La journaliste marocaine Zineb El-Rhazoui, cofondatrice du Mouvement alternatif pour les libertés individuelles et membre du Mouvement du 20 février, explique, dans les pages du quotidien algérien El Watan, les limites de la réforme constitutionnelle.
Pourquoi l'appel au boycott lors du référendum du 1er juillet ?
Nous refusons à la fois la forme de la Constitution, son fond et le référendum lui-même. Le régime marocain s'est fait maître en l'art de la manipulation des scrutins ! S'agissant de la forme, il s'agit d'une Constitution cocotte-minute faite en un temps record ! Rendue publique le 19 juin, soumise à un référendum national le 1erjuillet, c'est du jamais vu ! Une dizaine de jours ne suffisent pas pour soumettre ce texte à un débat national qui, par ailleurs, est inexistant ! De plus, ce texte a été concocté dans les arcades du palais royal. Suite à son discours du 9 mars où les lignes de cette constitution ont été tracées, le roi a lui-même nommé une commission ad hoc composée de personnes en perte de crédibilité totale auprès du peuple marocain et qui n'ont aucune représentativité.
Pour ce qui est du fond, cette Constitution a été faite pour le makhzen [le pouvoir]. Nous nous attendions donc à ce qu'elle soit taillée sur mesure pour le roi, mais pas à ce qu'elle soit aussi décevante. Le texte, non seulement n'apporte aucun changement, mais contrairement à ce qui a été dit dans les médias complaisants, notamment français, il est rétrograde et plus absolutiste que le précédent et cela pour plusieurs raisons : le texte va dans le sens de la théocratisation de l'Etat marocain. Le roi n'est plus seulement commandeur des croyants, mais il est devenu une sorte de Saint en prenant la tête du Conseil des oulémas qui, par ailleurs, a été constitutionalisé, ce qui n'était pas le cas avant. Le conseil sera aussi l'unique instance habilitée à émettre des fatwas. Le roi fait donc entrer le clergé dans la Constitution.
Par ailleurs, le roi est également le président du Conseil de sécurité, les sécuritaires continueront donc à échapper au contrôle des politiques. Il a la mainmise directe sur le législatif et possède tous les pouvoirs de l'Exécutif. Le texte parle bel et bien de l'indépendance de la justice, c'est le roi qui préside le Conseil supérieur de la magistrature, c'est lui qui nomme les juges et c'est lui qui possède tous les pouvoirs de l'Exécutif.
La séparation des pouvoirs et l'indépendance de la justice sont donc un leurre ?
Absolument! Certaines prérogatives officieuses du cabinet royal, qui existaient dans la pratique, mais pas dans le texte, sont aujourd'hui inscrites dans le texte. Par exemple, toute cette flopée de conseils consultatifs que Mohammed VI créent depuis son accession au trône. Ils sont financés par le contribuable marocain, Mohammed VI nomme des technocrates à leur tête et c'est derniers ne doivent rendre de comptes qu'au roi, maintenant ces conseils sont dans la Constitution, alors qu'ils échappent aux instances représentatives du peuple.
http://www.courrierinternational.co...mmed-vi-a-rate-un-rendez-vous-avec-l-histoire
Pourquoi l'appel au boycott lors du référendum du 1er juillet ?
Nous refusons à la fois la forme de la Constitution, son fond et le référendum lui-même. Le régime marocain s'est fait maître en l'art de la manipulation des scrutins ! S'agissant de la forme, il s'agit d'une Constitution cocotte-minute faite en un temps record ! Rendue publique le 19 juin, soumise à un référendum national le 1erjuillet, c'est du jamais vu ! Une dizaine de jours ne suffisent pas pour soumettre ce texte à un débat national qui, par ailleurs, est inexistant ! De plus, ce texte a été concocté dans les arcades du palais royal. Suite à son discours du 9 mars où les lignes de cette constitution ont été tracées, le roi a lui-même nommé une commission ad hoc composée de personnes en perte de crédibilité totale auprès du peuple marocain et qui n'ont aucune représentativité.
Pour ce qui est du fond, cette Constitution a été faite pour le makhzen [le pouvoir]. Nous nous attendions donc à ce qu'elle soit taillée sur mesure pour le roi, mais pas à ce qu'elle soit aussi décevante. Le texte, non seulement n'apporte aucun changement, mais contrairement à ce qui a été dit dans les médias complaisants, notamment français, il est rétrograde et plus absolutiste que le précédent et cela pour plusieurs raisons : le texte va dans le sens de la théocratisation de l'Etat marocain. Le roi n'est plus seulement commandeur des croyants, mais il est devenu une sorte de Saint en prenant la tête du Conseil des oulémas qui, par ailleurs, a été constitutionalisé, ce qui n'était pas le cas avant. Le conseil sera aussi l'unique instance habilitée à émettre des fatwas. Le roi fait donc entrer le clergé dans la Constitution.
Par ailleurs, le roi est également le président du Conseil de sécurité, les sécuritaires continueront donc à échapper au contrôle des politiques. Il a la mainmise directe sur le législatif et possède tous les pouvoirs de l'Exécutif. Le texte parle bel et bien de l'indépendance de la justice, c'est le roi qui préside le Conseil supérieur de la magistrature, c'est lui qui nomme les juges et c'est lui qui possède tous les pouvoirs de l'Exécutif.
La séparation des pouvoirs et l'indépendance de la justice sont donc un leurre ?
Absolument! Certaines prérogatives officieuses du cabinet royal, qui existaient dans la pratique, mais pas dans le texte, sont aujourd'hui inscrites dans le texte. Par exemple, toute cette flopée de conseils consultatifs que Mohammed VI créent depuis son accession au trône. Ils sont financés par le contribuable marocain, Mohammed VI nomme des technocrates à leur tête et c'est derniers ne doivent rendre de comptes qu'au roi, maintenant ces conseils sont dans la Constitution, alors qu'ils échappent aux instances représentatives du peuple.
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