ensemble, nous vivions ensemble!", s'écrie Zaw Win Shein, un commerçant musulman.
55 millions de Birmans et 4% de musulmans
Dans les rues de Meiktila, des autocollants frappés du nombre "969" (combinaison numérologique des principaux enseignements bouddhiques) ont fleuri sur les pare-brise, les échoppes, les chariots de bétel. Ce mouvement, lancé en 2012 par un groupe de moines extrémistes, prône notamment le boycott des commerces musulmans et l'interdiction du mariage interreligieux. "Les musulmans produisent des centaines de milliers d'enfants pour nous déborder, nous avons le devoir de nous défendre", explique le moine Wimalar Biwuntha dans son monastère de Moulmein (sud de la Birmanie), le berceau de 969. Officiellement, la minorité musulmane ne représente que 4% des 55 millions de Birmans.
De l'avis général, ce chiffre est largement sous-estimé. Face aux violences, toujours ce même silence de l'icône du combat pour la démocratie, Aung San Suu Kyi. "Nous attendons toujours qu'elle dise haut et fort que cet accès de haine n'est pas durable pour construire la nouvelle Birmanie", estime Myo Win, le porte-parole du Myanmar Muslim Network. Élue députée l'année dernière, la Dame de Rangoun a les yeux rivés sur le vote bouddhiste aux élections législatives de 2015, qui pourraient permettre à son parti d'accéder au pouvoir.
"L'islam : une religion de voleurs. Ils ne veulent pas la paix"
"L'islam est une religion de voleurs. Ils ne veulent pas la paix", explique le moine Ashin Wirathu dans son monastère de Mandalay (nord de la Birmanie). Surnommé le "Ben Laden birman", ce prédicateur de 46 ans au visage poupin, drapé dans une robe safran, est la figure la plus visible du mouvement 969. En 2003, le moine a été condamné à vingt-cinq ans de prison par la junte militaire de l'époque pour incitation à la haine. Il en est sorti en 2010 à la faveur d'une amnistie générale. Depuis, il prêche librement aux quatre coins du pays. S'il ne prône pas directement la violence, Wirathu appelle en revanche à l'établissement d'un apartheid : "Si la Birmanie veut vivre en paix, bouddhistes et musulmans doivent vivre séparément".
"Je ne hais pas les musulmans, seulement les terroristes", plaide-t-il d'une voix douce et posée. "Les musulmans créent volontairement des troubles pour avoir des financements du monde arabe, notamment de l'Arabie saoudite", ajoute-t-il. Ses sermons incendiaires sont largement relayés sur YouTube et les réseaux sociaux. "La seule chose qui me fait plus peur que la prison, c'est la charia", justifie-t-il.
http://www.lejdd.fr/International/Asie/Actualite/La-Birmanie-face-aux-moines-fascistes-614981
"La nuit, nous dormons très mal. Dans le noir, nous écoutons le moindre bruit." Dans le quartier musulman de Thaya Gone, à Meiktila (centre de la Birmanie), quinze hommes se relaient chaque soir pour monter la garde. Les habitants ont pratiqué des ouvertures dans les clôtures en bois des jardins pour faciliter leur fuite. Il y a trois mois, des émeutes emmenées par des hommes revêtus de la robe bordeaux des moines birmans ont mis la ville à feu et à sang, faisant quarante-cinq morts. "Nous n'avions jamais eu de problème avec les bouddhistes avant. Nous mangions ensemble, nous vivions ensemble!", s'écrie Zaw Win Shein, un commerçant musulman.
55 millions de Birmans et 4% de musulmans
Dans les rues de Meiktila, des autocollants frappés du nombre "969" (combinaison numérologique des principaux enseignements bouddhiques) ont fleuri sur les pare-brise, les échoppes, les chariots de bétel. Ce mouvement, lancé en 2012 par un groupe de moines extrémistes, prône notamment le boycott des commerces musulmans et l'interdiction du mariage interreligieux. "Les musulmans produisent des centaines de milliers d'enfants pour nous déborder, nous avons le devoir de nous défendre", explique le moine Wimalar Biwuntha dans son monastère de Moulmein (sud de la Birmanie), le berceau de 969. Officiellement, la minorité musulmane ne représente que 4% des 55 millions de Birmans.
De l'avis général, ce chiffre est largement sous-estimé. Face aux violences, toujours ce même silence de l'icône du combat pour la démocratie, Aung San Suu Kyi. "Nous attendons toujours qu'elle dise haut et fort que cet accès de haine n'est pas durable pour construire la nouvelle Birmanie", estime Myo Win, le porte-parole du Myanmar Muslim Network. Élue députée l'année dernière, la Dame de Rangoun a les yeux rivés sur le vote bouddhiste aux élections législatives de 2015, qui pourraient permettre à son parti d'accéder au pouvoir.
"L'islam : une religion de voleurs. Ils ne veulent pas la paix"
"L'islam est une religion de voleurs. Ils ne veulent pas la paix", explique le moine Ashin Wirathu dans son monastère de Mandalay (nord de la Birmanie). Surnommé le "Ben Laden birman", ce prédicateur de 46 ans au visage poupin, drapé dans une robe safran, est la figure la plus visible du mouvement 969. En 2003, le moine a été condamné à vingt-cinq ans de prison par la junte militaire de l'époque pour incitation à la haine. Il en est sorti en 2010 à la faveur d'une amnistie générale. Depuis, il prêche librement aux quatre coins du pays. S'il ne prône pas directement la violence, Wirathu appelle en revanche à l'établissement d'un apartheid : "Si la Birmanie veut vivre en paix, bouddhistes et musulmans doivent vivre séparément".
"Je ne hais pas les musulmans, seulement les terroristes", plaide-t-il d'une voix douce et posée. "Les musulmans créent volontairement des troubles pour avoir des financements du monde arabe, notamment de l'Arabie saoudite", ajoute-t-il. Ses sermons incendiaires sont largement relayés sur YouTube et les réseaux sociaux. "La seule chose qui me fait plus peur que la prison, c'est la charia", justifie-t-il.
http://www.lejdd.fr/International/Asie/Actualite/La-Birmanie-face-aux-moines-fascistes-614981