Le paradoxe du déterminisme (déterminés à être déterministes?)

Ebion

Ça a l'air que je suis l'esclave da partida
VIB
Bonjour :timide:

Il y a un argument apologétique qui revient souvent dernièrement, qui est dirigé contre le déterminisme.

Si le déterminisme est vrai, tout ce que l'on fait est déterminé par les lois mécaniques de la nature.

Non seulement tout ce qu'on fait, mais aussi tout ce que l'ont dit et tout ce que l'on pense, puisque le cerveau est aussi une partie de la nature.

Mais alors si on croit au déterminisme, c'est que nous avons été déterminés par les forces de la nature (mécaniques) à croire au déterminisme.

Dans ce cas, dans quelle mesure peut-on dire que cette croyance est rationnelle? Elle n'est ni plus ni moins l'effet de forces de la nature que les autres croyances : les autres religions, la métaphysique, etc.

Mais si toutes les croyances sont comme ça, sans que l'une ait l'avantage sur l'autre du point de vue rationnel, pourquoi prendre le déterminisme au sérieux pour commencer?

La croyance au déterminisme s'autosabote : si on est déterministe, on ne peut affirmer que le déterminisme est rationnel, donc on avoue qu'on est en réalité pas plus avancé que des personnes qui croient autre chose.

Il y a non plus lieu d'objecter que le déterminisme s'est imposé avec nous avec évidence : dans le propre cadre déterministe, cela aussi n'est qu'une résultante des lois mécaniques, même si on ne s'en rend pas très bien compte. Il y a aussi des chrétiens qui trouvent le christianisme évident, des musulmans qui trouvent l'islam évident, des bouddhistes... vous voyez le genre.

La personne déterministe ne peut pas revendiquer de position privilégiée pour connaître la vérité. Elle n'est ni plus ni moins une marionnette des forces aveugles de la nature que nous tous.
 

Ebion

Ça a l'air que je suis l'esclave da partida
VIB
Oh, juste pour que vous sachiez : cet argument a été popularisé par l'écrivain chrétien anglais C. S. Lewis, mais il semble avoir été inventé par J. B. S. Haldane, un biologiste anglais du début du 20e siècle.
 
Bonjour @Ebion la version la plus élaborée de l'argument est sans conteste celle de Alvin Plantinga. Voir "evolutionary argument against naturalism".
Bien avant Haldane, Lewis et même Balfour (ministre des affaires étrangères britannique durant la première guerre mondiale et auteur de la déclaration de 1917 qui porte son nom), Charles Darwin lui-même en parle dans une de ses correspondances comme "un horrible doute".

L'argument pointe bien une impasse, car si nous sommes le produit d'une évolution aveugle alors tout acte de notre esprit est à situer dans le prolongement de notre comportement et n'a d'autre visée que de produire un homme mieux adapté à son environnement.
Par exemple, pour mieux distinguer les composants de son environnement l'œil humain distingue des couleurs là où il n'y a que des ondes lumineuses de différentes longueurs, rien à voir avec l'expérience qualitative que je peux avoir du rouge, du bleu...

La question alors est de savoir comment fonder en légitimité notre entendement et les lois de la raison ? Qu'est-ce qui me laisserait penser que l'écart entre ma raison et les faits n'est pas du même registre que l'écart entre la couleur et l'onde lumineuse ?

Plantinga soutient que la seule échappatoire est de poser un Dieu doué d'une morale, que même s'il nous a créé par des procédés d'évolution, il ne permettrait pas qu'on soit maintenus dans l'illusion constamment et à propos de tout
 
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