Loin des femmes d'Arabie Saoudite, interdites de permis, de plus en plus de femmes en Turquie deviennent prédicatrices et responsables de Mosquée, vers une Modernisation de l'Islam au féminin ?
Dans la République laïque turque, les mosquées sont administrées par l'Etat. Explique le correspondant du Journal Le Monde. Et c'est l'Etat, lui-même qui nomme les responsables religieux. Rien ne s'oppose donc, en théorie, à ce qu'une femme puisse accéder, un jour, à la tête de la puissante administration des affaires religieuses, le Diyanet.
L'un de ses dirigeants assure que "dans la doctrine islamique, l'homme et la femme sont égaux". Les femmes prédicatrices, les vaize, sont déjà de plus en plus visibles dans les mosquées turques. On en compte "près de deux mille", selon Ipek Mercil, sociologue à l'université Galatasaray. "Elles sont souvent très cultivées et sont arrivées jusqu'en mastère à la faculté de théologie."
L'actuel directeur du Diyanet, Ali Bardakoglu, soutient activement cette politique de féminisation de son administration. Une manière de réconcilier les musulmanes avec les mosquées, qu'elles fréquentent peu. En 2003, des femmes ont été autorisées pour la première fois à conduire des groupes de pèlerins turcs à La Mecque. Au moins six autres occupent le poste d'adjoint de mufti, notamment à Istanbul. Dans certains milieux religieux, des féministes réclament même le droit de conduire des prières. Pour l'instant, cette pratique n'est tolérée qu'au sein de communautés strictement féminines.
Conséquence de la tradition républicaine, cette féminisation de la mosquée s'explique aussi par l'émergence d'une génération de "jeunes musulmanes voilées, très nombreuses à faire des études de théologie, parce qu'il est plus facile d'y porter le voile", précise M. Mercil. Ces femmes cultivées et indépendantes défendent naturellement leur place dans la hiérarchie religieuse.