Ni macron, ni mélenchon, ni le pen : les gilets jaunes votent… coluche

Ils ont compris ces GJ .
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Signe que le rejet de la classe politique actuelle est total, c'est une figure disparue qui rallie le plus les gilets jaunes : Coluche, mort en 1986, dont les citations et sketches nourrissent les pages Facebook des contestataires.
Une petite dame à capuche se faufile dans la foule en colère, sous l'Arc de Triomphe à Paris, samedi 1er décembre. Au dos de son gilet jaune, un slogan écrit au feutre noir : "Coluche président". Quelques dizaines de mètres plus loin, un jeune homme énervé agite sa pancarte dans l'air saturé par les gaz lacrymogènes : "Tous ensemble = pouvoir", y lit-on, ainsi qu'une autre inscription, plus discrète, en haut à droite de son bout de carton : "Coluche avec nous". Mort il y a plus de trente ans (en 1986), l'humoriste fait aujourd'hui un carton dans le mouvement qui rejette toute figure politique ou syndicale vivante.

Citation de Coluche, vidéo de Coluche…
Se balader quelques minutes sur les groupes Facebook des gilets jaunes suffit à confirmer l'attrait qu'exerce sur le mouvement le comique qui aimait arborer salopette et t-shirt… jaune. Sur le groupe la "France en colère", le premier du mouvement avec ses 245.000 membres, il revient régulièrement dans les messages et les vidéos. Une séquence de 1980, dans laquelle l'humoriste revendique sa fameuse candidature à la présidentielle (avec pour slogan : "Jusqu'à présent, la France est coupée en deux, avec moi elle sera pliée en quatre !"), qu'il présente comme "une histoire de *****", est particulièrement relayée. "Je voudrais qu'on remue la ***** et que l'odeur monte jusqu'au nez des mecs qui dirigent", clame l'artiste. Diffusée une première fois le 26 octobre, la vidéo a rapidement obtenu plus de 1.000 "likes" et des centaines de commentaires. Et la citation de Coluche revient régulièrement dans l'argumentaire des gilets jaunes en interview.

Ces derniers jours, d'ailleurs, de nombreux gilets jaunes mettent en balance l'engagement social de celui qui avait fondé les Restos du cœur en 1985, quelques mois avant sa mort, et le silence de ses lointains successeurs des Enfoirés. "Coluche doit se retourner dans sa tombe", déplore un visuel des Enfoirés du cœur, très partagé dans les groupes Facebook de militants. Le document pointe les artistes comme de "faux citoyens qui vive (sic) grâce aux gilets jaunes". Les oreilles des intéressés ont tellement sifflé que Michael Youn s'est senti obligé de répondre : "Les Enfoirés, ce sont 50 individus, avec chacun leur façon de penser, qui se réunissent tous les ans depuis 30 ans pour aider ceux qui ne mangent pas à leur faim. Ni plus ni moins. Il n'y a donc aucune raison que nous nous exprimions, en tant que groupe, sur la crise actuelle", a répliqué sur Instagram l'auteur de Fous ta cagoule.
 

Pièces jointes

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Quand on discute avec les gilets jaunes, beaucoup brandissent, à l'appui de leur argumentation, une autre citation de Coluche sur le droit de vote. Jacline Mouraud, qui a fait six millions de vues avec sa vidéo d'interpellation du chef de l'Etat, nous la cite de tête : "Si voter changeait quelques chose, il y a longtemps que ça serait interdit". Steven Lebee, un des gilets jaunes les plus actifs de Haute-Savoie que nous avons interrogé pour un dossier de Marianne utilise exactement la même phrase.

Coluche, représentant d'un "nous" face à "eux"
Cette popularité extraordinaire de Coluche auprès des gilets jaunes doit beaucoup à la position unique acquise par l'humoriste natif de Montrouge (Hauts-de-Seine) dans la société française. Selon Marie Duret-Pujol, maître de conférences en études théâtrales et auteure de l'ouvrage Coluche président !, par ailleurs militante France Insoumise, l'artiste était perçu comme un homme du peuple et non comme un représentant de l'élite : "Coluche était identifié comme porteur de vérités et un contestataire face à l'ordre établi, ceux qui se permettent de dire le monde. Dans les conférences, les gens disent que ce mec-là, il disait des vérités. Il dessine un 'eux' et un 'nous'".

L'universitaire nous cite deux sketchs particulièrement "gilets jaunes-compatibles" : Alors, y'a la télévision, dans lequel Coluche moque la déconnexion du microcosme politico-journalistique, et En politique, on est vachement balaise, joué en 1980 "quand il entre en campagne" pour sa candidature à la présidentielle. Le comique y "remet en cause certaines mesures politiques mises en place" et la compétence des élites politiques. Voilà qui recoupe, effectivement, certaines préoccupations des gilets jaunes.

Le style de Coluche permettent également d'expliquer son aura auprès de la population fluo. "La manière dont il s'habillait, dont il parlait, participait à la sympathie qu'il inspirait. Il n'était jamais habillé comme un politique mais comme un artiste. Les gens se disaient : 'il comprend le monde dans lequel je vis'", estime Marie Duret-Pujol
 
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Ni Mélenchon ni Le Pen ni les autres
En creux, cette identification à l'humoriste en salopette met en évidence le rejet que suscite l'ensemble de la classe politique auprès des militants, qui préfèrent se tourner vers une figure disparue. "Mélenchon ou Le Pen, c'est la même plaie. Ils sont tous déconnectés", affirme Gilles Latour à Marianne. "Avant Macron, j'avais l'impression que les politiciens étaient tous pareils (..) Avec lui, j'en ai eu la preuve. Puis, il y a eu les affaires Fillon, Le Pen, les comptes de campagne de la France Insoumise… Il n'y en a pas un pour mettre à la place de l'autre!", nous expose, de la même façon, Jonathan Deval.

Quel vivant mettre à la place ? Il n'existe pas, pour l'heure de "nouveau Coluche" dans le cœur des gilets jaunes, ni même d'autre personnalité unanimement respectée au sein du mouvement. Cette particularité empêche pour l'heure d'envisager que cette mobilisation - qui pourrait rallier jusqu'à 12% des électeurs aux élections européennes de mai prochain - se mue en équivalent du Mouvement cinq étoiles italien. Les deux ont plusieurs points communs : une défiance à l'encontre des élites politico-médiatiques et une demande de démocratie plus directe, sauf qu'à l'inverse des gilets jaunes, les "cinque stelle" ont pu se reposer pendant près d'une dizaine d'années sur un leader charismatique, l'humoriste Beppe Grillo, souvent surnommé… le "Coluche italien".

marianne
 
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