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Avis de Larabi Jaidi, Universitaire
Les cinq Constitutions du Maroc indépendant ont construit et ancré l’architecture d’un régime politique où l’Institution monarchique occupe une position dominante, exerçant son contrôle sur la production et la gestion des règles du jeu politique. En plus de cinquante ans de vie politique, le débat sur les enjeux du constitutionnalisme a toujours été feutré. La volonté de l’ancienne opposition visant à contractualiser le processus constitutionnel n’a jamais trouvé sa pleine expression dans un mécanisme constituant. Si dans les périodes de crise politique ou tout simplement lors des congrès des partis des débats s’engageaient sur l’opportunité des révisions constitutionnelles, la confrontation institutionnelle finissait par prendre l’allure d’une supplique plus que d’une revendication.
Anticipant les crispations et les tensions, le Roi prenait l’initiative d’une consultation référendaire. Mais, en dépit des changements ou des révisions des Constitutions, le socle du système demeurait invariant : le Roi règne et gouverne. Même la Constitution de 1992, qui a introduit un changement en faveur du pouvoir législatif, est venue consacrer la pérennité du monopole monarchique dans la production des normes. Cette primauté dans le dispositif des pouvoirs faisait du Maroc un régime de «Monarchie présidentielle» plus que d’une «Monarchie constitutionnelle» au sens universel du terme. Hassan II n’avait-il pas déclaré en 1977 : «La séparation des pouvoirs ne saurait concerner le pouvoir suprême. Elle ne se trouve qu’au niveau des représentants des pouvoirs exécutif et législatif, en l’occurrence le Parlement et le gouvernement».
Après dix années d’un nouveau règne, épousant la lame de fond de la revendication démocratique arabe, la proposition de changement est venue du Souverain lui-même, et il faut souligner cette position de sagesse. Le Maroc va-t-il connaître un changement institutionnel profond ? Un processus de réforme constitutionnelle constitue toujours un moment d’interrogation à la mesure des ambiguïtés et des incertitudes que l’on peut interpréter dans un discours, ou que génèrent les conceptions, les pratiques des acteurs d’un système. Au centre de cette interrogation se pose le devenir de l’article 19, cœur du dispositif de la Constitution. Le dispositif d’Imarat Al Mouminine accorde à ce dernier un pouvoir transcendental.
Même les principes de la séparation des pouvoirs, ou celui du Roi arbitre sont interprétés à la lumière de ces deux registres : le religieux et le rationnel. Les conflits politiques et les rapports de force qui en ont découlé n’ont pas manqué d’imposer cette configuration institutionnelle aux autres acteurs politiques. La mémoire politique invite à rappeler l’usage fait par Hassan II de l’article 19, obligeant les députés de l’USFP à réintégrer les bancs d’un Parlement dont il avait prorogé le mandat unilatéralement. Aucun processus de contractualisation n’a été mis en place depuis. La seule référence contractuelle à laquelle renvoie la Constitution est celle conclue entre les électeurs et les élus investis d’un mandat de représentation ponctuel.
En conséquence, même si l’évolution du champ politique a conduit à l’institutionnalisation d’une monarchie dite constitutionnelle et au renforcement progressif des fonctions législatives, au niveau de la pratique politique, le monarque demeure un acteur central du système.
Les cinq Constitutions du Maroc indépendant ont construit et ancré l’architecture d’un régime politique où l’Institution monarchique occupe une position dominante, exerçant son contrôle sur la production et la gestion des règles du jeu politique. En plus de cinquante ans de vie politique, le débat sur les enjeux du constitutionnalisme a toujours été feutré. La volonté de l’ancienne opposition visant à contractualiser le processus constitutionnel n’a jamais trouvé sa pleine expression dans un mécanisme constituant. Si dans les périodes de crise politique ou tout simplement lors des congrès des partis des débats s’engageaient sur l’opportunité des révisions constitutionnelles, la confrontation institutionnelle finissait par prendre l’allure d’une supplique plus que d’une revendication.
Anticipant les crispations et les tensions, le Roi prenait l’initiative d’une consultation référendaire. Mais, en dépit des changements ou des révisions des Constitutions, le socle du système demeurait invariant : le Roi règne et gouverne. Même la Constitution de 1992, qui a introduit un changement en faveur du pouvoir législatif, est venue consacrer la pérennité du monopole monarchique dans la production des normes. Cette primauté dans le dispositif des pouvoirs faisait du Maroc un régime de «Monarchie présidentielle» plus que d’une «Monarchie constitutionnelle» au sens universel du terme. Hassan II n’avait-il pas déclaré en 1977 : «La séparation des pouvoirs ne saurait concerner le pouvoir suprême. Elle ne se trouve qu’au niveau des représentants des pouvoirs exécutif et législatif, en l’occurrence le Parlement et le gouvernement».
Après dix années d’un nouveau règne, épousant la lame de fond de la revendication démocratique arabe, la proposition de changement est venue du Souverain lui-même, et il faut souligner cette position de sagesse. Le Maroc va-t-il connaître un changement institutionnel profond ? Un processus de réforme constitutionnelle constitue toujours un moment d’interrogation à la mesure des ambiguïtés et des incertitudes que l’on peut interpréter dans un discours, ou que génèrent les conceptions, les pratiques des acteurs d’un système. Au centre de cette interrogation se pose le devenir de l’article 19, cœur du dispositif de la Constitution. Le dispositif d’Imarat Al Mouminine accorde à ce dernier un pouvoir transcendental.
Même les principes de la séparation des pouvoirs, ou celui du Roi arbitre sont interprétés à la lumière de ces deux registres : le religieux et le rationnel. Les conflits politiques et les rapports de force qui en ont découlé n’ont pas manqué d’imposer cette configuration institutionnelle aux autres acteurs politiques. La mémoire politique invite à rappeler l’usage fait par Hassan II de l’article 19, obligeant les députés de l’USFP à réintégrer les bancs d’un Parlement dont il avait prorogé le mandat unilatéralement. Aucun processus de contractualisation n’a été mis en place depuis. La seule référence contractuelle à laquelle renvoie la Constitution est celle conclue entre les électeurs et les élus investis d’un mandat de représentation ponctuel.
En conséquence, même si l’évolution du champ politique a conduit à l’institutionnalisation d’une monarchie dite constitutionnelle et au renforcement progressif des fonctions législatives, au niveau de la pratique politique, le monarque demeure un acteur central du système.