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Mais où donc a-t-on arrêté les arabes à poitiers ? #1
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[QUOTE="mam80, post: 13563193, member: 228134"] suite 1 Cebâtard de Charles Pour 732 et la première bataille de Poitiers, il n'y a rien eu avant 1999. Aucun ossuaire, aucune chapelle, aucune stèle commémorative. On peut s'en étonner. Il nous semblait qu'en 732 "Charles Martel avait arrêté les Arabes à Poitiers" (ou, comme le regrettera le beauf raciste de Coluche, "qu'il avait arrêté les Arabes à moitié"). Cette antienne répétée dans les manuels scolaires, qui n'avait rien à envier à Marignan 1515, aurait dû valoir à Poitiers de figurer au firmament des commémorations. Christophe Naudin et William Blanc, qui préparent un ouvrage sur le sujet, ont constaté avec surprise la même relative indifférence. Elle débute assez tôt, après la chute des Carolingiens, dynastie fondée, rappelons-le, par Charles Martel. Les Capétiens ont repris la main. Pourquoi feraient-ils l'apologie du fondateur de la lignée qu'ils ont supplantée ? L'Église s'en mêle aussi. Les ecclésiastiques ne pardonnent pas à Charles Martel, qui était un bâtard, ses violences présumées sur les évêques et leurs biens. On ne s'attire pas impunément les foudres d'une institution qui tint longtemps les registres de l'histoire. Bien plus tard, Voltaire en voulut aussi à Charles pour d'autres raisons qu'il exposa dans son Essai sur les moeurs : sous les Lumières, le barbare n'était pas là où on le croyait. Les rustres se trouvaient chez les chrétiens et non chez les musulmans, dont la civilisation, au VIIIe siècle, était bien plus avancée. Pour le prophète de Ferney, Poitiers fut donc une régression. Récupération coloniale Il faudra attendre Chateaubriand pour que la bataille reprenne du poil de la bête. Dans son Génie du christianisme, François-René se laisse aller à quelques élans lyriques sur ce champ où "Dieu était de notre côté". Pour lui, c'est tout simplement la chrétienté qui a été sauvée ce jour-là. L'illuminé de Combourg ne voit guère d'événement plus décisif dans l'histoire de France et sous sa plume, Poitiers montre la voie aux croisés en guerre contre les infidèles. Si 732 n'est pas oubliée dans la galerie des Batailles inaugurée à Versailles par Louis-Philippe en 1837, les mobiles sont à chercher en... Algérie. La France vient de se lancer dans l'aventure coloniale et cette victoire sur les Arabes tombe à pic. Charles Martel n'est pas sorti du purgatoire, mais sa BA est récupérée. William Blanc attire mon attention sur le tableau de Puvis de Chavannes, qui trône aujourd'hui dans l'escalier d'honneur de la mairie de Poitiers. Une relecture fascinante qui date de 1873, à l'aune du colonialisme. L'affrontement, on s'en fiche, on montre des Arabes genou à terre, s'inclinant devant les seigneurs d'Occident. On exalte la soumission musulmane. Quant à l'arrière-plan, la caillasse évoque moins les paysages du Poitou que les déserts algériens. La dernière opération militaire, de l'autre côté de la Méditerranée, vient d'avoir lieu en 1871 et l'on songe à transformer l'Algérie en département. CQFD. Un usage pyromane de l'histoire On pensait donc que Poitiers faisait partie des must de la IIIe République. Il faut remettre les pendules à l'heure. Présente dans certains manuels, elle est oubliée dans le Petit Lavisse de 1913, le livre le plus diffusé de la IIIe République. Charles Martel, qui n'a droit que tardivement à une biographie (Jean Deviosse, en 1978, chez Tallandier), fait toujours partie des recalés du Panthéon, barré par son petit-fils, Charlemagne, qui était allé aussi combattre les Maures un peu plus tard, à Roncevaux et ailleurs. D'autres rois, comme Louis XI, l'apothicaire rusé qui rapiéça le royaume de France, ont les faveurs des historiens. Mais surtout l'image de Poitiers continue à se brouiller, polluée par les récupérateurs de bataille. Les vautours continuent à tourner au-dessus des cadavres de Moussais. Leur obsession commune : repousser les Arabes. Tel est l'usage pyromane de l'histoire : on convoque le passé, on s'empare de ses bannières, pour attiser les flammes du présent. C'est d'abord l'OAS qui fonde un groupe Charles Martel. Puis un groupuscule d'extrême droite s'empare du nom en 1972 et défraie la chronique en assassinant le consul d'Algérie à Marseille. Pauvre Charles, mis à toutes les sauces, y compris par les socialistes qui, en 1982, centralisent à Poitiers l'opération douanière baptisée 732 pour contrecarrer "l'invasion" des magnétoscopes japonais. Le coup de grâce est porté par Bruno Mégret, qui débarque en 2000 et 2001 sur le site fraîchement inauguré de Moussais-la-Bataille. Mégret, qui vient de faire sécession du FN pour fonder le MPR, se cherche une figure de ralliement. Son ancien parti ayant confisqué Jeanne d'Arc qui a "bouté les Anglais hors de France", il se console avec Charles Martel qui aurait fait de même avec les Arabes. Yves Texier, le maire de Vouneuil dont dépend Moussais, n'a pas oublié leur passage : "Un châtelain du coin, sympathisant, les avait logés. Puis ils étaient venus à Moussais, avec leur service d'ordre. Cela grouillait de sbires en manteau de cuir qui faisaient la circulation, une atmosphère un peu étrange. Je n'avais pas le pouvoir d'interdire le rassemblement. On serait allé au clash." Pour Mégret, Poitiers était évidemment du pain bénit, quitte à réécrire l'histoire. Avec lui, la coalition de Charles Martel devient un agrégat de troupes ayant repoussé l'étranger sous la bannière de la race européenne chrétienne. Seule victime de la manifestation : le drapeau de l'islam qui flottait en haut du mât planté au centre de l'échiquier et que les hommes du MPR ont arraché. "Cette bataille, on s'en fichait complètement" Poitiers dérange. Divise. Ce n'est pas la première fois que l'extrême droite faisait parler d'elle. "Le projet de ce musée en plein air a déclenché aussitôt des réactions hostiles. Des habitants des villages voisins, à Montgimbé ou à Pied-Sec, ont prétendu qu'on allait attirer les Arabes." En réalité, l'idée ne venait pas de lui. "Au fil des ans, je voyais des randonneurs, des amateurs d'histoire, parfois des journalistes qui venaient me dire : qu'est-ce que vous avez à nous montrer ? On n'avait rien. J'avais fouillé dans les procès-verbaux de la commune. Aucune trace. Cette bataille, on s'en fichait complètement." à suivre sur [url]http://www.lepoint.fr/histoire/mais-ou-donc-a-t-on-arrete-les-arabes-a-poitiers-1-21-02-2015-1906802_1615.php#xtor=EPR-6-%5BNewsletter-Mi-journee%5D-20150222[/url] mam [/QUOTE]
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