Le mode de vie de l'Imâm Mâlik Ibn Anas (Abû Zahrâ°)

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Ash Shaykh Muhammad Abû Zahrâ° (qu'Allâh lui fasse miséricorde) a dit :



« Pour commencer, nous dirons quelques mots sur les ressources matérielles de Mâlik, dont les livres d'apologie (manâqib) ne parlent pas clairement.

Les savants ont affirmé que son père était fabricant de flèches, mais son fils le suivit-il dans cette voie comme c'était le cas dans la plupart des familles où le fils héritait du métier de son père ? Or les récits concernant Mâlik affirment qu'il s'orienta tout jeune vers la science religieuse, suivant en cela son grand père et ses oncles paternels, qui étaient des transmetteurs de ahadîth renommés. Cela exclut la possibilité qu'il ait exercé un métier comme celui de son père, qui l'aurait entravé dans sa vocation, et rien ne prouve qu'il ait mené de front ces deux activités.

D'autre part, nous avons vu les livres d'apologies (kutûb ul manâqib) affirmer que son frère An Nadar faisait le commerce de vêtements et que Mâlik travaillait avec lui ; il est possible de concilier le commerce et l'étude de la religion, et An Nadar lui-même étudiait ces questions, à tel point que Mâlik était surnommé le frère de An Nadar [...], avant que ce dernier soit lui-même appelé frère de Mâlik. Quant à nous, nous estimons probable que Mâlik vivait du commerce, comme l'affirment mes recueils de récits, et son élève Ibn Al Qâsim a dit : « Mâlik avait 400 dinars avec lesquels il commerçait et qui le faisait vivre. » [Ibn Farhûn Al Qurtubî - Dîbaj Ul Mudhahhab].

Malgré ces ressources, Mâlik acceptait les dons des Califes, sans douter un seul instant de la légitimité de leur acceptation, à la différence d'Abû Hanîfah, son contemporain, qui n'acceptait pas les cadeaux des Califes 'Abbasides, ni avant eux, ceux des Califes 'Umayyades. Et son allégeance à Abû Ja'far Al Mansûr fut éprouvée par l'envoi de présents : s'il les acceptait, cela signifiait qu'il reconnaissait son autorité, sinon, cela indiquait qu'il cachait quelques chose.

Mâlik, donc, ne dédaignait pas les biens des Califes, même s'il s'abstenait de les accepter de la part de leurs subordonnés. Interrogé sur les présents des Sultans, il répondit : « Pas d'objection en ce qui les concerne. Mais venant de leurs subordonnés, j'y trouverais à redire. » Peut-être pensait-il que Califes dilapidaient les biens publics.

Et cependant, certains lui reprochaient d'accepter ces dons, comme dans le récit où Ar Rashîd lui offrit 3000 dinârs, et qu'on lui dit ensuite : « Ô Abû 'Abdi Llâh ! Tu acceptes 3000 dinârs de l'Emir des Croyants ? » Il répondit : « S'il est un Imâm juste et qu'il traite équitablement les gens de bien, je n'y vois pas d'incovénient. »
 

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Ainsi, s'il acceptait les présents des Khulafa, c'était parce qu'il les considérait comme un moyen de rendre justice aux gens de bien, et de préserver leur dignitié contre ce qui pouvait lui nuire. Il semble d'ailleurs qu'il les acceptait à contre-coeur, pour ses besoins personnels et ce qu'exigeait de lui sa position sociale, en particulier l'hébergement des étudiants pauvres et l'aide aux nécessiteux. Et d'ailleurs, il interdisait aux autres d'en faire autant, craignant que ces intentions louables ne se trouvent pas chez eux. Lorsqu'on lui disait : « Mais toi, tu les acceptes. », il répondait : « Veux-tu payer pour ma faute et pour la tienne ? », et parfois : « C'est que je voulais que tu me blâmes pour mes fautes. »

Mâlik connut une gêne intense au début de sa vie, au point que sa fille pleurait parfois de faim. Il raconte à ce propos qu'il conseilla Abû Ja'far Al Mansûr de ne pas négliger ses sujets. L'autre lui dit alors : « Lorsque ta fille pleure de faim, n'ordonnes-tu pas que soit actionnée la pierre meulière pour que les voisins ne l'entendent pas ? » Alors, Mâlik dit : « Je le jure, seul Allâh aurait pu savoir cela ! » ; « Si donc j'ai su cela - répondit l'autre - je n'aurais pas pu connaître l'état de mes sujets ? » [Al Qâdî 'Iyâd - Tartîb Ul Madârik].

Il semble bien que cette gêne matérielle ait eu pour cause le fait qu'il ait abandonné ses activités lucratives pour se consacrer à la religion. Ibn Al Qâsim dit à ce propos : « Mâlik en arriva à vendre les poutres de sa toiture, jusqu'à se retrouver sur la paille. » [Ibn Farhûn Al Qurtubî - Dîbaj Ul Mudhahhab], comme nous l'avons déjà mentionné. Mais globalement, Mâlik connut aussi bien l'aisance que la pénurie, et dans les deux cas, rendait grâce à Allâh. C'est pour cela que Al Qâdî 'Iyâd dit, après avoir mentionné les récits contradictoires concernant la situation matérielle de Mâlik : « Leur raison en est la diversité des périodes [de sa vie], car il vécut près de 90 ans pendant lesquels il fut un Imâm qui rapportait les ahadîth et pratiquait l'iftâ', dont la parole fut écoutée pendant environ 70 ans, et dont les mérites s'accroissaient de jour en jour. Il fut ainsi sans rival pendant des années et jusqu'à sa mort, et il n'y a donc là aucune contradiction entre les différents récits. » [Tartîb Ul Madârik].
 

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Il est probable que c'est après avoir été comblé des bienfaits Divins et bénéficie des faveurs des Khulafa qu'il abandonna le commerce et put se consacrer à la science religieuse sans se soucier de sa subsistance.

Mâlik, après qu'Allâh l'eût comblé de ses bienfaits, tint à les manifester dans tous les aspects de sa vie : nourriture, habillement et logement, en particulier. Il disait à ce propos : « Il n'est pas souhaitable à un homme comblé par Allâh de ses bienfaits de ne pas les montrer, surtout s'il s'agit de gens de science. » Et il affirmait aussi : « J'aime voir le lecteur de Qur°ân vêtu de blanc. »

C'est ainsi qu'il mangeait une nourriture raffinée, sans pour autant dépasser les limites du raisonnable, et appréciait la viande, bon marché au Hijaz à cette époque. Il en achetait tous les jours pour 2 dirhams sans entorse à cette discipline. L'un de ses élèves disait : « Si Mâlik ne trouvait pas un jour 2 dirhams pour de la viande, il aurait pour cela vendu certains de ses biens si nécessaire. »

Il savait ainsi apprécier la bonne nourriture, en particulier les bananes pour lesquelles il disait : « Rien n'est plus proche qu'elles des fruits du Paradis, on les trouve aussi bien en été qu'en hiver, et Allâh a dit : « On les mange en permanence [1], comme on profite de leur ombre. ». »

Dans le domaine vestimentaire, il préférait le blanc, symbole de la pureté de l'âme et de la pensée, et revêtait toujours des habits neufs. On lit dans Al Madârik : « Mâlik portait des vêtements de grande valeur d'Aden, du Khurâsan et d'Egypte. » Il était soucieux de leur propreté comme de leur qualité, et son neveu disait : « Je n'ai jamais vu de tache sur les vêtements de Mâlik. »

Pour le logement, il recherchait ce qui pouvait contribuer au repos, soignait le mobilier, en disposant les coussins en lignes de part et d'autre des pièces, pour que s'y asseoient ses visiteurs Qurayshî, ainsi que ses partisans et les notables.

Son souci pour tout ce qui apaisait l'âme et l'esprit lui faisait aimer les parfums, et son élève Ash-hab disait : « Mâlik utilisait le parfum de qualité, comme le musc, et d'autres encore. »
 

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Pour satisfaire à ces exigences de vie, il dépensait tout ce qu'il gagnait ou ce qui lui restait des jours où il commerçait ainsi que des dons des souverains. C'est pourquoi il n'avait pas de maison à lui depuis qu'il avait vendu les poutres de celle qu'il avait héritée, et payait un loyer.

Certains pourraient objecter à ce train de vie qu'il ne s'accorde pas avec le renoncement aux plaisirs terrestres que l'on connaît de la part des gens de religion, et que la vie de Mâlik ressemblait plus sous cet angle à celle des princes qu'à celle des savants en religion.

Mais malgré les apparences, une étude minutieuse de la vie de Mâlik montre qu'il ne recherchaient en rien les parures du monde, mais que la nourriture fine, par exemple, était pour lui un moyen, par le biais d'un corps sain et fort, de fortifier et d'assurer sa pensée. [2]

C'est pourquoi Mâlik ne visait pas ainsi le plaisir de la bouche, même s'il n'y a par ailleurs en cela rien de blâmable, mais il recherchait l'endurance dans l'effort intellectuel et la force de résistance, s'opposant de la sorte aux ascètes qui ne comprennent pas l'essence de l'Islâm, et suivait l'exemple du Prophète (salla Llâhu 'alayhi wa sallam).

On pourrait en dire de même de ses vêtements et de son logement, qui contribuaient par leur qualité à l'affermissement de l'âme et à la confiance en soi.

Et l'on raconte de lui qu'il dit un jour à Al Mahdî : « Rabî'ah m'a dit que la noblesse de l'homme venait de sa maison. Car un habitat de belle apparence confère à son occupant honneur et dignité. » [3]. »



Fin de citation.



Source : Târîkh Ul Madhâhib du Shaykh Muhammad Abû Zahrâ° (qu'Allâh lui fasse miséricorde).
 
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