A Mayotte, où Emmanuel Macron vient d’atterrir, la moitié de la population est étrangère. Reportage dans les misérables baraquements de Kaweni, où des milliers d’immigrés comoriens s’entassent.
Des hauteurs de Mamoudzou (Mayotte), un regard suffit pour apercevoir les colonnes de fumée. Ce sont de petites parcelles de forêt que l'on brûle, çà et là, pour y installer un logement de fortune ou y planter manioc et bananiers, promesse de subsistance. Du centre-ville, quelques minutes en voiture conduisent à ce dont on parle ici comme « du plus grand bidonville de France ».
Le quartier de Kaweni s'étend du bord de la nationale, deux voies, la plus importante route de l'île, jusque sur les pans de collines grignotées par des baraquements de tôle. S'y entassent et survivent, sans eau ni électricité, des milliers d'immigrés.
A Mayotte, petit bout de France posé au milieu de l'océan Indien, où Emmanuel Macron se rend ce mardi, 48 % des 256 000 habitants sont des étrangers - la moitié de sans-papiers - principalement venus des Comores, l'un des Etats les plus pauvres du monde. Un ratio inédit en France (6,5 % d'étrangers en moyenne) qui déstabilise profondément le 101e département et décuple les crispations.
Emmanuel Macron ne verra pas ces ruelles
Les ruelles en terre battue de Kaweni, Emmanuel Macron ne les verra pas. Son programme ne prévoit pas la visite de l'un de ces quartiers qui pullulent dans Mamoudzou, la ville préfecture. C'est ici que Naouir Mohamed-Bacar, apprenti menuisier de 18 ans, a rejoint sa mère il y a quatre ans. Certains pans de tôle ondulée, brillants de neuf, ou ces garçonnets qui chargent des sacs de pierres récupérées au sol, en témoignent : de nouveaux « bangas » continuent de se construire.
Dans les « bangas », les bidonvilles, comme Kaweni, les familles vivent dehors dans d’affreuses conditions./LP/Pauline Theveniaud
« Il est impossible de rester dedans, c'est trop étouffant. Alors, les familles vivent dehors », explique Alison Morano, anthropologue qui étudie le quartier depuis 2015. La vie à Kaweni, « c'est trop compliqué, difficile », dit pudiquement Naouir. Débrouille et bricole, pour gagner trois sous. La borne-fontaine pour se laver ou faire le linge - les maigres ruisseaux sont obstrués de déchets. Des boîtes aux lettres improvisées, où les noms sont marqués au feutre, pour s'inscrire à l'école. Là, une échelle sert de ponton au-dessus d'un ravin. « L'enfer consternant », dit Youssouff Athoumane, qui vit là depuis 1991. Et pourtant, témoigne Naouir, « personne ne vous dira qu'il veut retourner aux Comores ».
« Il n'y a pas les ressources naturelles capables d'accueillir toutes ces personnes »
A une poignée de kilomètres de là, dans le hall d'un hôtel, le Collectif des citoyens de Mayotte veut que l'on entende aussi sa souffrance à quelques heures de la visite présidentielle. « Aucun territoire ne subit cette pression migratoire. Il n'y a pas, à Mayotte, les ressources naturelles capables d'accueillir toutes ces personnes. Et 84 % de la population est en situation de pauvreté », souligne Estelle Youssouffa, présidente de ce collectif courroucé par un sentiment d'abandon et un cumul des difficultés. Elle évoque la saturation des écoles – et leurs salles de classe tournantes, occupées par certains élèves le matin, par d'autres l'après-midi ; la surabondance de déchets ; l'insécurité.
Depuis les hauteurs de Kaweni, Ayouba, 20 ans, venu à Mayotte « pour trouver du travail », observe : « Les Mahorais ont raison de dire cela. Mais l'Etat des Comores fait n'importe quoi. On ne peut pas aller à l'école, pas travailler. Même si cela dérange, même si je souffre, je préfère rester là. »
http://www.leparisien.fr/politique/...d-bidonville-de-france-22-10-2019-8177589.php
Des hauteurs de Mamoudzou (Mayotte), un regard suffit pour apercevoir les colonnes de fumée. Ce sont de petites parcelles de forêt que l'on brûle, çà et là, pour y installer un logement de fortune ou y planter manioc et bananiers, promesse de subsistance. Du centre-ville, quelques minutes en voiture conduisent à ce dont on parle ici comme « du plus grand bidonville de France ».
Le quartier de Kaweni s'étend du bord de la nationale, deux voies, la plus importante route de l'île, jusque sur les pans de collines grignotées par des baraquements de tôle. S'y entassent et survivent, sans eau ni électricité, des milliers d'immigrés.
A Mayotte, petit bout de France posé au milieu de l'océan Indien, où Emmanuel Macron se rend ce mardi, 48 % des 256 000 habitants sont des étrangers - la moitié de sans-papiers - principalement venus des Comores, l'un des Etats les plus pauvres du monde. Un ratio inédit en France (6,5 % d'étrangers en moyenne) qui déstabilise profondément le 101e département et décuple les crispations.
Emmanuel Macron ne verra pas ces ruelles
Les ruelles en terre battue de Kaweni, Emmanuel Macron ne les verra pas. Son programme ne prévoit pas la visite de l'un de ces quartiers qui pullulent dans Mamoudzou, la ville préfecture. C'est ici que Naouir Mohamed-Bacar, apprenti menuisier de 18 ans, a rejoint sa mère il y a quatre ans. Certains pans de tôle ondulée, brillants de neuf, ou ces garçonnets qui chargent des sacs de pierres récupérées au sol, en témoignent : de nouveaux « bangas » continuent de se construire.
Dans les « bangas », les bidonvilles, comme Kaweni, les familles vivent dehors dans d’affreuses conditions./LP/Pauline Theveniaud
« Il est impossible de rester dedans, c'est trop étouffant. Alors, les familles vivent dehors », explique Alison Morano, anthropologue qui étudie le quartier depuis 2015. La vie à Kaweni, « c'est trop compliqué, difficile », dit pudiquement Naouir. Débrouille et bricole, pour gagner trois sous. La borne-fontaine pour se laver ou faire le linge - les maigres ruisseaux sont obstrués de déchets. Des boîtes aux lettres improvisées, où les noms sont marqués au feutre, pour s'inscrire à l'école. Là, une échelle sert de ponton au-dessus d'un ravin. « L'enfer consternant », dit Youssouff Athoumane, qui vit là depuis 1991. Et pourtant, témoigne Naouir, « personne ne vous dira qu'il veut retourner aux Comores ».
« Il n'y a pas les ressources naturelles capables d'accueillir toutes ces personnes »
A une poignée de kilomètres de là, dans le hall d'un hôtel, le Collectif des citoyens de Mayotte veut que l'on entende aussi sa souffrance à quelques heures de la visite présidentielle. « Aucun territoire ne subit cette pression migratoire. Il n'y a pas, à Mayotte, les ressources naturelles capables d'accueillir toutes ces personnes. Et 84 % de la population est en situation de pauvreté », souligne Estelle Youssouffa, présidente de ce collectif courroucé par un sentiment d'abandon et un cumul des difficultés. Elle évoque la saturation des écoles – et leurs salles de classe tournantes, occupées par certains élèves le matin, par d'autres l'après-midi ; la surabondance de déchets ; l'insécurité.
Depuis les hauteurs de Kaweni, Ayouba, 20 ans, venu à Mayotte « pour trouver du travail », observe : « Les Mahorais ont raison de dire cela. Mais l'Etat des Comores fait n'importe quoi. On ne peut pas aller à l'école, pas travailler. Même si cela dérange, même si je souffre, je préfère rester là. »
http://www.leparisien.fr/politique/...d-bidonville-de-france-22-10-2019-8177589.php