L'inca et le conquistador, la conquête de l'amérique exposée au musée du quai branly

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la rose et le réséda
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Le musée du quai Branly met en scène le combat qui a opposé le conquistador Francisco Pizarro au grand Inca Atahualpa, épisode majeur de l'installation des Espagnols en Amérique. Point de Vue raconte.

À son apogée, le Tahuantinsuyu -l'Empire inca "des quatre quartiers"- s'étendait sur quatre mille kilomètres, le long de la côte du Pacifique, de la Colombie au Chili. Or, en 1532, ce vaste territoire est partagé entre les deux fils du grand Inca Huayna Capac, récemment disparu. Au nord, autour des villes de Quito et de Tomebamba, règne Atahualpa. Celui-ci vient de remporter une victoire contre son demi-frère Huascar, qui gouverne le sud de l'empire Tanwantinsuyu. Il s'apprête à regagner en vainqueur la capitale, Cuzco, pour s'y faire couronner 13e empereur inca.

Pizarro, le conquistador qui annonce la fin de l'empire inca
C'est alors qu'Atahualpa apprend le débarquement, dans la baie de Tumbes -au nord de l'actuel Pérou- d'une troupe de 180 hommes, blancs et barbus. À leur tête, un certain Francisco Pizarro, un reître de 54 ans, originaire d'Estramadure, qui écume le Nouveau Monde depuis une dizaine d'années, en quête de métaux précieux. Quant à Charles Quint, empereur romain et roi d'Espagne, au nom duquel il combat, il n'aspire à rien de moins que la domination universelle! Cependant, même avec leurs 37 chevaux et leurs mousquets qui crachent le tonnerre, les conquistadors ne sauraient peser lourd face aux 30 000 soldats de l'invincible armée d'Atahualpa! La seule chance de Pizarro, c'est que ce dernier sort à peine d'une guerre civile. Car Huascar résiste encore avec une poignée de fidèles.

Courtesy of MNAAHP

Le fils d'une princesse de l'ancien royaume de Quito et du grand Inca Huayna Capac, Atahualpa a vu le jour vers 1500. A la mort de son père il affrontera son demi-frère Huascar pour s'emparer du trône.

Aussi, loin de voir une menace dans l'arrivée des envahisseurs européens, Atahualpa croit-il deviner que leur chef n'est autre que le dieu Viracocha en personne, qui, selon une ancienne légende, doit apporter paix et prospérité. Peut-être espère-t-il que cette légende suffira à annuler une autre vénérable prophétie, annonçant que l'empire s'effondrerait du temps du 13e Inca. De son côté, l'Espagnol, avec ruse, propose au "souverain du nord" de l'appuyer dans sa lutte fratricide. Atahualpa, ambitieux et curieux, tombe dans le piège.

Une rançon de douze tonnes d'or et d'argent
Le 16 novembre 1532, il accepte de rencontrer Pizarro au village de Cajamarca. Pour impressionner les étrangers, le "Fils du Soleil" parade sur une litière d'or, portée par les officiers de sa cour et l'élite de ses guerriers... sans armes. Lorsqu'un prêtre catholique lui tend une Bible, en l'exhortant à écouter la "parole du Dieu unique", Atahualpa porte le livre à son oreille. N'entendant rien, il le jette à terre avec dédain. Les Espagnols, cachés dans les maisons alentour, se précipitent alors sur lui en criant au blasphème et en déchargeant leurs fusils. Puis ils fondent sur la suite impériale paniquée, qu'ils massacrent sans pitié, et s'emparent du souverain. Au petit matin, on relèvera plus de 20 000 cadavres...

Impassible, Atahualpa se laisse emmener sans réagir. Pendant sa détention, le monarque apprend la capture de son demi-frère Huascar. Il espère encore être libéré et, craignant une traîtrise de sa part, il ordonne de le faire assassiner sans pitié. Parallèlement, le royal otage négocie sa liberté contre une fabuleuse rançon. Les temples et les palais sont vidés de douze tonnes d'or et d'argent. Pizarro, semble-t-il, apprend à estimer Atahualpa, dont il admire la noblesse d'âme. Mais il craint davantage de laisser repartir un ennemi aussi puissant, et il décide de le faire périr sur le bûcher. Néanmoins, comme l'Inca accepte in extremis de se "convertir" au christianisme, il est garrotté dans sa cellule, le 29 août 1533, au lieu d'être brûlé vif.

Courtesy of Musée du Quai Branly/Thierry Ollivier

Huascar -dont le nom signifie Fils de la joie- avait été désigné comme successeur de son père par la noblesse de Cuzco, avant d'être assassiné par son frère Atahualpa.

Les jeux de pouvoir espagnol
Un souverain fantoche, Topa Hualpa, demi-frère des précédents, est installé sur le trône par les Espagnols qui s'empressent toutefois de mettre à sac le pays conquis. Les fouilles et les analyses médico-légales, récemment menées sur les dépouilles des Indiens de l'époque, témoignent des exactions des conquérants qui violent, torturent, empalent, écartèlent, massacrent à la hache et au mousquet. Les missionnaires chrétiens zélés ne sont pas en reste, qui convertissent à la "vraie foi", sous la menace du bûcher, les malheureux adorateurs du Soleil.

L'Empire inca, privé de ses élites, s'effondre... Francisco Pizarro, titré marquis et nommé gouverneur du Pérou, ne profitera cependant pas très longtemps des fruits de sa conquête. S'il fonde en 1535 la Ciudad de les Reyes -qui deviendra Lima- il entre en conflit avec un autre conquistador, Pedro de Almagro, pour la conquête de Quito, puis pour la souveraineté de Cuzco. Et partout dans le pays, les Indiens opprimés se révoltent sous la férule de Monca Capac II, un autre fils de Huayna Capac, qui a succédé à l'éphémère Topa Hualpa. Enfin, la rapacité des trois frères de Pizarro, Gonzalo, Juan et Hernando, rend le clan très impopulaire, même auprès des Espagnols.

"Le royaume perdu des Incas"
Almagro tué par Hernando Pizarro, ses partisans entrent dans Lima pour prendre d'assaut le palais du gouverneur. Le 26 juin 1541, fait prisonnier par le fils d'Almagro, Francisco Pizarro est à son tour exécuté par ses compatriotes. Quant à la dynastie inca, réfugiée dans les montagnes de Vilcabamba, le "royaume perdu des Incas", elle survivra et mènera la guérilla contre les envahisseurs jusqu'à son extermination complète, en 1572.

C'est cette histoire d'une confrontation entre deux mondes, deux cultures, la plus sombre et sanglante de la conquête des Amériques, que relate l'exposition du musée du quai Branly au travers des ultimes témoignages de l'antique culture inca, sauvés de la rapacité des conquistadors, mais aussi des portraits de protagonistes, des peintures coloniales, des armes de guerre et des cartes anciennes.

MUSEO DEL ARTE

La Capture d'Atahualpa (vers 1920-1927), par Juan Lepiani.


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