Par Thierry Oberlé
Le monarque a nommé mardi le leader du parti islamiste, vainqueur des législatives, chef du gouvernement.
Mohammed VI a reçu mardi au palais de Midelt, sur les hauteurs de l'Atlas, Abdelilah Benkirane, le secrétaire général du Parti de la justice et du développement (PJD), pour lui confier la formation du nouveau gouvernement. Le chef de la formation islamo-conservatrice arrivée en tête des élections législatives anticipées a prêté serment lors d'une brève cérémonie. Cette forme de cohabitation suscite déjà des interrogations. Le courant va-t-il passer entre le commandeur des croyants et l'islamiste ? Un équilibre va-t-il être trouvé entre les conseillers du palais royal et le premier ministre ?
Abdelilah Benkirane est confronté à une double contrainte. Le chef du gouvernement dispose, selon la nouvelle Constitution, de pouvoirs élargis, mais sa marge de manuvre est réduite. Le roi, qui a un rôle d'arbitre suprême, conserve en effet son domaine réservé, un peu à la manière du chef de l'État en France. Il veille sur la politique étrangère, la sécurité intérieure, la défense
Arrivé en tête du scrutin, le PJD a gagné un quart des sièges au Parlement. Abdelilah Benkirane est donc obligé pour disposer d'une majorité devant les députés de proposer des portefeuilles ministériels à des membres de la Koutla, une alliance regroupant l'Istiqlal, l'Union socialiste des forces populaires (USFP) et le Parti du progrès et du socialisme (PPS) pour gouverner.
«Le roi finira par nous aimer»
Monarchiste, Benkirane se veut un fervent défenseur de la stabilité du régime. «Notre objectif n'est pas de porter préjudice au palais royal mais de s'entendre avec lui. Si nous voulons réussir, nous devons travailler avec lui», expliquait-il déjà en septembre 2006 au Figaro. Il s'est montré récemment plus précis à Casablanca. «Si le roi ne m'aime pas, ce n'est pas mon problème, il finira certainement par nous aimer lorsqu'il verra notre travail», disait-il. Preuve de sa bonne volonté, il a noué une cravate autour de son cou pour rendre visite au roi. Une première. Jusque-là, il jurait qu'il ne porterait jamais cet «attribut occidental».
Âgé de 57 ans, physique de fonceur, Abdelilah Benkirane a la réputation de ne pas faire dans la dentelle. Ses discours de bon musulman proche des préoccupations des gens font de lui un personnage populaire. On dit de lui qu'il lit peu et prie beaucoup. Populiste, ce tribun a le sens de la formule qui fait mouche et le goût de l'outrance verbale. Ce côté transgressif séduit ou agace. Impulsif, il se laisse, en dépit de son air patelin, facilement emporter. «Il m'a agressé lors d'un débat en assurant que je le faisais vomir», raconte le politologue et spécialiste des mouvements islamistes Mohammed Darif. Voilà quelques années, il s'était emporté dans l'hémicycle du Parlement contre la tenue jugée trop légère d'une cadreuse. Moralisateur, Abdelilah Benkirane dénonce sans relâche la corruption et les petits arrangements entre amis de la classe politique, les «magouilles». Il prône la transparence de l'administration et des marchés publics, l'intégrité de la justice, défend les bonnes murs. L'été dernier, il s'est lancé - en marge du débat sur l'inscription de la liberté de conscience dans la Constitution - dans des diatribes contre les laïques qu'il accuse de vouloir répandre la «déviation sexuelle», autrement dit l'homosexualité.
Le monarque a nommé mardi le leader du parti islamiste, vainqueur des législatives, chef du gouvernement.
Mohammed VI a reçu mardi au palais de Midelt, sur les hauteurs de l'Atlas, Abdelilah Benkirane, le secrétaire général du Parti de la justice et du développement (PJD), pour lui confier la formation du nouveau gouvernement. Le chef de la formation islamo-conservatrice arrivée en tête des élections législatives anticipées a prêté serment lors d'une brève cérémonie. Cette forme de cohabitation suscite déjà des interrogations. Le courant va-t-il passer entre le commandeur des croyants et l'islamiste ? Un équilibre va-t-il être trouvé entre les conseillers du palais royal et le premier ministre ?
Abdelilah Benkirane est confronté à une double contrainte. Le chef du gouvernement dispose, selon la nouvelle Constitution, de pouvoirs élargis, mais sa marge de manuvre est réduite. Le roi, qui a un rôle d'arbitre suprême, conserve en effet son domaine réservé, un peu à la manière du chef de l'État en France. Il veille sur la politique étrangère, la sécurité intérieure, la défense
Arrivé en tête du scrutin, le PJD a gagné un quart des sièges au Parlement. Abdelilah Benkirane est donc obligé pour disposer d'une majorité devant les députés de proposer des portefeuilles ministériels à des membres de la Koutla, une alliance regroupant l'Istiqlal, l'Union socialiste des forces populaires (USFP) et le Parti du progrès et du socialisme (PPS) pour gouverner.
«Le roi finira par nous aimer»
Monarchiste, Benkirane se veut un fervent défenseur de la stabilité du régime. «Notre objectif n'est pas de porter préjudice au palais royal mais de s'entendre avec lui. Si nous voulons réussir, nous devons travailler avec lui», expliquait-il déjà en septembre 2006 au Figaro. Il s'est montré récemment plus précis à Casablanca. «Si le roi ne m'aime pas, ce n'est pas mon problème, il finira certainement par nous aimer lorsqu'il verra notre travail», disait-il. Preuve de sa bonne volonté, il a noué une cravate autour de son cou pour rendre visite au roi. Une première. Jusque-là, il jurait qu'il ne porterait jamais cet «attribut occidental».
Âgé de 57 ans, physique de fonceur, Abdelilah Benkirane a la réputation de ne pas faire dans la dentelle. Ses discours de bon musulman proche des préoccupations des gens font de lui un personnage populaire. On dit de lui qu'il lit peu et prie beaucoup. Populiste, ce tribun a le sens de la formule qui fait mouche et le goût de l'outrance verbale. Ce côté transgressif séduit ou agace. Impulsif, il se laisse, en dépit de son air patelin, facilement emporter. «Il m'a agressé lors d'un débat en assurant que je le faisais vomir», raconte le politologue et spécialiste des mouvements islamistes Mohammed Darif. Voilà quelques années, il s'était emporté dans l'hémicycle du Parlement contre la tenue jugée trop légère d'une cadreuse. Moralisateur, Abdelilah Benkirane dénonce sans relâche la corruption et les petits arrangements entre amis de la classe politique, les «magouilles». Il prône la transparence de l'administration et des marchés publics, l'intégrité de la justice, défend les bonnes murs. L'été dernier, il s'est lancé - en marge du débat sur l'inscription de la liberté de conscience dans la Constitution - dans des diatribes contre les laïques qu'il accuse de vouloir répandre la «déviation sexuelle», autrement dit l'homosexualité.