Le chiisme, quelles spécificités par rapport au sunnisme ?

Je cite cet extrait

Théologiquement, le chiisme repose sur deux principes fondamentaux : le dualisme et la dualité. Le dualisme consiste à faire de l’histoire le théâtre d’une lutte perpétuelle entre amis et ennemis de Dieu. Cette approche peut se prévaloir du Coran : « Nous donnons à chaque prophète des ennemis parmi les criminels » (sourate 35, verset 31), mais elle accentue fortement ce trait.

La dualité repose sur l’idée que toute chose a une face apparente (zahir</italic) et une face cachée (<italic>batin) : en premier lieu le Coran, dont on distingue un sens extérieur, révélé, et un sens interne. Cela correspond à la distinction entre la lettre et l’esprit du texte. C’est ici qu’intervient l’imam, dont le rôle et la nature diffèrent dans le chiisme et dans le sunnisme : pour les sunnites, l’imam est simplement l’homme qui dirige la prière collective, généralement choisi pour sa piété, sa moralité et sa connaissance des disciplines religieuses. Pour les chiites, la révélation coranique ne peut pas être comprise sans l’interprétation ou l’exégèse symboliques dont l’imam a la charge exclusive. De même que le rôle de Muhammad fut d’apporter aux hommes la lettre du Coran, le rôle de Ali, le premier imam, était de leur en livrer l’esprit. Par la suite, la garde et la transmission du sens ésotérique de la révélation reviennent à la lignée des imams issus de la descendance de Ali.

En ce sens, le chiisme est essentiellement une « imamologie », une religion de l’imam, puisque, sans sa médiation, le sens de la parole divine demeurerait inaccessible. La notion de walaya en témoigne : elle désigne aussi bien l’« amitié » ou la « proximité » entre Dieu et l’imam que la fidélité du croyant à l’imam – d’où la forme chiite de la profession de foi musulmane : « Il n’y a de dieu que Dieu, Muhammad est l’Envoyé de Dieu, et Ali est l’Ami (wali) de Dieu. » Reconnaître l’imam c’est participer à la walaya par son intercession.


Leur imamologie me faisait beaucoup pensait au rapport qu'ont les juifs avec leurs rabbins.
 
J'ai lu qu'ils priaient 3 fois par jour...................comme les juifs :D
Bon en vrai, c'est parce qu'ils peuvent les regrouper, mais je ne sais pas dans la pratique comment ils s'organisent...(est ce qu'ils ont majoritairement recours au regroupement des prières ou pas..)
D'ailleurs, dans leur mosquée - y a 5 appels à la prière ou 3 ? si qqu'un sait...
 
Sujet intéressant.
hhh ça me rappelle mes flâneries du net il y a quelques années.

D'un point de vue doctrinal, je me souviens être tombé sur des éléments assez surprenants qui m'avaient rendu perplexe, et qui me font voir aujourd'hui le Sunnisme abrite une diversité de conceptions formant un continuum qui à l'un de ses extrémités se rejoint à de nombreux égards avec les croyances Chiites, notamment les courants mystiques.

Je pense notamment à deux thématiques:

L'importance des Ahlul Bayt, la famille du prophète:
- De manière surprenante, les descendants du Prophète, par Fatima et Ali, ont une place de choix chez de nombreux courants comptabilisés parmi les Sunnites. Et ce n'est pas un hasard d'ailleurs si cette idée est encore très présente au Maroc. Un peu comme si les Chorfas avaient une longueur d'avance en quelque sorte, mais dont j'ignore les modalités. La famille du Prophète au sens général, est l'héritière et la récipiendaire de la flamme de la Sunna.

  • Je me rappelle être tombé sur un texte du moyen âge écrit par un grand auteur Sunnite qui louait les 12 imams, les mêmes considérés comme Imams infaillibles chez les Chiites duodécimains majoritaires en Iran et en Irak.
  • Et d'ailleurs, il paraît qu'en Arabie Saoudite même, sur les murs de la mosquée du Prophète, à Médine, sont inscrits les noms de ces 12 Imams (leg des Ottomans ?). Je n'y suis jamais allé. Donc si quelqu'un peut confirmer. Je suis tombé sur la vidéo suivante:

  • Un autre exemple. Le martyr de Hussein, le petit fils du Prophète, est un élément central chez les Chiites. Les Chiites célèbrent cet évènement à chaque Ashura, chose que ne font pas les Sunnites. Il se trouve que l'auteur d'un des poèmes canoniques les plus récités lors des célébrations était fort probablement un Sunnite Hanafite https://en.wikipedia.org/wiki/Husayn_Kashifi
  • Pour autant, la plupart de ces courants, ceux dont j'ai connaissance en tout cas, ne renient pas Muawiya, adversaire de Ali, ni les autres compagnons. Et encore moins les Califes Abu Bakr, Omar et Otman qui demeurent très respectés comme chez l'ensemble des Sunnites.

...
 
Dernière édition:
La médiation
  • La conception répandue du sunnisme le rapproche plus du protestantisme que du catholicisme, en ce sens de l'absence de médiation entre l'homme et Dieu.
  • Or, c'est une affirmation à nuancer et très précisément chez les courants mystiques du Sunnisme.
  • Dans cette perspective, le commun des gens, même en s'évertuant à faire des oeuvres de bien, seront bien sûr récompensés à la mesure de leurs oeuvres, mais ne parviendront pas à se débarrasser des bassesses de leurs âmes, et n'accèderont à la Connaissance intime et non livresque de Dieu qu'en se rattachant à l'"arbre béni", c'est à dire en prenant le pacte, la Bayaa, auprès d'un Imam, un maître spirituel "rompu aux maladies de l'âme" et héritier du secret Prophétique. A la manière d'un arbre généalogique, cet "arbre béni", l'Olivier ni d'Orient ni d'Occident décrit dans Sourate Nour, relie le maître au Prophète qui se trouve en quelque sorte à la racine de l'arbre. Le disciple, par la vertu du pacte avec son maître, reçoit de celui-ci son flux spirituel. A travers le compagnonnage physique et spirituel de son maître, il progressera sur la voie de l'annihilation de son ego et de l'ascension spirituelle. Je trouve d'ailleurs cette conception assez proche de certains passages des Evangiles. Je pense à "Nul n'arrivera au Père qu'en passant par moi" (formulation approximative), et aussi à "Moi, je suis le cep, vous, les sarments".

C'est dommage, je crois qu'une personne engagée dans cette voie s'était inscrite sur le forum il y a 1 ou 2 ans. Bon, comme prévu, elle a du faire face à la raillerie et à la virulence des propos. Et je crois qu'elle a vite laissé tomber le site. Bien dommage. Elle aurait pu parler de cette notion de médiation. Mais j'ai trouvé cette vidéo en Anglais. C'est en Anglais. Elle fait partie d'une longue playlist qui est très riche:


- On retrouve donc la notion de médiation et d'Imamat dans le Sunnisme bien à une proportion moindre, bien que:
+ Dans les courants mystiques Sunnites, cette notion de pacte avec le maître revêt une signification spirituelle et non politique. Néanmoins, on peut trouver dans le passé du Maroc certaines Zawiyas qui ont viré politique (ref Zawiya Dilaïte) .
+ Je crois que L'Imamat chez les Chiites revêt également un aspect politique. Et j'ignore si la signification spirituelle est la même.


NB: Tous mes propos sont à prendre avec caution. Malheureusement, je sens ma mémoire flancher de manière précoce ces derniers mois et je réalise qu'il m'arrive parfois d'inventer de faux souvenirs.
Mais j'ai mis ces éléments comme des points d'attention qui personnellement m'avaient interpellé, à l'adresse de qui souhaite faire ses propres recherches.
 
J'ai lu qu'ils priaient 3 fois par jour...................comme les juifs :D
Bon en vrai, c'est parce qu'ils peuvent les regrouper, mais je ne sais pas dans la pratique comment ils s'organisent...(est ce qu'ils ont majoritairement recours au regroupement des prières ou pas..)
D'ailleurs, dans leur mosquée - y a 5 appels à la prière ou 3 ? si qqu'un sait...
hihi Apparemment, sur ce point aussi, il existe des avis chez les Savants Sunnites qui autorisent le regroupement.

"
Il y a des savants qui ont permis cela en argumentant par ceci: Ibn 'Abbâs a dit: 'Le Prophète a une fois rassemblé Zuhr avec al-'asr, et Al-Maghrib avec Al-'Ishâ, à Médine sans cause de peur ni de voyage'(et dans une autre version de Muslim aussi: 'sans cause de peur ni de voyage ni de pluie'). Il lui fût demandé qu'est-ce qu'il en déduit, il dit: 'Ceci pour enlever la difficulté à sa communauté'.[1]
'Abdullah ibn Shaqîq a dit: 'Ibn 'Abbâs nous fit un jour un sermon après la prière de al-'asr jusqu'à que le soleil se couche et qu'apparaissent les étoiles... les gens ont commencé à dire: 'la prière, la prière'. Un homme se leva alors et dit: 'La prière, la prière'! Ibn 'Abbâs dit alors: 'Est-ce que tu va m'apprendre la sunna? J'ai vu le Prophète rassembler zuhr avec al-'Asr, et Al-Maghrib avec Al-'Ishâ'. J'ai alors eu un doute et je suis parti me renseigner auprès d'Abû Hurayra qui me confirma ses propos'. [2]
"
 

Ce qui change sur le plan théorique


Les sources juridiques de l’islam


Il existe trois sources communes :

  • Le Coran : Le texte fondateur
  • Le Sunna : La « loi immuable de Dieu », représentée par l’enseignement du prophète, qu’il s’agisse de ses dires ou de ses actes.
  • L’analogie : Principe auquel on a recours pour régler un problème de droit. Par exemple, si la consommation de vin est proscrite par le fait qu’il rende en état d’ébriété, alors toutes les boissons fermentées produisant cet effet le sont aussi.

Pourtant, il existe une source qui s’applique différemment selon qu’on est chiite ou sunnite :


  • Le consensus : Une réunion de savants qui définissent une solution de droit. Pour les sunnites, le consensus est établi par les oulémas (gardiens de la tradition musulmane), alors que les chiites considèrent qu’il ne peut être valable que s’il a été élaboré en compagnie de l’imam (guide de la prière).

Le rôle de l’imam et la hiérarchisation des clergés


Communément, il s’agit d’un savant dont le rôle est de diriger la prière.


  • Chez les sunnites, il n’y a pas d’intermédiaire entre le croyant et Allah, et l’imam n’a qu’un rôle de pasteur. Lors de la prière, il lit des passages du Coran et les commente.
  • Chez les Chiites, le clergé est très organisé et l’imam s’impose donc comme un guide indispensable de la communauté. La majorité des Chiites ne croient qu’en l’existence de douze imams, tous descendants du prophète, qui ont eu pour mission l’interprétation du Coran révélé par le prophète. Le premier d’entre eux est bien sûr Ali.

L’injure​


Au delà du fait qu’à la déclaration de foi sunnite, à savoir « il n’y a de dieu que Dieu et Mohammed est son prophète », les chiites ajoutent « et Ali est l’ami de Dieu », il existe un phénomène qui représente un point profond de rupture entre les deux communautés : l’injure.

  • Chez les Chiites, il s’agit d’une pratique renouvelée d’excommunication des musulmans n’ayant pas soutenu Ali, et notamment Aicha, l’épouse du prophète, ainsi que des trois premiers califes.
  • Chez les Sunnites, toute injure envers le prophète ou un de ses compagnons doit faire l’objet d’une demande de pardon.

Sur le plan pratique

La prière


Les deux doctrines reconnaissent que la célébration de cinq prières est d’usage, bien que les chiites tolèrent que seulement trois soient faites. Lors des ces prières, ces derniers insistent sur leur appartenance à la communauté d’Ali.


L’achoura


Il s’agit d’une commémoration chiite envers le petit fils du prophète ainsi que du troisième Imam chiite Hussein, massacré par un calife sunnite. Symboliquement, elle représente donc la lutte contre les oppressions et les injustices. Lors de ce rite, les Chiites se flagellent à l’aide de chaînes et parfois d’épées. Par ce biais, ils expient les manquements de leurs ancêtres.


Les lieux saints et les pélerinages


La Mecque, lieu de naissance du prophète, est un lieu commun de pèlerinage. Les chiites quant à eux considèrent le mausolée d’Ali tout comme celui de son fils Hussein des lieux de pèlerinage supplémentaires.
 
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